Intervention de Yannick Bodin

Réunion du 5 décembre 2007 à 9h30
Loi de finances pour 2008 — Enseignement scolaire

Photo de Yannick BodinYannick Bodin :

Le Gouvernement invoque la liberté de choix des parents, le mérite, la volonté de l'enfant.

Cependant, faut-il rappeler l'évidence ? La liberté de choix produit bel et bien de l'inégalité. Que se passe-t-il ? Les enfants des familles informées, initiées, et quelques bons élèves boursiers vont rejoindre les établissements « de bonne réputation ». Quand les demandes seront trop nombreuses, ce sera la sélection, et, dans la plupart des cas, l'affectation, j'allais dire le retour, dans le lycée de la zone d'origine.

En fait, la coupure sociale se trouvera accentuée : d'un côté regroupement des meilleurs, de l'autre, ghettoïsation achevée des plus défavorisés.

Ce qu'il faut, monsieur le ministre, si vous voulez revenir sur la carte scolaire - cela peut être utile - c'est, au contraire, plus de mixité sociale. Il s'agit aussi d'accroître le nombre de personnels d'encadrement dans les collèges « ambition réussite ». Il n'y a pas d'autre méthode que l'accompagnement individualisé, personnalisé. Il faut donc un nombre plus important d'adultes auprès de ces élèves.

À côté de ce faux « libre choix », qui va concentrer tous les problèmes dans certains établissements sous pression, pour ne pas dire sous haute tension - sans parler du moral des professeurs affectés sur place - vous avez décidé, monsieur le ministre, de supprimer, purement et simplement, 11 200 emplois dans l'éducation nationale pour la seule année 2008.

Je dois pourtant rappeler que, dans aucun pays d'Europe, le nombre moyen d'élèves en classe de mathématique, à l'âge de quinze ans, n'est aussi élevé qu'en France. Il y est de vingt-sept élèves, alors que la moyenne des autres pays se situe entre vingt-quatre, au maximum, et dix-huit, au minimum.

Faut-il rapprocher ces chiffres de ceux qui viennent d'être révélés par la dernière enquête PISA - programme international pour le suivi des acquis des élèves - qui, même s'ils doivent être pris avec toutes les précautions de rigueur en cas d'enquêtes internationales, laissent cependant apparaître un nouveau recul du niveau de nos élèves ? Il y aurait ainsi une année de retard, notamment en sciences, entre les jeunes Finlandais et les jeunes Français.

Comment imaginer, face à de telles comparaisons, des suppressions supplémentaires de postes ? Ce choix politique est lourd de conséquences, et montre une fois de plus que la réduction des inégalités sociales ne pourra pas se faire à l'école.

De plus, la baisse de 16, 4 % des crédits d'action sociale compris dans le programme 230 « Vie de l'élève » est à ce titre inadmissible. De même, dans les crédits d'intervention, en 2008, les crédits destinés aux associations ne retrouvent même pas leur niveau de 2006.

Je passe à un autre sujet. Il est nécessaire, s'agissant de la généralisation de l'accompagnement éducatif entre seize heures et dix-huit heures, que des mesures soient mises en oeuvre pour accompagner les élèves qui en ont le plus besoin.

Vous décidez, monsieur le ministre, de vous en remettre au volontariat. Nous constatons, pour le moment du moins, que ne sont volontaires - ou ne sont d'abord volontaires - que les élèves qui ont le moins besoin de soutien. Il faut un encadrement et un tutorat forts pour les élèves qui en ont le plus besoin.

S'il est bon que cette mesure soit généralisée dans les collèges, il convient toutefois qu'elle le soit d'abord pour tous les élèves en difficulté. Cela exige de votre part un renforcement de l'encadrement, une présence plus importante et plus nombreuse des adultes, avant tout pour éviter que ces heures ne soient perçues par un certain nombre d'élèves comme des heures de punition ou des heures de colle. Il faudra bien accompagner ces élèves et leur expliquer.

Ce n'est donc vraiment pas le moment de supprimer des postes au budget de l'éducation nationale.

On ne peut qu'approuver le principe d'un dispositif qui fait de l'école son propre recours, au grand dam - c'est tant mieux ! - des officines de cours privés.

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