Madame la ministre, avec cet article 3, le Gouvernement entend ratifier le décret qui aura pour effet de relever le plafond des avances de trésorerie au régime général de la sécurité sociale, c’est-à-dire à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS.
Cette méthode n’est pas nouvelle puisque c’est la cinquième fois que le plafond est relevé, ce qui témoigne d’une gestion pour le moins mauvaise. En raison des manques chroniques de ressources, cumulés au refus de transférer à la CADES la dette sociale, le Gouvernement est contraint de faire fonctionner la machine à tirer les bons de trésorerie.
En effet, nous le savons tous, et le Gouvernement ne peut pas feindre de l’ignorer, la Caisse des dépôts et consignations, qui fait d’habitude office de banquier de l’ACOSS, elle-même banquière de la sécurité sociale, n’est pas en mesure d’avancer à cette agence – de lui prêter, devrais-je dire, puisqu’il y a tout de même des intérêts – les quelque 30 milliards d’euros qui vont lui manquer.
Le risque est donc grand que, demain, l’État fasse appel aux marchés financiers pour financer notre système de protection sociale. Ce mécanisme est à la fois dangereux et scandaleux.
Il est scandaleux, d’abord, car votre refus de régler durablement la question des déficits et votre fuite en avant vers des lendemains que vous espérez meilleurs pourraient permettre à quelques spéculateurs de s’enrichir sur le dos de la protection sociale. Avouez tout de même que telle n’était pas la mission que les hommes et les femmes qui, au sortir de la guerre, ont imaginé la sécurité sociale avaient espéré lui confier.
Ce mécanisme est, ensuite, dangereux, puisqu’il soumet la sécurité sociale, qui est le bien de tous les salariés, en activité ou non, privés d’emplois ou en devenir, aux fluctuations des marchés internationaux et des évolutions de leurs intérêts.
Ce renvoi à la sphère financière nous paraît d’autant plus surprenant que vous justifiez vous-même le déficit constaté en 2009 et annoncé en 2010 par la crise financière.
Nous nous étonnons donc que, tel un pompier pyromane, vous entendiez confier aux acteurs de la spéculation financière, responsables du déficit de la sécurité sociale, l’avenir de celle-ci. Mais nous ne sommes pas les seuls à être inquiets puisque la Cour des comptes, elle-même, soulignait : « L’indexation du coût de financement de l’ACOSS sur l’EONIA – qui est le taux d’intérêt du marché interbancaire de la zone euro décidé par la Banque centrale européenne – rend la trésorerie de la sécurité sociale particulièrement exposée au risque des taux, qu’ils soient fixes ou variables ; rien ne dit que les taux favorables actuels perdureront. »
Pour toutes ces raisons, madame la ministre, mes chers collègues, devant le refus obstiné du Gouvernement d’accepter nos propositions de recettes nouvelles, les sénatrices et sénateurs communistes et du parti de gauche voteront contre cet article 3.