Nous sommes effectivement en pleine dérive, car le Gouvernement non seulement s’installe dans les déficits, mais les programme !
Il est difficile, c’est vrai, de faire la part entre le conjoncturel et le structurel. Quoi qu’il en soit, le Gouvernement prévoit un déficit de 30 milliards d’euros à l’horizon 2013, avec une augmentation de la masse salariale de 5 %. Il ne s’agira pas, à proprement parler, d’un déficit lié à la crise, car on peut considérer, avec une augmentation de la masse salariale de 5 %, que la reprise aura eu lieu. Comme le faisait remarquer tout à l’heure M. Jean-Jacques Jégou, on n’a pratiquement jamais connu un taux de 5 % ! En l’occurrence, le Gouvernement ne fait pas preuve d’un pessimisme exagéré, c’est le moins que l’on puisse dire.
En fait, il y a là une volonté politique de ne pas régler ces déficits à seule fin de pouvoir remettre en cause, demain, les fondements de notre système de protection sociale. Et c’est cela qui est particulièrement grave. On en constate d’ailleurs les effets immédiats.
Comme l’a indiqué tout à l’heure le rapporteur général, M. Alain Vasselle, il s’agit bien pour le Gouvernement de transférer la plus grande partie possible de la dépense de l’assurance obligatoire vers l’assurance complémentaire. Et ce ne sont pas que des mots ! Nous savons que le fameux secteur optionnel est l’illustration de cette politique.
En clair, le secteur optionnel signifie que l’on augmente de 25 % à 50 %, voire 60 %, le ticket modérateur pour toutes les consultations des médecins qui pratiquent des dépassements d’honoraires. Le ticket modérateur, profondément augmenté, va être pris en charge par les assurances complémentaires.
Or nous savons très bien que trois quarts des contrats conclus par les patients avec les assurances complémentaires ne couvrent pas aujourd’hui les dépassements d’honoraires. La couverture de ces derniers supposerait une augmentation des cotisations pour chaque contrat de 8 % à 10 %, une augmentation à laquelle la plupart de nos concitoyens ne seront pas en mesure de faire face !
Par conséquent, on change la nature de notre système de protection sociale. Certes, ce n’est pas encore perceptible, car le contrat optionnel n’est pas passé dans les faits et nul ne sait aujourd’hui quand et comment cela se fera. Mais le résultat est clair : on veut faire prendre en charge par les assurances privées ce qui devrait l’être par l’assurance obligatoire. Et c’est ce changement de nature de notre système de protection sociale qui nous inquiète beaucoup.
Le rapporteur pour avis, M. Jean-Jacques Jégou, disait tout à l’heure qu’il n’était pas question de transférer la dette sur les générations futures. Mais en demandant l’augmentation de la CRDS, vous transférez bien la dette sur les générations futures et la commission que l’on nous promet ne fera pas autre chose !
Autant dire que nous ne pouvons accepter de n’assurer qu’une solidarité apparente provisoire entre nous au détriment d’une solidarité avec les générations futures. C’est la raison pour laquelle nous voterons contre l’amendement n° 47 de M. Jégou.