Intervention de Josiane Mathon-Poinat

Réunion du 10 février 2009 à 21h30
Application des articles 34-1 39 et 44 de la constitution — Exception d'irrecevabilité

Photo de Josiane Mathon-PoinatJosiane Mathon-Poinat :

Profitons du temps qui nous reste pour intervenir !

Le groupe CRC-SPG votera l’exception d’irrecevabilité que vient de présenter notre collègue Jean-Pierre Michel. Je souhaite rapidement appuyer sa démonstration par deux réflexions.

Premièrement, l’article 13 du projet de loi organique constitue une utilisation de la Constitution, et non pas son application. En effet, la Constitution n’oblige en rien à inscrire dans la loi organique des dispositions relatives au temps global de discussion, ce « 49-3 » parlementaire, cette autocensure du Parlement.

J’en veux pour preuve éclatante le fait que les groupes de travail chargés de réfléchir sur la réforme du règlement, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, n’ont, durant des semaines, nullement envisagé une telle disposition. C’est seulement avec la publication de l’avant-projet de loi organique que le débat s’est envenimé sur cette question.

La Constitution a été modifiée sur un point important : désormais, les amendements peuvent être adoptés en commission ou en séance publique. Rien n’empêche donc, selon la Constitution, des amendements en séance publique. On peut estimer que cette modification a pour but de favoriser la discussion en commission – nous ne le regrettons pas –, tout en respectant le droit constitutionnel de présentation de l’amendement, clairement affirmé par la décision du Conseil constitutionnel du 7 novembre 1990.

La question était alors de savoir si un amendement présenté en commission ne pouvait plus être défendu en séance, comme il était alors proposé au titre d’une modification du règlement du Sénat. Le Conseil constitutionnel avait alors estimé qu’une telle disposition ne respectait pas « l’exercice effectif du droit d’amendement ».

La révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 n’autorise qu’une seule chose : un amendement déposé et défendu en commission pourrait ne pas l’être en séance publique. Cette piste, qui avait été envisagée par certains, n’a pas été retenue : un amendement qui n’a pas été défendu en commission pourra tout de même l’être en séance publique.

L’article 13 du projet de loi organique est donc manifestement anticonstitutionnel puisqu’il ne respecte pas l’exercice effectif du droit d’amendement, principe qui conserve aujourd’hui toute sa valeur constitutionnelle, en ce qu’il empêcherait un amendement déposé en séance publique, et seulement en séance publique, d’être présenté.

Nous l’avons souvent entendu, le droit d’amendement de chaque parlementaire est imprescriptible et inaliénable, mais il doit également être effectif : l’amendement doit être présenté, débattu et soumis au vote, si des irrecevabilités n’ont pas été soulevées.

Deuxièmement, est-il envisageable que le règlement de l’Assemblée nationale, assemblée élue au suffrage universel direct, remette en cause le droit d’amendement en séance publique, alors que tel ne serait pas le cas au Sénat ?

Lors de son audition par la commission des lois pour préparer ce débat, le professeur Jean Gicquel a souligné, à deux reprises, l’impossibilité constitutionnelle qu’il y avait à envisager une différence entre les règlements des deux assemblées sur un point aussi crucial que celui du droit d’amendement.

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