Intervention de Jean-Marie Bockel

Réunion du 11 février 2010 à 15h00
Lutte contre les violences de groupes — Adoption définitive d'une proposition de loi en deuxième lecture

Jean-Marie Bockel, secrétaire d’État à la justice :

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, garantir la protection et la tranquillité de nos concitoyens face aux violences de groupes par la création de nouvelles infractions ou de circonstances aggravantes et l’adoption de sanctions proportionnées, voilà bien l’équilibre auquel nous sommes parvenus à ce stade de la navette parlementaire.

Je parle bien d’un texte d’équilibre, tant la recherche d’un compromis entre le Sénat et l’Assemblée nationale a marqué vos travaux. Je peux moi-même en témoigner, ayant suivi, pour le Gouvernement, les différentes étapes de la discussion.

À mon sens, le texte voté par l’Assemblée nationale le 27 janvier dernier respecte, comme nous y avons tous veillé, les modifications apportées par le Sénat en première lecture. Mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez notamment enrichi la proposition de loi en adaptant fort justement le quantum de certaines peines.

Je ne reviendrai pas sur la nécessité d’introduire des dispositions de lutte contre le phénomène des bandes, tant, dans son principe, elle me semble faire l’objet d’un assez large consensus.

Nous sommes nombreux ici à être aussi des élus locaux. À ce titre, nous savons combien les violences de groupes sont une réalité qui touche tous les territoires de la République, non seulement à l’occasion de manifestations sportives, et pas uniquement en ville, dans les stades, mais également lors des temps éducatifs organisés dans nos écoles.

En 2009, à la suite des affrontements entre bandes rivales, six personnes sont décédées et cent cinquante-trois autres ont été blessées plus ou moins gravement.

Face à une délinquance qui ne cesse d’évoluer, nos réponses doivent être adaptées. À cet égard, je rappellerai rapidement, puisque nous en connaissons tous maintenant les tenants et aboutissants, les principales innovations introduites par la proposition de loi.

En premier lieu, il est prévu de nouveaux moyens pour combler les lacunes existantes.

Ces moyens sont, tout d’abord, juridiques.

Il s’agit, d’une part, de la création d’un délit de participation à une bande violente, qui permettra de mieux appréhender la réalité du phénomène et de lutter contre l’impunité recherchée par les personnes agissant en groupe, sans pour autant établir une responsabilité collective. Il y a là une ligne extrêmement nette que nous n’avons surtout pas voulu franchir.

Le Sénat a modifié la rédaction du texte pour écarter tout risque de responsabilité collective, qui avait, en d’autres temps, fait tant polémique. Il convenait de ne laisser subsister aucune ambiguïté, et la Haute Assemblée a ainsi très justement garanti la sécurité juridique de cette nouvelle qualification. C’est, je tiens à le souligner, un apport important, en faveur duquel, monsieur le rapporteur, je sais que vous vous êtes personnellement impliqué, avec plusieurs de vos collègues de la commission des lois, sous l’autorité vigilante de son président.

Les débats entre les deux chambres ont conduit à l’adoption d’une peine d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende, ce qui constitue un point d’équilibre approprié.

Il s’agit, d’autre part, de la lutte contre les infractions commises à visage dissimulé, phénomène nouveau dont nos concitoyens ont désormais bien conscience et qui a marqué la dénaturation de nombreuses manifestations démocratiques.

Tout le monde était perdant, non seulement les victimes des faits, souvent traumatisées, mais également les manifestants eux-mêmes, en tout cas ceux qui n’avaient que des intentions pacifiques. De surcroît, le travail d’identification de la justice était rendu très compliqué. Personne ne pouvait se satisfaire d’une telle situation.

Contre ces infractions, les deux assemblées se sont accordées pour introduire une nouvelle circonstance aggravante et sanctionner plus sévèrement les agressions à visage dissimulé.

Les nouveaux moyens prévus sont, ensuite, opérationnels, pour faciliter le travail des forces de l’ordre dans le respect du droit.

La proposition de loi précise en effet le cadre d’exercice de la police d’agglomération, sujet qui a suscité des échanges passionnés et passionnants.

Pour adapter l’organisation de la sécurité aux bassins de délinquance, nous avons soutenu la proposition du Sénat d’étendre les compétences du préfet de police de Paris aux départements de la petite couronne pour la totalité du maintien de l’ordre public. En effet, sur dix personnes interpellées chaque jour à Paris, six ne résident pas dans la capitale intra-muros.

En second lieu, le texte a pour objet de mieux protéger nos concitoyens, au travers de mesures ciblées sur certains lieux symboliques.

Il s’agit, d’une part, de lutter contre la violence dans les stades, à laquelle j’ai fait allusion tout à l’heure, par des mesures de prévention et de répression.

Mesures de prévention, d’abord : la proposition de loi permet de doubler la durée des interdictions administratives de stade, lesquelles pourront être portées à six mois et interviendront dès le premier trouble à l’ordre public, ce qui sera vraiment dissuasif.

Mesures de répression, ensuite : l’infraction d’introduction de fumigènes dans les stades sera élargie, puisque leur usage et leur détention seront également incriminés.

Il s’agit, d’autre part, de lutter contre la violence à l’école.

Les événements que nous avons eu à déplorer semaine après semaine, et encore tout récemment, ont montré la nécessité de protéger les écoles, leurs abords et les personnels qui y travaillent.

En la matière, le texte apporte une réponse adaptée en prévoyant, notamment, une peine d’un an d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende pour sanctionner l’intrusion dans un établissement scolaire.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le texte qui vous est proposé aujourd’hui est le fruit de la recherche d’un double équilibre, entre, d’un côté, la répression nécessaire du phénomène des bandes et le respect de la sécurité juridique et du droit des personnes, et, de l’autre, les travaux en commission et les délibérations du Sénat et de l’Assemblée nationale, dont les positions divergeaient parfois.

Vous et vos collègues députés avez eu sur ce sujet, je le sais, de nombreuses discussions, constructives, respectueuses et marquées par la volonté d’aboutir. Je tiens donc à saluer le travail remarquable des deux rapporteurs, Éric Ciotti et François Pillet.

Tel est l’esprit dans lequel nous abordons la deuxième lecture de ce texte, qui, s’il devait aboutir à un vote conforme entre les deux assemblées…

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