Intervention de Catherine Colonna

Réunion du 14 juin 2006 à 15h00
Conseil européen des 15 et 16 juin 2006 — Débat sur une déclaration du gouvernement

Catherine Colonna, ministre déléguée :

Sur tous ces sujets, monsieur le sénateur - l'énergie, la recherche, l'éducation, le budget européen, les migrations -, notre pays a été à l'origine d'initiatives et a su peser de tout son poids pour entraîner les autres.

Je n'ai pas besoin non plus de rappeler à la représentation nationale tout ce qui a été fait depuis un an pour mieux associer le Parlement, mais aussi les partenaires sociaux, les collectivités territoriales et tous les Français, aux questions européennes. Je rappellerai toutefois, pour ceux qui l'ignoreraient, l'adresse du site Internet que nous avons créé, sur lequel chacun peut s'exprimer : « www.touteleurope.fr » Vous le voyez, monsieur de Montesquiou, nous entendons faire au moins aussi bien que les pays voisins. J'encourage d'ailleurs chacune et chacun à se rendre sur ce site et à s'y exprimer.

J'en viens aux deux autres grands sujets que vous avez évoqués, les questions institutionnelles et l'élargissement.

Tous les orateurs l'ont souligné, les chefs d'État ou de gouvernement aborderont, bien sûr, à l'occasion de ce Conseil européen, la grande question de l'avenir du traité constitutionnel. Vous avez tous souhaité savoir où il en est.

Comme l'a rappelé M. le ministre des affaires étrangères, quinze pays l'ont ratifié. La Finlande devrait en principe se prononcer au cours du second semestre 2006 - c'est en tout cas l'intention qu'elle a fait connaître publiquement. Deux États l'ont rejeté par un vote qui s'impose. Quant à ceux qui ne se sont pas encore prononcés - ils sont huit aujourd'hui -, nous savons bien qu'il serait difficile pour certains d'entre eux de le faire. C'est d'ailleurs un fait auquel il faut donner l'importance qu'il mérite, ce qui n'est pas toujours le cas.

Disons donc les choses de la façon la plus claire et la plus simple possible : il n'y a pas aujourd'hui de solution à court terme pour l'avenir du traité. Il n'y a pas non plus de consensus, comme vous l'avez dit, monsieur le président. Dans ces conditions, les Vingt-cinq se dirigent vers la prolongation de la période de réflexion ouverte l'an dernier, et ce pour plusieurs années, car plusieurs présidences seront nécessaires pour que la question institutionnelle trouve une réponse adéquate.

Le Président de la République et la Chancelière fédérale allemande l'ont indiqué lors de leur rencontre du 6 juin, la présidence allemande devrait permettre de faire la synthèse des propositions possibles. Le premier semestre 2007 devrait ainsi être le début d'une séquence, qui se prolongera jusqu'au second semestre 2008 avec la présidence française, peut-être même au-delà.

Voilà ce que nous pouvons vous dire aujourd'hui sur l'état de la situation.

Cela étant, comme vous l'avez dit, monsieur Jacques Blanc, cette situation délicate, difficile même, ne remet pas en cause le problème de fond : le besoin d'institutions rénovées reste entier. Nous ne pourrons pas en rester durablement au traité de Nice. Un nouveau traité sera nécessaire.

La France, par la voix du Président de la République, a proposé, dans cette attente, d'améliorer déjà ce qui peut être amélioré dans le cadre des traités actuels. C'est pourquoi Philippe Douste-Blazy et moi-même avons transmis à la fin du mois d'avril à nos partenaires européens une contribution à la réflexion commune comportant plusieurs propositions précises et concrètes, que je vous présenterai brièvement parce qu'elles me semblent rejoindre nombre des préoccupations que vous avez exprimées aujourd'hui.

Nous avons ainsi proposé d'améliorer la sécurité des citoyens en rendant plus facile la prise de décision dans ce domaine grâce au passage à la majorité qualifiée dans certains cas, qui seraient décidés à l'unanimité. Il faudra d'ailleurs, comme le président Haenel l'a justement souligné, développer d'une façon générale le passage à la majorité qualifiée pour prendre des décisions.

Nous avons également fait des propositions sur la dimension sociale de l'action de l'Union, qu'il faut mieux faire prendre en compte, et sur son action extérieure, pour renforcer la cohérence, la visibilité et l'unité entre tous les acteurs concernés, qui sont nombreux - la Commission, le Conseil, les États membres, ainsi que le secrétaire général et Haut Représentant.

Cependant, je rappelle à M. de Montesquiou que pour avoir un véritable ministre des affaires étrangères européen, qu'il appelle de ses voeux, il faut un nouveau traité. C'était même prévu.

Nous avons également fait des propositions sur la coordination des politiques économiques, qui est indispensable pour renforcer notre efficacité collective, comme la France l'a toujours souhaité.

Nous en avons fait également sur le rôle des parlements nationaux. C'est une exigence démocratique fondamentale. À cet égard, je suis entièrement d'accord avec ce qu'a dit M. Haenel. Le contrôle du principe de subsidiarité et de proportionnalité par les parlements nationaux doit être renforcé. Vous avez d'ailleurs fait, monsieur le président, de très intéressantes réflexions sur la subsidiarité, étayées par l'exemple.

Il est certain qu'un meilleur équilibre doit être trouvé entre harmonisation et subsidiarité. L'une comme l'autre sont nécessaires.

Le texte du traité constitutionnel comporte d'ailleurs des dispositions précises pour assurer un meilleur respect de la subsidiarité, ce qui prouve non seulement que notre pays le préconise depuis plusieurs années - depuis que la réflexion s'est engagée sur les institutions au début des années 2000 -, mais que ses partenaires en étaient également convaincus puisque qu'ils en avaient ainsi décidé et que ce texte avait fait l'objet d'un accord.

Mais n'oublions pas non plus que l'harmonisation est, elle aussi, nécessaire. C'est même l'un des principes de base de l'Union européenne. Et c'est ce qui explique parfois que la même règle s'applique en droit à tous, même si tous ne sont pas concernés dans la même mesure.

Quant à votre remarque sur les fleuves, monsieur le sénateur, elle paraît à première vue fort pertinente. Philippe Douste-Blazy et moi-même la prendrons pleinement en compte et nous vous informerons de la façon dont a été forgée, ou non, la position interministérielle sur ce sujet.

Cela dit, monsieur le président, le Gouvernement avait agi en faveur de la subsidiarité et le traité validait cette ligne. Comme il n'est pas en vigueur, le Gouvernement continue d'oeuvrer en ce sens. La France souhaite que les parlements nationaux soient mieux associés et a proposé des mécanismes précis dans la contribution que j'ai précédemment évoquée et qu'elle a adressée à ses partenaires au mois d'avril.

Vous avez souligné, monsieur le sénateur, que le président José Manuel Barroso a repris cette idée. Nous le remercions en effet d'avoir bien voulu s'inspirer des propositions françaises, sur ce sujet comme sur quelques autres, dans l'importante contribution que la Commission européenne a rendue publique voilà quelques semaines, au mois de mai.

Pour répondre à votre question, je peux vous assurer que la France souhaite que le prochain Conseil européen marque clairement la direction : elle a pour cela le soutien de la Commission et de la présidence, ce qui est essentiel. Elle l'a redemandé lundi lors du conseil affaires générales et relations extérieures. J'observe cependant, comme vous, que les négociations se poursuivent sur les conclusions afin de lever les réticences de quelques États membres qui sont prêts, sur ce point, à aller moins loin que nous.

D'une manière plus générale, je voudrais rappeler à MM. Boulaud et de Montesquiou qu'en faisant ces propositions à traités constants dans le cadre des textes actuels, nous avons avant tout voulu être pragmatiques et efficaces et envisager très concrètement tout ce qui pouvait être amélioré dès maintenant. C'est non seulement possible, puisque les textes le permettent dans un certain nombre de cas, mais c'est nécessaire pour rendre la période de réflexion pleinement active et utile.

C'est donc tout le contraire d'une pause ou de l'inaction. Permettez-moi de redire que c'est la France, et elle seule, qui a fait ces propositions.

Le Conseil européen doit permettre d'arrêter des orientations claires pour avancer sur plusieurs de ces propositions et poser ainsi des jalons pour l'avenir.

J'en viens à présent au second sujet majeur de ce Conseil européen : l'élargissement.

La France, vous vous en souvenez, avait souhaité que la réflexion sur ce sujet occupe davantage de place dans le débat européen.

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