Intervention de Bernard Cazeau

Réunion du 12 novembre 2009 à 10h00
Financement de la sécurité sociale pour 2010 — Article 1er

Photo de Bernard CazeauBernard Cazeau :

L’article 1er symbolise l’échec total des trois grandes mesures phares de la majorité en place depuis 2002.

La première est liée à la réforme des retraites.

En effet, 2008 devait être l’année du rétablissement durable à l’équilibre des comptes du régime vieillesse. Or, nous étions en 2008 à plus de 5, 6 milliards d’euros de déficit. Rappelons qu’en 2003, année de la réforme Fillon, la sécurité sociale avait près d’1 milliard d’euros d’excédent sur la branche des retraites. Le déficit dépasserait les 10, 5 milliards d’euros en 2010 et, selon les projections figurant à l’annexe B du projet de loi, atteindrait même 14, 5 milliards d’euros en 2013 !

La loi de 2003, en rendant encore plus complexe un corpus de règles déjà particulièrement dense et peu lisible, a rendu très difficile la prévisibilité des évolutions affectant les retraites. À cet égard, il faut souligner que la Cour des comptes, cette année – et c’est une première ! –, a refusé de certifier les comptes du régime vieillesse de l’année 2008.

Le deuxième échec est lié à la réforme de l’assurance maladie d’août 2004.

Elle n’a apporté aucune réponse à ces grandes questions ni même aux principes qui justifiaient la réforme. En 2008, le déficit de cette branche a été de 4, 4 milliards d’euros. Il quadruplera l’année prochaine pour être à plus de 17 milliards d’euros !

Cela nous confirme bien que, loin d’être la martingale promise, la réforme de l’assurance maladie de 2004 a aggravé ses comptes. Certaines mesures – dossier médical personnel, médecin traitant, contribution forfaitaire à la charge de l’assuré – constitueront des exemples historiques de catastrophes en matière de politique publique.

En finissant aujourd’hui le travail de démontage de ces gadgets entamé l’année dernière, vous nous donnez enfin raison.

Le troisième échec est lié à la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite loi TEPA.

Le dispositif d’exonération de cotisations sur les heures supplémentaires issu de la loi TEPA, entré en vigueur au 1er octobre 2007, a plombé durablement les comptes de la sécurité sociale ! L’année dernière, ce sont plus de 2, 8 milliards d’euros de recettes, selon le dernier rapport de la Cour des comptes, non compensés par l’État, qui sont partis en fumée pour les comptes de l’assurance maladie.

Le montant des recettes fiscales perçues par le régime général pour compenser les exonérations de cotisations sociales s’est élevé à 24, 8 milliards d’euros en 2008, soit une augmentation de 15, 5 % par rapport à 2007, largement due aux exonérations de cotisations sur les heures supplémentaires, qui ont flambé, comme tout le monde le sait.

Madame la ministre, rien ne serait plus dangereux que de faire de la crise un prétexte pour différer les indispensables réformes de notre protection sociale et de son financement. On ne peut plus se contenter de demi-mesures. Il faut certes lutter contre la fraude, responsabiliser le corps médical, on peut aussi toujours améliorer le système existant, mais cela ne pourra suffire ni à résorber les milliards d’euros de dette accumulée ni à répondre à l’explosion des dépenses.

Il faudra des mesures de plus grande ampleur, tant pour les retraites que pour l’organisation et le fonctionnement du système de santé. Ces mesures seront douloureuses pour beaucoup et seront, à n’en pas douter, impopulaires auprès de nos concitoyens et particulièrement de votre clientèle électorale.

Mais elles sont nécessaires, si l’on veut sauvegarder au profit des générations futures le bénéfice que nous ont légué ceux qui nous ont précédés.

Comme vous le sentez à travers mon propos, nous voterons contre cet article.

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