Intervention de Denis Badré

Réunion du 14 juin 2006 à 15h00
Conseil européen des 15 et 16 juin 2006 — Débat sur une déclaration du gouvernement

Photo de Denis BadréDenis Badré :

Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, nous sommes à la veille du quatrième sommet européen depuis le 29 mai 2005. Les deux qui se sont tenus sous présidence britannique n'ont pas apporté grand-chose, mais personne n'attendait de grands résultats de ces sommets et de cette présidence ; les deux suivants ont eu lieu sous présidence autrichienne. M. Hubert Haenel rappelait fort justement tout à l'heure que ces présidences ont été marquées par l'expression d'une conviction et d'une volonté d'avancer de façon pragmatique que je salue. Je salue également le travail et l'engagement personnel tout au long de ces quatre sommets de notre ministre déléguée aux affaires européennes, dont les uns et les autres ont pu constater combien elle s'investissait sur ces dossiers difficiles mais ô combien cruciaux pour l'avenir.

Je voudrais en quelques mots faire le point sur l'état de la construction européenne, sur l'état de l'Union comme on dit aux États-Unis. Depuis le 29 mai 2005, l'Union balbutie : les progrès n'ont été que mineurs et très partiels.

Sur la Turquie, on a avancé, mais est-ce vraiment un progrès ? On ne le dit pas assez, on se moque des Turcs en disant qu'on les engage dans un processus de négociation et d'adhésion, alors que l'on sait très bien qu'au terme du processus le non de tel ou tel peuple leur fermera la porte de l'Union européenne. Il faudrait avoir au moins le courage de leur dire qu'ils sont engagés dans une impasse et qu'ils pourraient légitimement négocier une autre formule que l'adhésion. C'est le thème des cercles concentriques. Nous proposons là une vraie ouverture.

À propos de la directive sur les services, dont on a parlé depuis le 29 mai 2005, les États se sont mis d'accord sur un texte qui n'est plus celui du début, ce qui réjouit beaucoup d'entre nous, mais dont le résultat n'est pas terrible. Ce texte « braque » ceux qui voulaient plus et ceux qui voulaient moins. Je ne suis pas certain que c'était le sujet sur lequel il fallait d'emblée mettre l'accent pour remettre en route l'Europe.

Sur les perspectives financières, je ne développe pas mon propos, madame la ministre déléguée : vous savez tout le mal que je pense de notre structure budgétaire. C'est dramatique que nous soyons repartis sur cette base pour sept ou huit ans. J'espère qu'il n'en sera ainsi que pour trois ans et que nous mettrons à profit le rendez-vous de 2009 pour revenir enfin sur cette structure budgétaire, qui est à un vrai budget ce que le Canada Dry est au whisky.

Quelle perception ont les Français de l'état de la progression de la construction européenne ? Silence radio ! Les Français ont le sentiment qu'il ne s'est rien passé depuis le 29 mai 2005. On ne leur a rien dit, ils n'ont rien entendu, on ne leur a surtout pas demandé leur avis, ils n'ont pas pu s'exprimer.

Prenons les sujets qui ont fait l'actualité de l'Union européenne : sur la Turquie, ils auraient préféré qu'on ne leur en parle pas ou qu'on leur en parle autrement ; sur la directive relative aux services, c'est la même chose ; quant au budget, ils ne savent pas ce que c'est. Sur les deux premiers sujets, le résultat est négatif, et sur le troisième, il est nul : il n'y a donc aucun progrès.

Avant le 29 mai, on a beaucoup dit qu'il était formidable que les Français se soient passionnés pendant cette campagne et qu'ils se soient enfin intéressés à l'Union européenne. Le 30 mai, on a arrêté de leur en parler : c'est dommage ! Il fallait continuer à faire de la pédagogie et à les associer : ils se seraient ainsi approprié le projet européen et auraient pu reprendre confiance dans une réalisation qu'ils auraient enfin comprise.

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