M. Cointat a raison, le Conseil constitutionnel a mis le feu aux poudres, en tout cas au Sénat, puisque l’Assemblée nationale avait déjà adopté la procédure permettant de déclarer un amendement irrecevable au titre de l’article 40 préalablement à sa diffusion.
On aurait pu imaginer que, à l’occasion d’une réforme constitutionnelle par laquelle on prétend conférer plus de pouvoirs aux parlementaires, les choses seraient « remises à l’endroit », en donnant aux parlementaires quelques responsabilités – je ne parle pas de pouvoirs ! – en matière de recettes et de dépenses publiques.
Le refus opposé à ces amendements identiques, qu’il s’agisse de celui qui a été déposé par M. Arthuis ou de ceux émanant de l’opposition, montre clairement ce qu’il en est de cette réforme constitutionnelle : il ne s’agit absolument pas de donner des pouvoirs supplémentaires au Parlement. Cela, au moins, c’est très clair !
M. Arthuis nous a donné toutes les raisons pour supprimer l’article 40 : le Gouvernement dispose toujours d’une large palette d’instruments pour s’opposer à des dépenses inconsidérées ou à des initiatives jugées inopportunes. Le premier de ces instruments, c’est en fait la LOLF, qui encadre strictement tout pouvoir budgétaire des parlementaires. Je n’oublie pas pour autant la procédure du vote bloqué et les dispositions des articles 49 et 44 de la Constitution.
M. Arthuis rappelle aussi que toutes ces procédures n’ont pas empêché le gonflement des dépenses publiques et l’aggravation du déficit public.
Franchement, il y a tout de même quelque chose de risible, pour un parlementaire, à se faire administrer des leçons de bonne gestion des dépenses publiques par ceux-là mêmes dont la seule préoccupation est de diminuer les recettes publiques en abaissant les impôts des plus riches, en nous faisant voter le paquet fiscal dès leur arrivée aux affaires, ceux-là mêmes qui ne songent qu’à réduire les dépenses publiques – surtout celles qui, liées aux services publics, sont directement utiles à la population –, ceux-là mêmes qui bradent le patrimoine de l’État, par exemple en vendant pour trois sous à des fonds de pension américains les locaux de l’Imprimerie nationale pour les racheter aussitôt après au prix fort, permettant ainsi aux fonds de pension en question de ramasser au passage beaucoup d’argent !
Ce gouvernement est donc singulièrement mal placé pour donner des leçons de gestion aux parlementaires.
Vous pourriez faire confiance aux élus, y compris à ceux de votre propre majorité, en leur concédant un certain pouvoir dans la gestion des recettes et des dépenses publiques. Cela vous permettrait, du même coup, de faire preuve de modestie et de mettre en accord vos actes et vos paroles puisque vous prétendez vouloir accroître les prérogatives du Parlement !