Intervention de Philippe Dallier

Réunion du 4 novembre 2010 à 9h30
Débat sur le rôle de l'état dans les politiques locales de sécurité

Photo de Philippe DallierPhilippe Dallier :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, en préambule à mon intervention, je souhaitais saluer l’initiative du groupe du RDSE. Toutefois, après avoir entendu Jean-Michel Baylet, je me garderai de le faire. En effet, au lieu de traiter le sujet sur le fond, notre collègue s’est livré à une attaque en règle contre Christian Estrosi. Je m’empresse de le dire, je n’ai pas du tout apprécié, comme certains autres membres de la majorité, les propos qu’il a tenus cet été. Pour autant, ces paroles ne méritent pas, selon moi, que l’on y consacre, depuis la tribune du Sénat, l’intégralité d’une intervention sur un débat aussi essentiel.

Les propos des orateurs qui m’ont précédé l’ont démontré, en tant qu’élus locaux de terrain, quelle que soit notre appartenance politique, nous rencontrons tous les mêmes difficultés. Nos analyses sont donc, le plus souvent, identiques, ma propre intervention en témoignera.

J’ai souhaité que ce débat sur le rôle de l’État dans les politiques locales de sécurité me permette – c’est en tout cas mon but – d’attirer votre attention sur les difficultés que rencontrent certaines communes pour faire face au problème de la sécurité, de plus en plus crucial pour nos concitoyens.

Ce droit à la sécurité, d’ailleurs reconnu dès 1789 comme un droit fondamental par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, est devenu, au fil des années, un enjeu majeur de notre société.

L’enjeu est majeur non seulement pour l’État, puisqu’il s’agit d’une compétence éminemment régalienne, mais aussi pour les communes, dont les élus se trouvent en première ligne, confrontés, au quotidien, aux demandes de leurs concitoyens, lesquels attendent d’eux, dans ce domaine comme dans les autres, des résultats, sans se soucier ni de leur pouvoir réel – cela soulève d’ailleurs une vraie question – ni des moyens dont ils disposent.

Si, en matière de prévention, le rôle du maire s’est continuellement élargi ces dernières années, puisqu’il est désormais au cœur des dispositifs partenariaux, il n’en est pas moins vrai que la population, comme l’État, lui en demande toujours plus, dans un champ qui déborde maintenant la prévention ou les fameux pouvoirs de police, tels qu’ils étaient conçus voilà vingt-cinq ans, c’est-à-dire avant la création ex nihilo des premières polices municipales.

Rassurez-vous, en disant cela, je ne méconnais nullement les textes et je ne souhaite absolument pas une confusion des rôles des polices municipales et nationale. Je me contente de faire le constat d’une lente évolution de la situation.

Ayons l’honnêteté de le reconnaître, tant du côté de l’État que de la population, au travers des outils que sont les polices municipales ou la vidéosurveillance, on a largement souhaité que les collectivités locales aillent bien plus loin que le simple travail de prévention assumé jadis.

Certes, le fait de se doter d’une police municipale ou d’un système de vidéosurveillance reste un choix politique dans la main des élus locaux, et nul n’est encore obligé de s’inscrire dans cette logique.

Toutefois, pour beaucoup d’élus, dans ce domaine comme dans bien d’autres, nécessité finit par faire loi, et ce n’est pas tant par principe que par réalisme qu’ils prennent la décision de créer une police municipale ou d’équiper leur commune de caméras.

Ceux qui sont conduits à prendre de telles décisions le font parfois au détriment d’autres services à la population ou au prix d’un accroissement de la fiscalité locale, tout simplement parce qu’ils ne disposent pas de moyens budgétaires suffisants.

À titre d’exemple, monsieur le secrétaire d’État, je citerai le cas d’une commune de 21 000 habitants, située en plein cœur de la Seine-Saint-Denis, qui consacre près de 800 000 euros par an à payer quinze policiers municipaux et douze agents de surveillance de la voie publique, alors que son potentiel financier est inférieur de 25 % à la moyenne de la strate.

Cette somme représente près de 20 % du produit de la part communale de la taxe d’habitation et près de cinq fois le montant de la dotation de solidarité urbaine qu’elle perçoit. C’est considérable !

À ces dépenses de personnel s’ajoutent bien évidemment l’entretien des locaux, des véhicules et des matériels. Au total, amortissements compris, la dépense avoisine le million d’euros, alors que l’autofinancement net de cette commune dépasse péniblement 1, 5 million d’euros par an.

Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, cette commune est la mienne. Cet exemple personnel me permet de vous affirmer que le choix, éminemment politique, de consacrer 20 % du produit de la taxe d’habitation à la sécurité publique, je ne l’ai pas fait de gaieté de cœur, et encore moins par idéologie.

J’ai fait ce choix parce que ma ville ne dispose pas d’un commissariat de police.

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