Madame la ministre, c’est un constat : depuis plus de trente ans, et particulièrement ces dix dernières années, les hôpitaux publics français s’inspirent du mode de gouvernance et de gestion des établissements privés lucratifs, et nous l’admettons.
Pour ceux qui dirigent les hôpitaux, il ne s’agit pas réellement d’un choix, car ils obéissent aux directives données par un pouvoir politique toujours plus préoccupé par la rentabilité et, d’une manière générale, par la diminution des dépenses publiques, donc des coûts hospitaliers.
Ce mouvement n’est pas propre à la France : il est européen. Il est logique, dès lors que l’on mesure ces réformes à l’aune des politiques libérales qui sont partout menées. D'ailleurs, M. About, président de la commission des affaires sociales, ainsi que M. Vasselle, qui suit les questions hospitalières, nous ont fait accomplir un véritable tour d’Europe pour nous permettre de connaître la situation de ces établissements.
Partout, émerge un principe nouveau : la corporate gouvernance, c'est-à-dire l’art de gouverner les établissements publics de santé comme des entreprises !
Pour mémoire, certains hôpitaux allemands, anciennement publics, sont aujourd’hui constitués sous forme sociétale. On constate également, partout en Europe, que certains services sont externalisés et que le secteur privé commercial se trouve associé au public dans différentes formules de coopération, quand on ne lui confie pas, tout simplement, la gestion à part entière d’un hôpital.
Pour appliquer votre politique de rigueur dans les hôpitaux, vous procédez à une décentralisation des régimes de santé et des services publics, comme en Allemagne, au Portugal ou en Angleterre, où a été menée une réforme du NHS, le National Health Service.
Toutefois, ce transfert, s’il vous permet de vous dégager de vos responsabilités, vous permet aussi, et c’est là tout votre talent, de renforcer le rôle du Gouvernement dans la gestion des hôpitaux et dans la diminution des dépenses : d'une part, vous comprimez les dépenses hospitalières et, d'autre part, vous jouez sur la gestion des risques qui, avec ce projet de loi, passe de l’UNCAM aux directeurs des agences régionales de santé, autant dire à votre administration, madame la ministre. Nous assistons à une étatisation régionalisée de la santé !