Cet amendement, extrêmement important, traite de la dette sociale.
La situation est grave, le terme n’est pas exagéré. Les déficits de la sécurité sociale dérapent, comme dérape le déficit du budget de l’État.
M. Éric Woerth a lui-même reconnu que la gravité de la situation méritait que l’on prenne des mesures, sinon dans l’immédiat, du moins dans un futur proche, pour tenter d’y porter remède.
Le déficit annuel de la sécurité sociale, toutes branches confondues, était de l’ordre de dix milliards d’euros à la fin de l’exercice 2008. Il devrait s’élever, pour le seul régime général, à près de 24 milliards d’euros à la fin de l’exercice 2009.
En outre, le déficit que l’on pouvait qualifier de conjoncturel pour l’année 2009 va devenir structurel pour les exercices 2010 et suivants.
Ce déficit structurel conduira le Gouvernement et la majorité qui le soutient à rechercher les moyens de porter remède à cette situation dans le temps. Il faudra fort probablement intervenir sur la maîtrise des dépenses, et ce PLFSS y contribue pour une part, mais il faudra aussi inévitablement trouver des recettes nouvelles ou déplacer le curseur entre ce qui est du ressort du régime obligatoire, des régimes complémentaires et ce qui reste aujourd’hui à la charge des usagers à travers certaines franchises. Ce sera la seule façon de maintenir, au bénéfice de nos concitoyens, un système de protection sociale tel que celui qu’ils connaissent depuis 1945.
La problématique étant posée, il n’est pas aisé de trouver des solutions qui permettent d’apporter un remède immédiat.
J’ai donc présenté une proposition à la commission des affaires sociales, qui l’a approuvée. Pas à l’unanimité toutefois, parce que nos collègues de l’opposition, tout en partageant notre objectif, souhaitaient aller plus loin. Ils nous diront pourquoi en présentant leur sous-amendement.
En tout état de cause, il s’est dégagé une convergence de vues sur la nécessité de ne pas attendre pour agir : pourquoi reporter à demain ce que nous pouvons faire aujourd’hui ?
Certes, la crise est bien présente et elle a un impact non négligeable sur le pouvoir d’achat de nos concitoyens. Par ailleurs, le Président de la République et le Gouvernement ont martelé à plusieurs reprises qu’il était hors de question d’augmenter les prélèvements obligatoires.
La disposition que nous proposons se traduit effectivement par une augmentation des prélèvements puisqu’elle vise à majorer de 0, 15 %, en la portant de 0, 5 à 0, 65 %, la cotisation prélevée au titre de la contribution pour le remboursement de la dette sociale, la CRDS, ce qui permettrait de transférer à la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la CADES, l’équivalent de 19, 5 milliards d’euros.
Le Gouvernement considère que cette contribution, même si son montant ne correspond pas à la totalité du déficit de l’année, est trop importante en période de crise. Il souhaite donc le report d’une telle décision à l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011. M. le ministre le confirmera ou l’infirmera dans un instant.
Nous considérons pour notre part que, même en période de crise, il faut agir. Lorsqu’un de nos concitoyens est confronté à une situation comparable, s’il est à découvert, il est bien obligé, pour équilibrer son budget familial, de décider des économies, de renoncer à certaines dépenses.
La France est dans cette situation. La sécurité sociale est dans cette situation. Doit-on pour autant, parce que l’on est en période de crise, renoncer à faire un petit effort pour commencer à combler un déficit et, surtout, pour amortir une dette qui, si nous ne faisons rien, va s’amplifier jusqu’à atteindre pas moins de 150 milliards d’euros d’ici à 2013 ?
Plus on attendra, plus important sera l’effort que nous devrons demander à nos concitoyens. L’augmentation de la CRDS sera non plus de 0, 5 %, mais peut-être de 1 % voire de 1, 5 % selon la date à laquelle nous prendrons une décision.
J’entends bien les arguments qui nous sont opposés. Pourquoi avoir choisi la CRDS ? Ne serait-il pas judicieux de rechercher une autre recette qui pourrait être transférée à la CADES sans augmenter les prélèvements ?
Si nous choisissons une autre recette, il faudra procéder à un redéploiement de recettes d’un budget vers l’autre. En effet, si nous n’augmentons pas les prélèvements sur la CRDS, je ne vois pas quelle autre recette affectée au financement de la sécurité sociale nous pourrions augmenter. Et si nous sollicitons un autre budget, dans la mesure où le Gouvernement se refuse à augmenter les prélèvements obligatoires, il faudra bien toiletter l’ensemble des dépenses du budget de l’État pour éviter tout impact sur le pouvoir d’achat de nos concitoyens.
On peut certes espérer que la croissance sera au rendez-vous. Cette croissance pourrait, selon le Gouvernement, produire à partir de 2012 une croissance de la masse salariale de cinq points, voire se faire sentir dès 2011.