Intervention de François Marc

Réunion du 8 septembre 2011 à 15h00
Deuxième loi de finances rectificative pour 2011 — Discussion générale

Photo de François MarcFrançois Marc :

Ce collectif propose de limiter la possibilité pour les entreprises bénéficiaires de reporter leurs déficits. La recette attendue pour 2011 sera de 0, 5 milliard d’euros. Cette mesure a dans son viseur l’injustice fiscale entre les grands groupes et les PME.

C’est un vrai problème, qui a d’ailleurs justifié que nous déposions une proposition de loi à ce sujet, discutée il y a peu de temps dans cet hémicycle.

Le Gouvernement semble donc, à son tour, conscient du fait que la pression fiscale est beaucoup plus faible pour les groupes du CAC 40 que pour les PME.

Si cette injustice à l’égard des PME n’est pas acceptable, le Conseil des prélèvements obligatoires, le CPO, a également pointé l’étendue des pertes financières pour l’État, qui se chiffreraient en 2010 à 70 milliards d’euros de moins-values de recettes sur l’impôt sur les sociétés ! Elles n’étaient que de 18, 5 milliards d’euros en 2005 !

En quelques années, la création de niches fiscales relatives à l’impôt sur les sociétés aura donc retiré tous les ans l’équivalent de 50 milliards d’euros de recettes au budget de l’État.

Souvenez-vous, notre proposition de loi introduisait un dispositif immédiat de justice fiscale entre entreprises et visait à la moralisation du système.

Le dispositif d’impôt minimum permettait en moyenne un doublement de l’impôt sur les sociétés payé en 2009 et 2010 par les grandes entreprises, soit a priori une rentrée fiscale de plus de 10 milliards d’euros par an.

Face à cette ambition, la « mesurette » du Gouvernement paraît bien dérisoire : elle ne s’attaque que très superficiellement à l’inégalité fiscale entre grands groupes et PME.

Notre proposition de loi a essuyé la fin de non-recevoir que l’on sait, mais le diagnostic qui la sous-tendait a été corroboré en juin dernier par la direction du Trésor dans son étude sur « le taux de taxation implicite des bénéfices en France », mais aussi en juillet par le rapporteur général du budget à l’Assemblée nationale, qui nous a donné raison dans son rapport sur l’application des lois fiscales.

La mesure d’harmonisation du report des déficits en matière d’impôts sur les sociétés avec les règles en vigueur en Allemagne vise, nous indique-t-on, à rapprocher l’imposition en France de celle en vigueur outre-Rhin. Face à des marchés impatients, on a pu entendre en cette fin d’été de belles déclarations en faveur d’un impôt sur les sociétés franco-allemand.

Ne s’agit-il pas là de paroles sans lendemain ?

Prévue à l’échéance de l’exercice 2013, sa mise en œuvre pourrait se heurter aux législations en vigueur, qui, en France, plus centralisée, et en Allemagne, pays fédéral, reposent sur des cultures et pratiques fiscales très différentes les unes des autres. En effet, comment prendre en compte les impôts locaux et régionaux dans les deux pays ? Comment ne pas contrevenir au principe européen de subsidiarité ?

Au-delà de ces annonces aux lendemains incertains, ce n’est secret pour personne que l’intégration financière européenne patine. Quand l’ACCIS, l’assiette commune consolidée d’impôt sur les sociétés, ce fameux dispositif d’harmonisation de l’impôt sur les sociétés, sera-t-elle opérationnelle ? Dans deux ans ? Cinq ans ? Va-t-on attendre jusque-là ?

Attention, donc, à ne pas se féliciter de certaines mesures qui ne seront peut-être jamais adoptées !

Comme on pouvait s’y attendre, l’été 2011 a été marqué par une nouvelle dégradation inquiétante des paramètres économiques et financiers.

Nous sommes manifestement entrés dans une nouvelle phase de la crise. Au cours des épisodes antérieurs, gouvernements et banques centrales ont déjà épuisé un certain nombre de cartouches. Cet été, on a pu mesurer à quel point la régulation des pratiques spéculatives des acteurs financiers avait peu progressé, malgré les grandes envolées des dirigeants du monde entier en 2008 et 2009 !

Face à ces défaillances, l’idée d’un budget européen renforcé fait son chemin. Il va de soi qu’une Europe plus puissante financièrement gagnerait en capacité d’action et en crédibilité.

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