Intervention de Serge Lagauche

Réunion du 13 mai 2009 à 9h45
Diffusion et protection de la création sur internet — Adoption définitive d'un projet de loi en nouvelle lecture

Photo de Serge LagaucheSerge Lagauche :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la défense du droit des auteurs sur internet et l’adaptation du code de la propriété intellectuelle aux nouveaux supports de diffusion culturelle auront été marqués, avec l’échec de la loi relative au droit d’auteur et aux droits voisins dans la société de l’information, dite loi DADVSI, par de nombreux rebondissements que nous ne pouvons que regretter.

Le rejet par l’Assemblée nationale du texte de compromis issu des travaux de la commission mixte paritaire est la marque de la maladresse et de la légèreté du Gouvernement sur un texte pourtant fondamental pour la défense des créateurs de notre pays.

Nous regrettons de devoir à nouveau nous exprimer aujourd’hui parce que, une fois de plus, le Gouvernement prend un retard coupable afin de mettre en œuvre les mesures qui s’imposent pour protéger les droits de nos auteurs, de nos créateurs et de nos artistes, toutes disciplines confondues.

Le texte qui nous est présenté en nouvelle lecture est pour ainsi dire le même que celui sur lequel nous nous étions exprimés le 9 avril dernier à l’issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Dans cet intervalle, le Parlement européen a adopté un amendement au « paquet Télécom » qui semblerait pouvoir remettre en cause le dispositif de la riposte graduée.

Nous considérons, conformément au droit en vigueur, que l’accès à internet n’est pas assimilable à une liberté fondamentale. Il vous appartient cependant, madame la ministre, de trouver un dispositif conforme à la réglementation européenne, sans renoncer, bien entendu, à la défense du droit d’auteur.

Nous avons déjà eu l’occasion, à maintes reprises, d’évoquer les pertes de chiffre d’affaires des entreprises du secteur culturel. Un rappel me semble toutefois nécessaire : moins 50 % pour la musique enregistrée, moins 35 % pour la vidéo, un milliard de fichiers culturels volés via les échanges de pair à pair en 2008, 450 000 films téléchargés et mis à disposition illégalement tous les jours.

De tels chiffres vous commandaient d’agir rapidement. Depuis le 23 novembre 2007 et la signature des accords de l’Élysée, vous étiez en capacité de le faire. L’ensemble des acteurs associés à la diffusion culturelle sur internet s’étaient entendus autour d’un dispositif pédagogique et proportionné de riposte graduée, sur lequel je ne reviendrai pas. Or, il vous aura fallu près de deux ans depuis la signature des accords de l’Élysée pour faire voter ce texte par le Parlement.

Dans cet intervalle, le piratage des œuvres s’est amplifié et les offres légales de musique et de films peinent toujours à trouver leur public.

En effet, en 2007, si 1, 4 milliard de titres musicaux ont été téléchargés en ligne de façon légale dans le monde, les chiffres de l’IFPI, l’International Federation of Phonographic Industry, nous enseignent qu’en 2008 95 % des titres musicaux téléchargés sur internet l’ont été de façon illégale.

Le piratage, c’est-à-dire le vol des œuvres, outre qu’il est bien souvent de piètre qualité, domine donc l’offre légale et l’empêche de se développer. C’est un fait reconnu par tous, les majors du disque comme les labels indépendants. On a voulu nous faire croire à un clivage entre les industriels et les artisans : ce texte serait le bras armé des industries culturelles contre les artisans de la contre-culture. C’est faux, et le soutien de la très grande majorité des ayants droit, artistes, auteurs, éditeurs, producteurs, petits et grands, le démontre.

Si votre texte, madame la ministre, a l’avantage de graver dans le marbre de la loi le principe selon lequel le piratage des œuvres culturelles est un vol vis-à-vis du droit d’auteur, auquel il convient de répondre en prévoyant une sanction graduée et proportionnée, il manque toutefois cruellement d’un volet pédagogique qu’il faut développer.

Il faut expliquer de manière forte et volontaire aux jeunes internautes et à leurs parents, les titulaires de l’abonnement à internet, les dangers pour la création artistique du piratage des œuvres. Il faut développer une grande campagne de sensibilisation et insister sur le fait que la gratuité n’existe pas, sur internet comme partout ailleurs. Tout se paie…

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