Intervention de Rachida Dati

Réunion du 18 juin 2008 à 15h00
Modernisation des institutions de la ve république — Article 1er A, amendements 95 276 156 349 399 400 315 376

Rachida Dati, garde des sceaux :

Certains d’entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, font valoir qu’une telle disposition aurait mieux sa place à l’article 2 de la Constitution. Tel fut le débat à l’Assemblée nationale. Nombre de députés ont d’ailleurs hésité. J’estime que le choix effectué, à savoir le maintien de cette disposition à l’article 1er, fut le bon.

En effet, l’article 2 de la Constitution concerne la République et s’inscrit dans le titre Ier, consacré à la souveraineté. Le français est la langue de la République française, comme il est la langue de la France, ainsi que vous l’avez rappelé tout à l’heure, monsieur Renar, depuis l’ordonnance de Villers-Cotterêts de 1539.

L’article 1er est relatif à la France, dans toute sa diversité, acceptée et assumée, au nom du principe d’égalité devant la loi et du respect des différences. Cette diversité est prise en compte sur le plan administratif, notamment par l’organisation décentralisée. C'est pourquoi le Gouvernement a estimé que les langues régionales avaient leur place dans cet article, qui mentionne l’organisation décentralisée de la République.

Dans cette reconnaissance de notre diversité, les langues régionales ont toute leur place. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur les amendements et sous-amendements que j’ai cités au début de mon intervention.

J’en viens aux amendements et sous-amendements qui ne concernent pas les langues régionales. Le Gouvernement est uniquement favorable à l’amendement n° 95, présenté par la commission. Il est, par conséquent, défavorable au sous-amendement n° 276 rectifié, aux sous-amendements identiques n° 156 et 349, aux sous-amendements n° 399 rectifié et 400 rectifié, ainsi qu’aux amendements n° 315 et 376 rectifié.

L’objectif de parité en matière politique a été reconnu à l’article 3 de la Constitution par la loi constitutionnelle du 8 juillet 1999.

En première lecture, l’Assemblée nationale a adopté le principe de la parité dans le domaine des responsabilités professionnelles et sociales. Elle a donc introduit de nouvelles dispositions à l’article 34 de la Constitution relatif au domaine de la loi.

Monsieur le rapporteur, vous proposez de regrouper ces dispositions à l’article 1er de la Constitution, qui a trait à la diversité de notre nation et réaffirme les principes d’égalité et de respect mutuel. Cette proposition est tout à fait judicieuse. La Constitution y gagnera en clarté et, surtout, en cohérence. Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur l’amendement n° 95.

Monsieur Détraigne, vous critiquez l’introduction dans la Constitution de la disposition tendant à favoriser l’égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités professionnelles et sociales. La question a été soumise au comité de réflexion sur le préambule de la Constitution, dont la lettre de mission comporte l’interrogation suivante : « Doit-on permettre au législateur de mieux garantir l’égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités, en dehors même de la sphère politique ? » C’est pour cette raison que le Gouvernement s’était déclaré défavorable à l’amendement initial qui avait été déposé au Palais-Bourbon. Toutefois, l’Assemblée nationale a considéré qu’elle était suffisamment éclairée pour trancher la question et a souhaité faire figurer ladite disposition dans la Constitution, et non dans le préambule.

Vous avez également indiqué que la disposition du préambule de 1946 en vertu de laquelle « La loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l’homme » serait plus favorable. Je rappelle que, au contraire, la jurisprudence du Conseil constitutionnel montre les limites de l’application stricte du principe d’égalité.

Ainsi, il n’est pas possible, sans modifier la Constitution, de prévoir une proportion minimale de femmes au sein des conseils d’administration, des conseils de surveillance, des comités d’entreprise, sur les listes des candidats aux conseils de prud’hommes ou autres organismes paritaires de la fonction publique. Telle est la décision prise au mois de mars 2006 par le Conseil constitutionnel. J’en déduis, par conséquent, que l’amendement adopté a toute sa pertinence. De ce fait, le Gouvernement émet un avis défavorable sur le sous-amendement n° 276 rectifié.

Mesdames, messieurs les sénateurs, plusieurs d’entre vous souhaitent que le principe de parité soit renforcé dans la Constitution et qu’il soit imposé au législateur d’assurer, et non de favoriser, l’égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités. Le choix du verbe « favorise » a été longuement débattu lors de la discussion de la loi constitutionnelle du 8 juillet 1999 relative à l’égalité entre les femmes et les hommes.

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