Cinq amendements étaient déposés sur cet article 1er : je souhaite rappeler, dans un premier temps, l’utilité et la portée juridique de cet article pour bien faire comprendre la position du Gouvernement.
L’article 1er donne aux agents de la Haute autorité, saisis par les ayants droit, des pouvoirs limités de police judiciaire pour constater les infractions : d’une part, les délits de contrefaçon commis par les « pirates », d’autre part, la contravention de négligence caractérisée commise par un abonné.
L’objectif est que les procédures dressées par la Haute autorité puissent, de façon non pas systématique mais au moins fréquente, servir de base à l’engagement de poursuites sans qu’il soit nécessaire de les compléter par une enquête confiée à la police ou à la gendarmerie nationale. Pour autant, de telles enquêtes seront toujours possibles si elles sont nécessaires pour établir les faits et si le procureur le décide.
Par ailleurs, en confiant des pouvoirs de police judiciaire à ces agents, la loi les place automatiquement dans le champ d’application des dispositions des articles 12 et suivants du code de procédure pénale. Leur action sera donc nécessairement menée sous la direction, le contrôle et la surveillance du procureur de la République, du procureur général et de la chambre de l’instruction, en application des articles dudit code.
Les procès-verbaux qu’ils dresseront devront être transmis au procureur. Une circulaire cosignée par les ministres de la justice et de la culture pourra préciser les modalités pratiques de leurs interventions et l’articulation de celles-ci avec les autorités judiciaires.
J’en viens maintenant à la position du Gouvernement sur les cinq amendements.
Je ne suis pas favorable à l’amendement n° 1, qui vise à réécrire totalement l’article 1er, afin notamment de rappeler que les opérations de ces agents se déroulent sous le contrôle de l’autorité judiciaire. Cette précision est inutile puisque cela découle déjà des dispositions que je viens de citer.
Il est par ailleurs excessif d’exiger que tous les actes des agents de la HADOPI soient réalisés en présence d’un officier de police judiciaire. L’intérêt de ce texte est de donner à ces agents des pouvoirs propres de police judiciaire, comme c’est le cas pour d’autres autorités ou d’autres administrations.
Il est de même inutile d’exiger que les procès-verbaux soient transmis dans un délai de cinq jours au procureur, car, si une infraction est constatée, ces procès-verbaux devront lui être transmis sans délai, en application des dispositions générales de l’article 40 du code de procédure pénale.
Je ne suis pas non plus favorable à l’amendement n° 7, qui exige l’information préalable du procureur avant tout acte des agents de la HADOPI. Ce n’est évidemment ni justifié ni matériellement possible. Quand un agent de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ou de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité entend une personne soupçonnée de pratiques anticoncurrentielles ou de discrimination, il ne prévient pas préalablement le parquet.
L’amendement n° 8 – c’est la version initiale de l’amendement n° 8 rectifié bis – et l’amendement n° 10 traitent tous les deux de la question des auditions effectuées par les agents de la HADOPI, le premier prévoyant que la personne peut venir avec un avocat, le second précisant les modalités de signature du procès-verbal de l’audition.
Le Gouvernement n’est pas opposé aux objectifs visés à travers ces deux amendements, mais ceux-ci sont contradictoires entre eux, car ils visent à remplacer le même alinéa de l’article.
Par ailleurs, ils écrasent cet alinéa, qui prévoit que les agents de la HADOPI peuvent recueillir les observations des personnes concernées. Or, cet alinéa doit être absolument conservé, car il fait de l’audition une faculté à laquelle la Haute autorité peut recourir si c’est utile dans le cas d’espèce. Si ce n’est pas le cas et que les abonnés préfèrent présenter leurs observations par courrier ou par mail, il est inopportun de leur imposer systématiquement une audition, qui implique un déplacement, pour un enjeu qui pourra parfois être très réduit.
Je rappelle que les avertissements adressés par la HADOPI sont dépourvus par eux-mêmes de toute portée juridique et que seule l’autorité judiciaire dispose du pouvoir de sanction.
Les dispositions proposées à travers ces amendements doivent compléter le texte et non remplacer cet alinéa.
Le Gouvernement est donc favorable à l’amendement n° 8 rectifié dès lors que, insérant un alinéa après le deuxième alinéa du texte proposé par l’article 1er pour l’article L.331-21-1 du code de la propriété intellectuelle, il ajoute la possibilité pour les abonnés de demander une audition afin de présenter leurs observations.
En revanche, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 10.
Enfin, le Gouvernement n’est pas favorable à l’amendement n° 9, qui tend à supprimer l’alinéa précisant que les procès-verbaux des agents de la HADOPI valent jusqu’à preuve contraire. Il ne s’agit évidemment pas, contrairement à ce qui a été dit, d’une présomption de culpabilité. Cet alinéa se borne à décliner un principe général posé à l’article 431 du code de procédure pénale concernant les agents qui ont reçu de la loi le pouvoir de constater les infractions.