Or, si le déficit allemand est effectivement un peu inférieur au déficit français, de 3 points à la fin de l’année 2010, la dette allemande est comparable à la dette française, voire légèrement supérieure. Il faut savoir que, aujourd’hui, le gouvernement allemand emprunte, chaque jour, plus que le gouvernement français et, malgré cela, il a décidé de continuer à diminuer les impôts. Et nous, nous donnerions le signal tout à fait inverse à l’ensemble de notre opinion publique et au monde entier ? Nous augmenterions les impôts, au risque de retarder la sortie de crise, donc de retarder également les solutions aux problèmes de la dette de la sécurité sociale ? Plus nous tardons, plus les choses se compliquent, car c’est bien la crise qui nous a placés dans la situation actuelle et a conduit à une dette de la sécurité sociale de 23 milliards ou de 30 milliards d’euros l’année prochaine. Mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite vivement que vous considériez les choses sous cet angle-là !
Je comprends très bien votre initiative, monsieur Vasselle, monsieur Jégou, et vous connaissez suffisamment ces sujets pour que je ne doute pas du sérieux des solutions que vous tentez d’apporter. Je ne veux pas avoir l’air de dire que ce n’est pas ainsi qu’il faut procéder, mais je pense qu’aujourd’hui, dans les circonstances où nous sommes, augmenter la CRDS serait vraiment une erreur. De plus, cela ne réglerait qu’une partie du problème puisque cela ne permettrait de résorber qu’un tiers de la dette. Que faisons-nous des deux autres tiers ?
Je pense qu’il faut plutôt chercher une solution globale qui ne repose pas toujours et encore sur les revenus du travail. Or la CRDS provient pour 65 % des revenus du travail ! C’est difficile, je le reconnais, mais nous devons nous orienter vers d’autres types de solutions.
Par ailleurs, 2010 comme 2011 seront des années d’incertitude totale. Augmenter la CRDS, même de 0, 15 point, comme vous le proposez, dans un monde totalement incertain, ce serait ajouter encore à l’incertitude. Qui peut prédire ce que seront les recettes tant de l’État que de la sécurité sociale ? Nous les approchons, bien sûr, parce qu’il faut bien préparer les budgets, mais nous ne connaissons pas l’ampleur de la reprise que nous pouvons espérer ni, surtout, les élasticités que nous constaterons. Or elles ont été terriblement négatives au moment de la récession : quand nous perdions 2 points, les recettes fiscales baissaient de beaucoup plus ! Est-ce que ce sera le contraire ? Verrons-nous se créer un cercle vertueux ? Peut-être ! Nous pouvons l’espérer, mais, parce que nous sommes prudents, nous ne l’avons pas inscrit dans le projet de budget pour 2010. Nous verrons, surtout en 2011, comment se fera la sortie de crise sur le plan mondial, sur le plan européen, sur le plan français. Faudra-t-il procéder à des réajustements ?
La seule question que nous devons nous poser, je l’ai souligné avant-hier, à la tribune, est de savoir si la décision que nous nous apprêtons à prendre est bonne ou non pour la sortie de crise. Facilite-t-elle la sortie de crise ou la complique-t-elle ? La solution, c’est la sortie de crise. La solution, pour les recettes de l’État et pour la sécurité sociale, c’est le retour de la croissance et la baisse du chômage. Il n’y a pas d’autre solution ! Sans cela, notre modèle social ne fonctionne pas.
J’irai plus loin, monsieur le rapporteur général de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur pour avis. J’ai bien entendu ce que vous dites, et je vous fais une proposition qui, me semble-t-il, pourrait vous convenir – en tout cas je l’espère.