Le budget pour 2006, comme les précédents, s'efforce de maintenir l'équilibre entre les deux grands pôles de l'action culturelle, les programmes « Patrimoines » et « Création », qui sont dotés respectivement de 976, 2 millions d'euros et de 949, 5 millions d'euros.
Cette année, toutefois, la balance penche davantage du côté du programme « Patrimoines ». En effet, l'application du schéma de déversement analytique de la mission, c'est-à-dire de la répartition des « crédits de la fonction de soutien » - pour employer le langage « lolfien » ! -, notamment des crédits relatifs aux personnels des services déconcentrés, fera passer le programme à 49 % de la mission, avec 1 260, 8 millions d'euros. Il bénéficiera en outre d'une dotation exceptionnelle de 100 millions d'euros, qui, à travers l'Établissement public de maître d'ouvrage culturel, l'ÉMOC, proviennent des sociétés d'autoroutes privatisées en 2005.
Ce n'était pas de trop, car nous sentons - vous comme nous, monsieur le ministre - gronder l'orage sur les crédits de ce programme. Ainsi, en 2004, est apparue une crise des impayés, avec 70 millions d'euros à 90 millions d'euros de factures, avant redéploiement et ouverture de crédits supplémentaires dans la loi de finances rectificative. En 2005, 35, 5 millions d'euros ont été financés par redéploiement et grâce à un report de charges de 3 millions d'euros en 2006, et ce au prix de l'interruption de 80 chantiers tandis que 170 ont été différés en région en 2005.
Le groupement français des entreprises de restauration des monuments historiques, le GMH, parle, à qui veut l'entendre, de 100 millions d'euros par an de besoins non satisfaits. Il est vrai qu'il additionne des données parfois disparates : factures reportées sur l'exécution budgétaire suivante, chantiers arrêtés, voire promesses - faites par qui, on ne sait pas trop... - non tenues.
Ce qui est troublant, c'est la quasi-disparition des statistiques relatives aux monuments historiques en péril, ainsi que celle de l'objectif « Protéger et restaurer prioritairement les patrimoines les plus menacés », avec l'indicateur qui lui était associé. En principe, cet objectif aurait dû orienter les efforts sur les bâtiments dont la disparition était jugée probable dans les trois ans, faute d'intervention. Notre dessein n'est-il pas pourtant de préserver, autant que faire se peut, ces ruineuses richesses ?
Ces considérations patrimoniales achevées, j'évoquerai plus rapidement les spectacles vivants et le dossier des intermittents du spectacle, sujets que nos collègues rapporteurs pour avis ne manqueront pas de développer.
Qu'il me soit permis, monsieur le ministre, d'admirer votre détermination dans cette affaire et de souhaiter une issue heureuse à votre tâche pacificatrice, même si l'immeuble des Bons Enfants a été occupé voilà quelques jours, alors que se réunissait la commission du patrimoine mondial de l'UNESCO. C'est ainsi que nous avons dû abandonner la salle André-Malraux au profit du sous-sol Vivant-Denon pour faire place au syndicat CGT du spectacle. Mais ce n'est là qu'un petit malheur...