Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, je m'associe bien évidemment aux propos remarquables du rapporteur spécial de la commission des finances et des rapporteurs pour avis de la commission des lois.
J'aurais souhaité que la mission « Justice » comportât toutes les justices, c'est-à-dire à la fois la justice administrative et la justice judiciaire. Peut-être vous l'ai-je déjà dit, mais il faut toujours répéter ses arguments pour être entendu.
Si on analyse la mission « Justice », on peut s'interroger sur le rattachement de certains organismes, notamment le Conseil supérieur de la magistrature, qui assiste le Président de la République. Pourquoi serait-il traité différemment de certaines hautes juridictions de conseil du Gouvernement ? Le fait d'être ordonnateur ne dispense pas d'être sous l'autorité du ministre de la justice.
Monsieur le garde des sceaux, je voudrais maintenant évoquer deux questions.
Tout d'abord, vous avez prévu, dans le projet de budget, le développement des bureaux d'exécution des peines grâce à une augmentation de 0, 5 million d'euros. Il sera possible de mettre en place une expérimentation, et non une généralisation dans toutes les juridictions, comme l'espérait l'un de nos collègues.
Cette question suscite une réelle préoccupation. Si nous ne disposons pas de statistiques globales en matière d'exécution des peines - c'est bien dommage -, nous avons néanmoins un certain nombre d'indications. D'après un document qui a été publié par votre ministère, monsieur le garde des sceaux, 54 % des peines ne sont pas exécutées au bout de dix-huit mois.
Il est choquant de constater que 33 % des peines ne sont pas exécutées simplement parce que la personne était absente à l'audience et que sa peine n'a pu lui être notifiée. Nous devrions être plus vigilants. Celui qui ne vient pas à l'audience n'exécute pas sa peine, et celui est présent exécutera sa peine : il y a là une justice paradoxale !
Monsieur le garde des sceaux, le taux d'exécution des peines pourrait constituer, comme la durée de prononcé des jugements, un très bon indicateur de performance des juridictions et de tous les services qui contribuent à faire exécuter les peines. Nos concitoyens comprennent difficilement que des peines fermes ne soient pas exécutées au bout d'un temps très long.
Ma deuxième préoccupation, monsieur le garde des sceaux, est la situation des majeurs protégés. Si ce sujet n'a pas encore été évoqué, c'est peut-être parce que les greffiers ne sont pas en nombre suffisant. Mais la Chancellerie a des projets en la matière.
Actuellement, les tutelles ne fonctionnent pas. Or, nous savons bien que, compte tenu du vieillissement de la population, de plus en plus de majeurs protégés devront faire l'objet de mesures judiciaires de protection. Il est donc urgent de réformer le droit des tutelles, qui n'est pas adapté.
Dans l'immédiat, il faut veiller à ce que les juges des tutelles et les greffiers soient en nombre suffisant. Rappelez-vous, il avait été prévu, dans une loi précédente, d'alléger la charge de travail des magistrats en confiant aux greffiers la vérification des comptes de tutelle. Nous en sommes loin, monsieur le garde des sceaux, et il ne faudrait pas que quelque scandale ternisse l'image de la justice !
Le problème des majeurs protégés doit être réglé d'urgence et la justice doit prendre des mesures de protection efficaces.
Un effort important a été engagé par la loi d'orientation et de programmation pour la justice en matière pénitentiaire et en ce qui concerne la protection judiciaire de la jeunesse. Cela étant, nous souhaiterions que le taux d'exécution des peines soit de 100 %.
Sous le bénéfice de ces observations, monsieur le garde des sceaux, j'invite nos collègues à voter les crédits de la mission « Justice » pour lui permettre de fonctionner dans de bonnes conditions.