Intervention de Raymonde Le Texier

Réunion du 12 novembre 2009 à 10h00
Financement de la sécurité sociale pour 2010 — Article 3

Photo de Raymonde Le TexierRaymonde Le Texier :

Madame la ministre, avec l’article 3, il s’agit concrètement d’autoriser l’ACOSS à emprunter 65 milliards d’euros afin de financer les déficits accumulés que le Gouvernement ne veut pas transférer à la CADES.

Une telle disposition contredit évidemment la loi organique du 22 juillet 1996 relative aux lois de financement de la sécurité sociale, aux termes de laquelle les plafonds des avances accordées à l’ACOSS doivent permettre de faire face aux écarts de trésorerie de la sécurité sociale et non de financer cette dette.

En fait, la manœuvre est une illustration de ce que l’on appelle la politique de l’autruche : en évitant de transférer le financement de la dette à la CADES, dont c’est pourtant l’objet, le Gouvernement s’exonère de l’obligation qui lui est faite de relever la CRDS afin que le transfert de dette ne pèse pas sur les générations futures.

Pourtant, cette fuite en avant ne résout rien. À moins que, par miracle, le Gouvernement ne trouve le secret de la pierre philosophale qui change le déficit en recette, il faudra bien se résoudre à financer cette nouvelle dette et, donc, prévoir de nouvelles ressources, sauf à estimer que nos enfants et nos petits-enfants ne sont destinés à travailler que pour rembourser les dettes que ce gouvernement accumule tandis qu’il réduit avec une belle constance leur protection sociale.

Plutôt que d’user de tels subterfuges, nous vous rappelons qu’il y a mieux à faire que de sacrifier des générations entières sur l’autel de la mauvaise gestion : revoir les allégements généraux, taxer selon le droit commun toutes les rémunérations complémentaires – retraites « chapeau », parachutes dorés, golden hello –, revoir la taxation des stock-options, mettre fin aux niches fiscales, sortir du bouclier fiscal la participation à la solidarité nationale.

Au lieu de vous attelez à ce travail de fond, vous choisissez de faire de la cavalerie comptable pour mieux dispenser les plus privilégiés de leur devoir de solidarité. Face à la crise qui nous frappe, une telle attitude est indécente.

Sans compter que le choix de faire supporter à l’ACOSS de tels déficits pourrait s’avérer fort coûteux selon l’évolution des taux d’intérêt. Surtout, si le Gouvernement use de telles ficelles face à un déficit de 22 milliards d’euros, comment fera-t-il dans les années à venir quand celui-ci atteindra, et même dépassera, comme c’est prévu, 30 milliards d’euros ?

Enfin, ultime paradoxe, un tel choix amène l’ACOSS à émettre des bons de trésorerie sur le marché financier international, puisque la Caisse des dépôts et consignations, son traditionnel banquier, ne peut lui avancer de telles sommes. C’est inviter les marchés financiers à tirer des profits substantiels en finançant des déficits qu’ils ont, grâce à la crise, en partie contribué à créer.

Telles sont les raisons pour lesquelles, madame la ministre, nous ne vous soutiendrons absolument pas dans cette démarche.

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