Intervention de Serge Lagauche

Réunion du 5 décembre 2005 à 15h00
Loi de finances pour 2006 — Compte d'affectation spéciale : cinéma audiovisuel et expression radiophonique locale

Photo de Serge LagaucheSerge Lagauche, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles :

Monsieur le ministre, monsieur le président, mes chers collègues, j'interviendrai successivement sur le programme « Création » de la mission « Culture », puis sur le programme « Industries cinématographiques » du compte d'affectation spéciale « Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale ».

S'agissant tout d'abord de la mission « Culture », 939, 3 millions d'euros en autorisations d'engagement et 949, 5 millions d'euros en crédits de paiement sont inscrits au titre du programme « Création » pour 2006.

Le spectacle vivant constitue l'essentiel de ce programme avec plus de 600 millions d'euros, auxquels il convient d'ajouter les sommes relevant de l'enseignement artistique qui figurent dans le programme n° 3.

Une part importante de ces crédits est consacrée aux établissements publics nationaux et à l'entretien de leur patrimoine, tels que l'Opéra de Paris, la Comédie-française ou le théâtre de l'Odéon.

Environ la moitié du budget consacré au spectacle vivant est affectée aux dépenses d'intervention, qui sont, pour l'essentiel, destinées aux établissements de création, de production ou de diffusion situés sur l'ensemble du territoire, mais aussi aux équipes artistiques : 2, 5 millions d'euros de mesures nouvelles seront attribuées aux équipes artistiques indépendantes.

L'action n° 2 - arts plastiques - bénéficiera de plus de 103 millions d'euros, l'action n° 3 - livre et lecture - de près de 194 millions d'euros, et l'action n° 4 - industries culturelles - de plus de 42 millions d'euros.

L'un des avantages de la LOLF tient au fait que le ministère et les opérateurs devront développer des outils de connaissance et de suivi qui, jusqu'ici, faisaient souvent cruellement défaut.

J'aimerais cependant évoquer les difficultés méthodologiques auxquelles est confronté le ministère de la culture pour construire ou renseigner certains indicateurs de performance afin de se conformer à la LOLF.

Ces difficultés tiennent au fait qu'il est parfois difficile de mesurer les résultats des interventions culturelles, d'autant que l'État intervient surtout de façon indirecte, en soutenant des projets mis en oeuvre par des structures subventionnées ou par des collectivités territoriales. En outre, le ministère ne dispose pas d'historiques chiffrés, ce qui rend d'autant plus difficile la fixation d'objectifs.

Cela contribue-t-il, monsieur le ministre, à expliquer la relative modestie des objectifs retenus pour les indicateurs à l'horizon 2010 ?

Nous nous réjouissons, monsieur le ministre, des plans d'action que le Premier ministre ou vous-même avez annoncés - et pour certains déjà engagés - en faveur du théâtre, de la musique et de la création contemporaine.

S'agissant plus particulièrement de la politique en faveur du théâtre, la commission des affaires culturelles soutient vos propositions, qui paraissent cohérentes et concernent l'ensemble des acteurs du secteur.

Je relève néanmoins qu'un certain nombre d'élus constatent un désengagement de l'Etat en matière d'éducation artistique.

Certaines mesures vont dans le sens d'une meilleure diffusion des oeuvres et d'un rapprochement entre le public et la création, objectif que nous appelons de nos voeux.

S'agissant de la création contemporaine, j'aimerais, monsieur le ministre, que vous précisiez les proportions respectives des oeuvres dites de répertoire et des oeuvres contemporaines d'expression française dans la programmation des théâtres publics.

Pouvez-vous, par ailleurs, présenter les principaux axes du projet de loi en cours d'élaboration sur le théâtre amateur ?

Il est également nécessaire de conforter l'emploi artistique et de pérenniser le régime de l'intermittence.

Je relève qu'un certain nombre de mesures ont été prises pour soutenir l'emploi dans le spectacle vivant cette année.

Le rapport de M. Alain Auclaire avance des propositions concrètes afin que les financements publics s'inscrivent clairement dans une politique de soutien à l'emploi culturel. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous préciser les suites qui ont été données à ces propositions ?

Vous avez, monsieur le ministre, poursuivi les négociations et la concertation en 2005. Vous avez, avec le ministre délégué à l'emploi, Gérard Larcher, et en concertation avec les organisations professionnelles, progressé dans un certain nombre de domaines.

La commission des affaires culturelles a apporté sa contribution, notamment grâce à la participation de son président aux travaux du Conseil national des professions du spectacle, le CNPS. Il est important, en effet, que les commissions parlementaires compétentes montrent toute l'importance qu'elles attachent à l'aboutissement de ces dossiers.

Nous attendons aujourd'hui la conclusion de la nouvelle convention d'assurance-chômage qui doit prendre effet à compter du 1er janvier 2006. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous en dire plus sur ce que sera la situation des intermittents après cette date ?

En conclusion, je vous indique que la commission des affaires culturelles a donné un avis favorable à l'adoption du programme « Création » de la mission « Culture ».

Permettez-moi maintenant de vous présenter les crédits du programme « Industries cinématographiques » du compte d'affectation spéciale « Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale ».

Les crédits consacrés au cinéma s'élèvent à 273, 76 millions d'euros, afin de permettre au Centre national de la cinématographie, le CNC, d'assumer ses missions de soutien en faveur du secteur. Ils sont complétés par des crédits provenant directement du ministère de la culture et de la communication, pour un montant de 41, 9 millions d'euros.

À cet égard, deux éléments devraient prochainement susciter une réflexion sur les dispositifs de soutien aux industries cinématographiques.

En premier lieu, la Commission européenne procède actuellement à l'examen de notre dispositif de soutien et des modalités d'octroi du crédit d'impôt cinéma, et nous devrons prendre en compte ses conclusions, qui seront rendues publiques au début de 2006.

En second lieu, il apparaît souhaitable d'améliorer la régulation prévisionnelle des instruments financiers du CNC. En effet, après avoir amélioré le soutien aux producteurs l'an dernier, le Centre a dû, à l'inverse, procéder à une régulation en leur défaveur cet été. Il conviendrait de lisser les évolutions et j'aimerais, monsieur le ministre, que vous nous précisiez l'état de vos réflexions sur ce point.

Le cinéma bénéficie de mesures fiscales très incitatives. Le crédit d'impôt cinéma, créé à compter de janvier 2004 et amélioré en 2005, a eu un effet très positif tant sur le financement des films que sur la relocalisation des tournages, et nous nous en réjouissons.

En revanche, nous nous inquiétons pour l'avenir des sociétés de financement de l'industrie cinématographique et de l'audiovisuel, les SOFICA, qui pourraient être menacées par le plafonnement des « niches » fiscales prévues par le projet de loi de finances pour 2006.

Cet outil contribue de façon non négligeable au financement de la production cinématographique, en dépit du risque inhérent à ce type d'investissement. Si l'on veut que celui-ci demeure attractif, il faut en maintenir la rentabilité fiscale. C'est pourquoi la commission des affaires culturelles vous proposera d'adopter un amendement prévoyant une revalorisation du taux de la réduction fiscale, qui passerait de 40 % à 60 %.

Par ailleurs, je me réjouis de la montée en puissance des fonds régionaux. Le renforcement du programme européen MÉDIA 2007 pour la période 2007-2013 est également positif.

S'agissant maintenant du paysage cinématographique, je dirai qu'il se dessine en « ombres et lumières ».

On constate une diminution du nombre d'entrées en salles de 13, 4 % sur les neuf premiers mois de l'année 2005. Ce chiffre ne semble toutefois pas annonciateur d'une crise structurelle ; il est plutôt le résultat à la fois d'un accroissement des films sur le marché, d'un calendrier de programmation trop concentré et de l'absence de films à très fort succès.

Les professionnels devraient, avec le CNC, tenter de mieux « lisser » les sorties de films. Par ailleurs, le CNC devrait proposer un mécanisme d'encadrement afin d'éviter que la multiplication des projections non commerciales n'entraîne une éventuelle concurrence déloyale pour les salles.

S'agissant du court-métrage, et alors que vous aviez, monsieur le ministre, jugé nécessaire le lancement d'un plan d'urgence, je m'inquiète qu'aucune décision n'ait été pour l'instant annoncée. Pouvez-vous, par conséquent, préciser vos engagements concernant la recherche d'un financement pérenne pour les films de court-métrage ?

Il conviendrait par exemple, compte tenu de leurs actions de mécénat dans ce domaine, de soutenir le projet des industries techniques du cinéma de créer une fondation du court-métrage pouvant bénéficier de dispositions fiscales favorables.

Une autre idée consisterait à permettre aux collectivités territoriales d'exonérer totalement ou partiellement de taxe professionnelle les industries techniques, et je suis heureux que notre Haute Assemblée ait retenu une telle idée lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances.

Par ailleurs, il nous faut prendre conscience de la véritable « révolution » numérique qu'est en train de vivre le secteur du cinéma et qui modifie son modèle économique.

Le numérique présente de nombreux avantages. Toutefois, le financement de l'équipement des salles est onéreux : un projecteur numérique coûte environ 100 000 euros, contre 20 000 euros pour les projecteurs actuels. Il serait donc souhaitable que l'immense économie qui pourra être réalisée par les distributeurs sur les copies de films contribue au financement de l'équipement des salles. J'estime d'ailleurs important que cet équipement concerne tous les types de salles, y compris les salles d'art et d'essai. Qu'en pensez-vous, monsieur le ministre ?

Enfin, je relève avec satisfaction que deux accords sont en vue sur deux sujets d'actualité.

L'un concerne le positionnement de la vidéo à la demande dans ce que l'on appelle la « chronologie des médias ».

L'autre concerne la lutte contre la copie illicite de films. Nous allons ainsi vers une « approche graduée » comportant trois stades successifs : des messages électroniques d'avertissement, suivies d'une lettre recommandée et, enfin, d'une sanction pécuniaire. Cet accord se heurte cependant à des difficultés juridiques liées à une récente décision de la Commission nationale de l'informatique et des libertés. Il nous faudra sans doute adapter le cadre législatif en conséquence, à l'occasion de l'examen du projet de loi sur le droit d'auteur.

En conclusion, je vous indique que la commission des affaires culturelles a donné un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 711, consacré aux industries cinématographiques, du compte d'affectation spéciale « Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale », sous réserve de l'adoption d'un amendement qu'elle vous présentera tout à l'heure et qui concerne les SOFICA.

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