Intervention de Renaud Donnedieu de Vabres

Réunion du 5 décembre 2005 à 15h00
Loi de finances pour 2006 — Compte de concours financiers : avances a l'audiovisuel public

Renaud Donnedieu de Vabres, ministre :

... la communication est d'abord une mise en commun des échanges, des idées, des oeuvres, des cultures entre les hommes.

Je vais donc évoquer les différentes formes de communication, en commençant par l'audiovisuel public.

L'audiovisuel public, tout en renforçant son identité, doit s'adapter aux mutations provoquées par les nouveaux supports, notamment numériques.

Le démarrage de la télévision numérique terrestre a été conduit avec succès. Moi qui suis proche de tous les dysfonctionnements, je pense que l'on peut toujours améliorer les choses. Mais quand des rendez-vous sont tenus, il faut arrêter la spirale de la désespérance permanente ! Voilà quelques années, voire quelques mois, personne ne pensait que le rendez-vous de la télévision numérique terrestre serait tenu. Pourtant, c'est fait : elle est entrée en vigueur et c'est très important.

En effet, ne l'oublions pas, il y a environ un an, 70 % de nos concitoyens ne recevaient que six chaînes. A peine six mois après son lancement, la TNT permet désormais à un Français sur deux de recevoir dix-huit chaînes gratuites ; la dernière a été lancée lundi dernier.

Les ventes des adaptateurs numériques se poursuivent à un rythme rapide. Plus d'un million d'adaptateurs ont déjà été vendus ou loués. Cela signifie que la TNT est reçue dans un million de foyers. C'est un progrès formidable, auquel le service public participe pleinement. À l'époque, nous avions d'ailleurs donné des moyens complémentaires à l'audiovisuel public pour faire face à cette nouvelle responsabilité.

Je souhaite que les étapes suivantes du déploiement de la TNT soient menées au plus tôt et que la télévision haute définition et la télévision mobile bénéficient d'un cadre qui permette leur développement. J'y travaille activement et c'est la raison pour laquelle j'assume - j'y reviendrai tout à l'heure - le fait qu'on ne puisse pas d'emblée dire que la chaîne d'information internationale sera diffusée par la TNT, car nous avons le problème de la haute définition, celui des portables et celui des télévisions locales. Il faut donc être en mesure de faire des choix.

L'arrivée des chaînes payantes donnera une assise supplémentaire à la TNT et contribuera à son succès. L'enjeu est considérable et ne vous a pas échappé : la richesse et la diversité des programmes des chaînes de la TNT modifient en profondeur l'offre et la manière de regarder la télévision pour un très large public.

C'est pourquoi la priorité est maintenant de généraliser l'accès à la télévision numérique gratuite pour tous. Le Gouvernement vient de créer le fonds d'accompagnement du numérique, qui sera doté, dès l'année 2006, de 15 millions d'euros, afin d'équiper les consommateurs en adaptateurs dans les zones où l'extinction de la diffusion analogique sera nécessaire pour lancer la TNT.

Je reviendrai sur la question qui m'a été posée concernant la date de passage à la télévision numérique lorsque j'aborderai les questions de la télévision haute définition et de la télévision sur les mobiles. Mais rappelez-vous le débat que nous avons eu : l'objectif n'est pas tant de calculer le nombre d'années pour y parvenir ; il est surtout de faire en sorte que chaque citoyen français, quel que soit l'endroit où il se situe, puisse recevoir la TNT. Cela est très important !

Parallèlement, la mise à disposition des chaînes en clair de la TNT doit être recherchée à travers l'ensemble des moyens de diffusion : satellite, câble et ADSL. Il serait notamment de l'intérêt des téléspectateurs raccordés à une antenne collective de disposer d'offres leur permettant d'avoir accès à ces chaînes pour un coût total proche de celui de l'acquisition d'un adaptateur TNT. Je pense en particulier aux habitats collectifs, pour lesquels les câblo-opérateurs assurent la distribution des chaînes. Il leur revient aujourd'hui d'apporter à tous ces foyers ces programmes auxquels chacun doit avoir accès dans de bonnes conditions.

Chantier prioritaire de l'audiovisuel public, les contrats d'objectifs et de moyens ont, dans le domaine des médias, mis en oeuvre la LOLF avant la LOLF. Le bilan des contrats souscrits est largement positif. Le secteur des médias a été précurseur, que ce soit pour l'AFP, France Télévisions ou Arte France et, bien sûr, l'Institut national de l'audiovisuel, et je m'en félicite.

En 2006, la réforme de la redevance audiovisuelle entrera pleinement et définitivement en vigueur. J'ai entendu les réserves qui ont été exprimées, notamment par votre rapporteur pour avis, à cet égard. Mais constatez avec moi que la nouvelle organisation du recouvrement permet une collecte plus performante d'une taxe plus juste et plus simple.

Je le dis avec beaucoup de calme et d'assurance : il doit être clair dans l'esprit de chacun que l'on ne peut pas être imposé deux fois pour la même chose. C'est un principe fondamental de fiscalité.

Cela dit, il est possible, à titre exceptionnel, en raison de la mise en oeuvre du nouveau mode de recouvrement, que certains redevables aient payé la redevance pour 2004 en janvier 2005 et celle pour 2005 en fin d'année 2005, en même temps que la taxe d'habitation. Certains dysfonctionnements sont effectivement constatés. De même, un certain nombre de contribuables remarquent qu'ils sont assujettis plusieurs fois au paiement de la redevance audiovisuelle. Des ajustements doivent donc être effectués, mais le principe est clair : on ne paie la redevance qu'une fois par an !

Une telle réforme est, bien évidemment, très importante. Je me soucie, comme vous tous, du sort des éventuels excédents, au-delà des 20 millions d'euros déjà budgétés pour les chaînes. Si ces ressources supplémentaires existent, elles doivent nécessairement être affectées aux secteurs qui ne sauraient être financés de manière forfaitaire.

Au moment de la négociation des contrats d'objectif et de moyens avec l'audiovisuel public, de tels excédents représenteraient, bien évidemment, un signal à la fois très négatif et très dommageable. Des discussions sont en cours sur ce sujet, afin de trouver la solution appropriée. Je ne doute pas que nous y parvenions.

Le budget du service public de l'audiovisuel qui vous est soumis augmentera de 109 millions d'euros en 2006, ce qui représente une hausse de 3, 1 %.

Les contrats seront en totale cohérence avec la logique de la LOLF, que nous avons tous à coeur de mettre en oeuvre, dans un souci partagé de transparence et d'efficacité.

Je tiens à ce que le budget que je vous demande d'adopter permette de renforcer la qualité et la diversité des programmes et de financer l'indispensable modernisation des sociétés de l'audiovisuel public.

L'adaptation des programmes aux personnes sourdes et malentendantes constitue également un objectif prioritaire du Gouvernement. France Télévisions et Arte France ont engagé un plan progressif de sous-titrage, qui concernera 50 % des programmes dès 2006.

J'ai souvent eu l'occasion de souligner l'identité et le rôle particuliers des antennes du service public de l'audiovisuel. Ils devront être approfondis et mieux déclinés.

À cet égard, le Président de la République a annoncé, le 22 novembre dernier, un ensemble de mesures destinées à améliorer la représentation à l'antenne de la diversité des origines et des cultures de la société française. Je veillerai donc à ce que les programmes du service public contribuent de manière exemplaire à promouvoir les valeurs d'intégration et de solidarité qui sont celles de la République.

Monsieur Renar, voilà de nombreuses semaines, bien avant le déclenchement de la crise des banlieues, j'ai réuni un certain nombre de personnalités françaises, afin d'évoquer de tels sujets, qui constituent pour nous une priorité.

À cette fin, un projet de loi modifiant la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est actuellement à l'étude, afin d'inscrire des mesures relatives à la lutte contre les discriminations et en faveur de la cohésion sociale dans les objectifs, les missions et les obligations du CSA. Ce texte vous sera soumis très prochainement. Les cahiers des charges des chaînes publiques seront modifiés pour mettre en place des obligations précises en la matière.

À ce moment de mon propos, je voudrais rassurer Louis de Broissia : les moyens nécessaires au fonctionnement du CSA lui seront octroyés. Un amendement, qui a été adopté samedi dernier par votre Haute Assemblée, tend à lui accorder un peu plus de 4 millions d'euros supplémentaires.

En effet, comme vous le savez, la mission de protection des signaux, compétence exclusive du CSA, est désormais partagée avec l'Agence nationale des fréquences, l'ANFR. Cela permet au CSA de mettre fin à un contrat de près de 6 millions d'euros avec TDF. Le Gouvernement a repris 2 millions d'euros, afin de doter le fonds d'aménagement des fréquences, et 4 millions d'euros restent donc au CSA. Cela correspond, me semble-t-il, à votre souhait, monsieur le sénateur, et je suis heureux de le souligner.

L'objectif de diversité est évidemment essentiel. Telle est la raison pour laquelle France Ô, programme édité par RFO et diffusé en métropole sur le câble et le satellite, sera diffusée sur la TNT. L'État préemptera un canal à cette fin, selon des modalités à déterminer.

L'ensemble des mesures que je viens d'évoquer contribueront, dans les meilleurs délais, à ce que le paysage audiovisuel français - et singulièrement le service public - reflète mieux la diversité de la société française et joue pleinement son rôle dans la création du lien social et républicain.

France Télévisions consacrera la majeure partie de ses moyens supplémentaires, soit 53 millions d'euros, résultant de l'augmentation de 3 % de la dotation publique du groupe et des économies réalisées, à l'amélioration de l'offre de programmes.

Les priorités pour 2006 sont, notamment, le renforcement de l'attractivité de France 4 et de France 5, l'affirmation pour RFO de son identité de diffuseur public de proximité, la participation au développement des nouveaux modes de consommation audiovisuels, en particulier la haute définition et la télévision mobile, et, enfin, un engagement accru dans la création et la production audiovisuelle et cinématographique.

Arte France, dont la dotation publique augmente de 3, 1 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2005, s'attachera à consolider sa grille de programmes. Elle maintiendra son effort en faveur de la création d'oeuvres audiovisuelles innovantes, dans le contexte de l'élargissement de sa diffusion permis par la TNT.

Radio France renforcera sa capacité d'innovation et se rapprochera de tous les auditeurs, avec les succès que nous connaissons. Cela passe non seulement par le plan de mise en sécurité de la Maison de la Radio, mais aussi par la restructuration en profondeur de ce bâtiment magnifique, qui doit s'adapter et permettre à tous les personnels, journalistes et techniciens de Radio France de travailler dans les meilleures conditions.

Radio France Internationale devra consolider sa place de média de référence, dans l'attente de la signature du premier contrat d'objectifs et de moyens entre RFI et l'État. Ce projet de budget lui permet de poursuivre la numérisation de sa production, engagée depuis 2003.

La sauvegarde et la mise en valeur de notre patrimoine audiovisuel par l'INA constituent un chantier d'ampleur que j'ai souhaité inscrire dans le long terme. Il y va de la mémoire audiovisuelle et de sa mise à disposition de l'ensemble de nos concitoyens.

L'accélération du « plan de sauvegarde et de numérisation », qui permettra de numériser, à l'horizon 2015, l'intégralité des fonds audiovisuels en fonction de leur état de dégradation, est l'une des priorités du présent projet de budget, ce qui justifie une dotation en progression de 4, 1 %, avec une hausse de 3 millions d'euros. Le contrat d'objectifs et de moyens de l'INA a été signé.

Comme vous le relevez dans votre rapport, monsieur le rapporteur pour avis, la presse est en crise, au sens étymologique de ce terme, c'est-à-dire qu'elle est à un tournant décisif. Vous avez évoqué un certain nombre de défis, comme la gratuité, la diffusion de la presse via internet ou les concurrences sur les modes d'information de nos concitoyens.

La presse doit se régénérer, afin d'assurer son avenir et de faire face à l'émergence de nouvelles habitudes de consommation, à l'essor toujours accéléré des nouvelles technologies, au développement d'une culture de la gratuité et à l'ensemble des évolutions structurelles qui bousculent les repères anciens.

Le projet de budget que je vous présente pour 2006 consolide à la hausse l'effort sans précédent consenti en 2005.

Quand on franchit une marche, afin d'augmenter le soutien de l'État, le problème est de savoir s'il s'agit d'une décision conjoncturelle ou si, dans les années qui suivent, l'effort est poursuivi. En l'occurrence, nous oeuvrons dans la même direction, ce qui signifie que nous avons une stratégie très offensive, puisque les crédits que vous votez et que l'État met à la disposition de la presse permettent d'encourager les modernisations, les évolutions, les innovations et les expérimentations sous toutes leurs formes.

Cette constance dans le soutien à la presse écrite marque la cohérence de l'action du Gouvernement, ainsi que notre volonté de préparer efficacement l'avenir.

À cet égard, je me réjouis, monsieur le rapporteur pour avis, que vous ayez salué les efforts que nous avons accomplis pour rationaliser le dispositif des aides directes à la presse. Comme vous le soulignez très justement, ce dispositif est désormais, grâce aux différentes réformes entreprises, plus lisible et cohérent. Avec un coeur de cible clairement identifié, la presse quotidienne d'information politique et générale est plus efficace, car elle privilégie les aides aux projets.

Au total, le projet de budget que je vous propose d'adopter traduit les quatre priorités de notre politique en faveur de la presse, à savoir contribuer à la diffusion la plus large de la presse écrite, soutenir la modernisation du secteur, respecter les engagements de l'État, avec le souci de la plus grande efficacité et, enfin, favoriser le développement à long terme du lectorat, en menant une action spécifique en direction des jeunes lecteurs. Vous en avez souligné à juste titre l'importance, monsieur le rapporteur pour avis, et je tiens à vous en remercier.

L'objectif est clair : contribuer à la diffusion la plus large de la presse écrite française. Car la diversité de la presse a pour enjeux la vitalité et la largeur du spectre de notre démocratie politique.

Plus de 60 millions d'euros seront mobilisés en 2006 pour accompagner la modernisation du secteur, afin de soutenir les initiatives dites « structurantes » ou « innovantes ».

L'effort en faveur de la modernisation du réseau des diffuseurs sera renforcé, afin de prendre en compte notamment les besoins liés à l'informatisation des points de vente. Les crédits correspondants seront portés à 4 millions d'euros, soit une progression de près de 15 % par rapport à 2005.

Je crois à l'offre de proximité, qui crée une demande. Ce qui est vrai pour le disque et le livre l'est également pour la presse. Par ailleurs, une telle offre présente un intérêt politique, car elle crée un lien entre nos concitoyens.

Les crédits du fonds d'aide à la modernisation de la presse, destiné aux projets de modernisation des entreprises, augmentent, dans ce projet de budget, de près de 20 %, comme vous le soulignez, monsieur le rapporteur spécial. À cet égard, je me félicite, comme vous, que la question des reports ait été résolue.

La budgétisation du compte d'affectation spéciale, que vous aviez souhaitée, améliore sa lisibilité.

Enfin, de nouvelles mesures - et c'est essentiel - sont destinées à améliorer l'autonomie financière et la capacité d'investir des entreprises de presse, afin de remédier au défaut de fonds propres qui les caractérise.

La création d'un fonds de garantie dédié aux entreprises de presse au sein de l'Institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles, l'IFCIC, facilitera leur accès aux prêts bancaires nécessaires au financement de leurs investissements. Il fonctionnera dès le 1er janvier 2006.

La dotation prévue pour les abonnements de l'État à l'Agence France-Presse est conforme à la norme de progression fixée dans le contrat d'objectifs et de moyens conclu avec l'Agence.

Comme vous l'avez fait remarquer, monsieur le rapporteur spécial, l'AFP est une grande entreprise, qui a aujourd'hui un rayonnement mondial. On ne peut que s'en féliciter ! J'avais déjà eu l'occasion de le constater, il y a quelques mois, lors des élections américaines. J'avais en effet observé avec plaisir de très nombreux organes de presse écrite du monde entier reprendre les tableaux, les dépêches et les éléments d'information transmis par l'AFP.

La chaîne d'information internationale, via le partenariat qu'elle créera avec l'AFP, renforcera encore le rayonnement de cette grande entreprise.

S'agissant de l'aide au transport postal de la presse d'information politique et générale, l'État tient les engagements pris dans le cadre de l'accord signé le 22 juillet 2004 avec la presse et La Poste.

L'aide à la distribution de la presse quotidienne nationale d'information politique et générale, créée en 2002, est maintenue.

L'engagement traditionnel de l'État en faveur du pluralisme est poursuivi et renforcé. Ainsi, l'aide aux quotidiens nationaux d'information politique et générale à faibles ressources publicitaires, qui est au coeur de notre action, verra sa dotation progresser de 7, 5 %.

Enfin, je vous l'ai dit, l'effort spécifique en direction des jeunes lecteurs, amorcé en 2005, sera prolongé et amplifié en 2006. Une première série de projets innovants a été mise en route cette année. Nous avons retenu la méthode expérimentale. Les crédits sont disponibles et les projets doivent être élaborés par des professionnels, afin de pouvoir être ensuite généralisés.

Je terminerai en évoquant, avec beaucoup d'énergie et une véritable passion, passion que j'aimerais vous transmettre, la chaîne d'information internationale.

La semaine dernière a été une grande semaine pour la liberté d'expression et d'information dans notre pays : lundi, la dix-huitième chaîne gratuite ouvrait son antenne et allait être disponible, pour l'ensemble de nos concitoyens, grâce à la TNT ; mercredi, le lendemain de l'accord signé par le Premier ministre avec les présidents respectifs de France Télévision et de TF1, nous étions en mesure d'annoncer que la nécessité stratégique qu'est la chaîne d'information internationale verrait le jour.

À l'évidence, il s'agit d'un défi, qui suppose que chacun s'y emploie avec beaucoup d'énergie et de détermination. Mais il faut arrêter de considérer, chaque fois qu'un nouveau projet est lancé, qu'il ne sera pas mené à son terme.

La chaîne d'information internationale est un projet cher au Président de la République, ...

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