Intervention de Serge Lagauche

Réunion du 13 mai 2009 à 9h45
Diffusion et protection de la création sur internet — Adoption définitive d'un projet de loi en nouvelle lecture

Photo de Serge LagaucheSerge Lagauche :

… et cette rémunération, directe ou indirecte, est la source indispensable du financement du cinéma, de la musique et de l’ensemble de la création artistique.

Une telle campagne de sensibilisation permettra de mieux faire comprendre et d’accepter le dispositif de la riposte graduée.

La Ligue des droits de l’homme estime que ce texte vient rompre l’équilibre entre la protection des auteurs et le droit du public à accéder à la culture.

Nous partageons les positions prises par la Ligue des droits de l’homme pour veiller au respect des libertés fondamentales. Pourtant, nous considérons en l’espèce que c’est le développement de l’offre légale de musique et de film qui permettra de maintenir cet équilibre. Si le pillage des œuvres se poursuit, la source de financement des entreprises du secteur culturel se tarira et, au final, la diversité des œuvres disponibles et accessibles à tous sera remise en question.

Les accords Olivennes doivent, pour éviter cela et maintenir cet équilibre, être développés. La riposte graduée doit être adossée à des mesures permettant le développement d’une offre légale attractive pour le public internaute.

Certes, le texte prévoit une évolution de la chronologie des médias et les films seront désormais disponibles en DVD et en VOD quatre mois après leur sortie en salle. Pour autant, cet effort consenti par la filière cinématographique ne sera pas suffisant et la question fondamentale de la rémunération de la création à l’ère numérique reste entière.

Dans le contexte actuel d’érosion des recettes publicitaires sur tous les supports d’information et de communication, il ne nous semble pas suffisant d’encourager un modèle économique qui assoit une partie de la rémunération des auteurs sur le partage de recettes publicitaires de plus en plus incertaines.

Dans la foulée de l’introduction en bourse du plus célèbre moteur de recherche en 2004, quantité de sites se sont construits sur l’idée que leur totale gratuité d’usage pouvait être financée par toujours plus de publicité, les investissements des annonceurs étant répercutés, bien entendu, sur les consommateurs.

Or la crise actuelle modifie la donne et laisse clairement apparaître que le nombre de sites susceptibles de vivre de cette seule manne publicitaire est infiniment inférieur à ce que l’on avait pu imaginer.

N’oublions pas, madame la ministre, que le dispositif de la riposte graduée doit impérieusement être adossé à un mécanisme de régulation et de soutien de la création sur internet. Ce mécanisme reste à concevoir. Vous faites le pari que le succès supposé du système de la riposte graduée entraînera un report automatique des internautes sur les offres légales, payantes à l’acte, à l’abonnement ou faussement gratuites par le biais des recettes publicitaires. Très sincèrement, même si nous doutons que cela puisse être le cas, nous souhaitons que l’avenir vous donne raison.

Pour notre part, nous réitérons notre disponibilité pour participer, avec les auteurs et les internautes, à la recherche d’un système de régulation et de soutien à l’ensemble de la création sur internet permettant le respect du droit d’auteur tout en favorisant la diffusion culturelle pour le plus grand nombre.

Vous l’aurez compris, la position du groupe socialiste du Sénat n’a pas varié depuis le 9 avril dernier et, pour les raisons que je viens d’évoquer, nous pensons qu’il vous faut continuer à travailler pour développer la riposte graduée de manière à la rendre acceptable par tous, les artistes et leur public, tout en rendant les offres légales accessibles au plus grand nombre.

Afin de manifester son soutien indéfectible aux créateurs, le groupe socialiste du Sénat avait accepté de voter en faveur du projet de loi « création et internet » lors de son examen en première lecture.

Le retard pris par votre Gouvernement, madame la ministre, pour présenter ce projet de loi au Parlement, suivi de l’introduction d’un cavalier législatif prévoyant, de manière tout à fait contradictoire aux conclusions des États généraux de la presse, que la collaboration des journalistes dans une entreprise de presse est désormais multi-support, nous avait conduits à l’abstention sur le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire.

Aujourd’hui, nous regrettons profondément que le Gouvernement n’ait pas réussi à rassembler sa majorité à l’Assemblée nationale le 9 avril dernier pour voter le projet de loi HADOPI et mettre en œuvre rapidement les mesures nécessaires pour la protection du droit des auteurs sur internet.

Tout en renouvelant son soutien aux créateurs et à leurs droits, mais ne voulant pas jouer le rôle de supplétif d’une majorité parlementaire défaillante, le groupe socialiste du Sénat refusera donc aujourd’hui de participer au vote…

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