Cet amendement porte sur un problème très important qui, je le sais, intéresse nombre de sénatrices et de sénateurs, quelle que soit leur appartenance politique.
La question du droit de vote pour les résidents étrangers n’est pas anodine. J’oserais même dire qu’elle est aujourd'hui un enjeu de société, ne serait-ce que parce qu’elle concerne des millions de femmes et d’hommes qui vivent et travaillent sur notre territoire.
Sans vouloir faire de parallèle avec les discussions très intéressantes que nous avons eues sur les langues régionales ou sur la notion de race, je souhaiterais que nous puissions avoir dans cet hémicycle un débat tout aussi honnête, sincère, courageux et profond sur un sujet qui suscite habituellement les passions.
En effet, il me semble que la présente réforme constitutionnelle est une formidable occasion d’introduire dans notre loi fondamentale le droit de vote et d’éligibilité pour les résidents étrangers non communautaires aux élections municipales, en ajoutant, au quatrième alinéa de l’article 3 de la Constitution, qui définit la qualité d’électeur, que sont également électeurs les résidents étrangers sur le territoire français.
Vous l’aurez compris, mes chers collègues, je propose d’introduire dans notre loi fondamentale la reconnaissance de la citoyenneté des résidents étrangers, dans des conditions qui seront déterminées par la loi.
En effet, nous ne pouvons continuer à priver du droit de vote et d’éligibilité des millions de résidents qui participent, souvent depuis plusieurs années et de façon active, à la vie locale, associative, syndicale et culturelle de la France. Cela a déjà été souligné, mais il faut le répéter, car j’ai quelquefois le sentiment que, en la matière, beaucoup négligent le principe de réalité !
Ces résidents participent déjà aux élections prud’homales et syndicales, ils élisent les représentants des parents d’élèves aux conseils d’école, ils peuvent militer au sein d’un parti politique, sans pour autant pouvoir participer aux élections, quelles qu’elles soient. La plupart d’entre eux contribuent au développement économique et à la richesse de notre pays. Ils ont une vie familiale en France. D’ailleurs, leurs enfants, qui sont nés sur notre sol, ont généralement le droit de vote et sont donc des enfants de la République, ne comprennent pas vraiment pourquoi leurs parents sont exclus de ce droit.
Il est donc plus que temps de faire disparaître cette anomalie, afin que l’ensemble des habitants de nos villes puissent pleinement participer à la vie civique. Il s’agit aujourd’hui d’un enjeu majeur et, je le répète, d’une question de société. En outre, l’adoption d’une telle disposition peut permettre de lutter contre le communautarisme et le repli sur soi.
Dans une ville, les habitants forment ensemble une communauté de vie, d’histoire, de culture, de projets. Quelle que soit leur nationalité, une chose est sûre : ils ne sont pas étrangers à leur ville.
Les communistes se sont prononcés de longue date en faveur de l’ouverture de ce droit car, selon nous, chacun doit être pleinement citoyen là où il vit. C’est la garantie d’une citoyenneté participative et active, d’une construction partagée entre les différents habitants d’un territoire pour vivre ensemble dans l’égalité et la solidarité. Notre proposition ne peut être écartée au moyen de simples arguments quantitatifs, comme ceux que j’ai pu entendre tout à l’heure.
Je précise que nous parlons ici de citoyenneté de résidence. Il s’agit, par conséquent, des étrangers extracommunautaires présents en France depuis plusieurs années et en situation régulière, mais qui n’ont pas le droit de vote et d’éligibilité aux élections municipales, contrairement aux ressortissants de l’Union européenne.
Je pense que nous sommes nombreux dans cet hémicycle à en convenir : la différence de traitement entre les ressortissants de l’Union européenne et les résidents étrangers extracommunautaires apparaît de plus en plus injustifiée et injustifiable. Cela représente une véritable injustice.
M. Hyest a évoqué hier soir la citoyenneté européenne ; je considère, pour ma part, que nous sommes aussi des citoyens du monde. Il est temps de mettre fin à cette discrimination entre des citoyens qui, bien qu’ils vivent sur le même sol et ont les mêmes devoirs, ne jouissent pas des mêmes droits.
Cette idée d’accorder des droits nouveaux aux résidents étrangers extracommunautaires fait son chemin, y compris, je le répète, dans les rangs de la majorité.