Intervention de Éliane Assassi

Réunion du 7 avril 2010 à 14h30
Grand paris — Article 2

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

Cet article nous amène à l’essence même de ce texte, à savoir la création d’un réseau de transport public du Grand Paris et plus précisément d’un métro automatique en rocade.

M. Mongin a pour sa part estimé le coût de ce projet entre 22 milliards et 25 milliards d’euros alors que vous, monsieur le secrétaire d'État, l’estimez à 21 milliards d’euros.

Si vous évoquez le recours à l’emprunt et une dotation en capital de l’État, il y a fort à parier que, in fine, ce seront malheureusement les Franciliens qui en seront de leur poche !

Permettez-moi de vous poser une question, qui en sous-tend d’autres : ce métro en rocade sera-t-il utile aux Franciliens ? Il est vrai que la réponse n’est pas évidente. En effet, augmenter l’offre de transport, même si elle est inadaptée, pourra permettre de répondre à certains besoins.

La question essentielle est donc la suivante : de quels besoins parlons-nous ?

Nous craignons que ce projet, en reliant des lieux de travail entre eux, et non des lieux d’habitation, ne permette pas aux Franciliens d’en tirer profit.

Est-ce donc réellement un projet pour les Franciliens ? Ce projet est-il pertinent techniquement et économiquement ? Là encore, la réponse n’est pas aisée. Force est de constater que nous ne bénéficions d’aucune étude sur la faisabilité d’une telle opération, ni sur les différents scénarii techniques envisageables.

Comment un projet urbain portant sur les transports de la région capitale et se plaçant dans le contexte de l’après-Kyoto peut-il délibérément cantonner la question du fret à la liaison des ports et ne pas prôner un maillage du fret sur l’ensemble de la région capitale ?

Comme nous l’avons précédemment souligné, ce projet doit relever du STIF et non d’une nouvelle structure technocratique. Il nous paraît en effet nécessaire de garantir la cohérence de ce projet avec le réseau existant, même si nous sommes conscients de l’effort fait par la commission concernant les enjeux liés aux interconnexions.

Il existe un plan de modernisation des transports en Île-de-France, à hauteur de 18 milliards d’euros, proposé par le conseil régional. Alors même que l’État ne s’est toujours pas formellement engagé, il s’apprêterait dans le même temps, par ce texte, à dépenser plus encore.

Je vois là, pour ma part, une certaine contradiction.

D’une part, si la conception du projet revient à la société du Grand Paris, la gestion sera conduite par le STIF. C’est une manière radicale d’obérer pour de nombreuses années les capacités d’investissement du STIF.

Ainsi, selon les projections dont nous disposons, pour permettre le financement de la gestion du Grand huit, les collectivités seraient amenées à doubler leur contribution au STIF, ce qui, dans le contexte d’assèchement des ressources des collectivités, ne permettra pas de répondre efficacement à tous les besoins.

D’autre part, la déclaration d’utilité publique et d’intérêt général qui accompagnera le projet permettra à l’État d’encadrer fermement les documents locaux d’urbanisme, alors même que nous estimons insuffisante l’association des collectivités à ce projet.

Cette déclaration permettra également à ces projets de contredire de façon complète les objectifs du SDRIF et finalement de forcer sa modification.

Réduire l’action des collectivités à leur participation au débat public et à la rédaction d’un avis ne permettra pas de garantir leur réelle implication dans ces projets. En tout état de cause, nous estimons que seul le STIF dispose de la légitimité suffisante pour entreprendre un tel dessein.

En 2004, après le vote des lois de décentralisation, l’État a confié à la région la direction du STIF, en faisant le choix de se retirer intégralement de cette structure. Nous nous étions alors formellement opposés à un tel positionnement, qui nous semblait ouvrir la voie à un désengagement massif, malheureusement réel depuis 2006.

Aujourd’hui, en reprenant en main un seul projet, celui du Grand huit, pour lequel seule la volonté de l’État prévaudra, c’est bien l’inverse que vous préconisez !

Nous estimons pour notre part que la question des transports doit permettre de conjuguer, d’une part, la garantie, par l’État, des intérêts nationaux et, d’autre part, la défense, par la région et les collectivités, des intérêts territoriaux.

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