Intervention de Louis Duvernois

Réunion du 5 décembre 2005 à 15h00
Loi de finances pour 2006 — Compte de concours financiers : avances a l'audiovisuel public

Photo de Louis DuvernoisLouis Duvernois :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances, appelée LOLF, animée par la volonté de prolonger le consensus politique qui a permis la réforme de 2001, répond dans sa première application, en 2006, à de fortes attentes vis-à-vis d'une action gouvernementale perçue désormais comme moteur de la modernisation de la gestion publique.

Force est néanmoins de constater que le budget de l'audiovisuel extérieur pour 2006 se caractérise par une contradiction majeure, eu égard à cette nouvelle orientation, dont on pouvait penser qu'elle permettrait de rationaliser la présentation des crédits destinés au financement de notre rayonnement international.

Les crédits de l'audiovisuel extérieur sont éclatés au sein de trois missions différentes placées sous trois tutelles administratives distinctes. Ne revenons pas, en outre, sur l'erreur consistant à rattacher à la mission « Médias », qui relève du Premier ministre, la future Chaîne d'information internationale, créée à l'usure, au forceps et à la suite d'atermoiements multiples. Le rattachement administratif du nouvel opérateur jette un doute sur la nécessaire indépendance de la future chaîne.

On peut ainsi se demander comment pourra être définie une stratégie d'ensemble pour l'audiovisuel public extérieur lorsque chacune des tutelles tentera de faire prévaloir ses intérêts. Cela ne pourra se faire, finalement, qu'au détriment d'un vecteur d'influence et d'importance pour notre pays, déjà devancé et concurrencé par d'autres puissances au niveau international.

La France, à l'heure de la mondialisation des réseaux de communication et des nouvelles technologies, doit consacrer des moyens, en conformité avec l'esprit de la LOLF qui tend à redonner un sens à l'action publique, en synergie avec tous les acteurs et dans la perspective de résultats tangibles.

Nous ne sommes pas, hélas ! dans cette ligne de pensée. Plus largement, nous constatons pour la seconde année consécutive, un décrochage significatif entre l'évolution des ressources publiques accordées à l'audiovisuel extérieur et celles qui sont attribuées à l'audiovisuel national.

N'ayant pas eu l'opportunité d'intervenir lors de la discussion du budget de l'action extérieure, en raison du trop grand nombre d'orateurs inscrits, je voudrais évoquer, à travers le budget des médias et, plus spécialement, de la CII, les problèmes que rencontrent TV5 et RFI, leurs positionnements étant, à mon sens, indissociables.

En effet, alors que les dotations de TV5 et de RFI diminuent de 0, 4 %, celles de l'audiovisuel national progressent de 2, 9 %. Il est donc à craindre que l'existence d'un tel décalage entraîne des conséquences sur l'efficacité de notre dispositif audiovisuel extérieur. Les coûts du secteur étant tirés à la hausse, cette évolution négative ne pourra être éternellement compensée par des gains de productivité et des redéploiements.

TV5, la seule télévision internationale d'expression française opérationnelle, devrait en faire l'expérience dès 2006. Le nouveau plan stratégique de TV5 pour la période 2006-2009, adopté avec le soutien de la France, le 19 septembre 2005 à Bruxelles, et destiné à consolider la distribution, la diffusion et la programmation de la chaîne, ne pourra bénéficier des 14 millions d'euros nécessaires à sa mise en oeuvre.

Le développement du sous-titrage, insuffisant en termes de nombre de langues étrangères - neuf actuellement - et de volume - 12 % de la programmation en moyenne - est en outre une condition impérative de la croissance, voire du maintien du réseau de distribution construit depuis vingt ans, faut-il le rappeler, par TV5. Cette action représentera un coût de 1, 9 million d'euros en 2006, que TV5 ne peut autofinancer.

Tout comme elle est impuissante, en sa qualité de seule chaîne mondiale d'expression française, attachée à son profil de service public, à développer une gamme coordonnée d'outils de formation au français, disponible sur son site « tv5.org », d'un coût total de 300 000 €, distancée là aussi par la BBC e-learning.

Par ailleurs, la CII, lancée à la fin de l'année 2005 pour une mise en ondes fin 2006, dotée d'un budget initial de 65 millions d'euros, se constituera en marge de TV5 qui a construit en plusieurs années le deuxième réseau mondial de distribution télévisuelle devant CNN International et BBC World, sans que notre pays, une fois de plus, mesure pleinement la situation d'influence qu'il détient déjà.

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