Monsieur le ministre, le projet de budget que vous présentez ne pose guère de problèmes en termes de moyens, et vous disposez largement de ce qui est nécessaire à la conduite des missions de votre ministère. Aussi les questions qui me semblent préoccupantes se limitent-elles aux performances de notre système d'enseignement.
D'enquête en évaluation, on ne cesse de souligner les résultats fort moyens, pour ne pas dire médiocres, de nos écoliers, tant pour la lecture et les sciences que pour les mathématiques. Cela confirme, hélas ! que l'éducation nationale est une machine à rendement décroissant : les moyens fournis sont de plus en plus importants, et les résultats ne suivent pas ; au contraire, ils régressent.
J'ai noté avec intérêt que, face à ces difficultés, vous aviez adopté une démarche pragmatique qui évitait les débats idéologiques, notamment sur les problèmes pédagogiques : on ne peut que vous approuver, car l'éducation nationale, à la différence d'autres secteurs, a non seulement une obligation de moyens, qui est satisfaite, mais aussi une obligation de résultats ; là, nous sommes loin du compte !
Aussi, je souhaite savoir où en est l'application de la réforme de la formation des maîtres et des IUFM, les instituts universitaires de formation des maîtres. Si cette réforme est effective, les nouveaux enseignants ont-ils la garantie d'échapper aux injonctions pédagogiques souvent fumeuses que l'on a connues dans le passé ?
La question des rythmes scolaires, sur laquelle il n'y a pas de vérité absolue, mérite d'être approfondie. En effet, la généralisation de la semaine de quatre jours peut poser de grandes difficultés aux familles les plus modestes. De même, son application doit être accompagnée d'une évaluation des coûts induits pour les départements, notamment en matière de transports scolaires - puisque les lycées, eux, continueront de fonctionner six jours par semaine -, et pour les communes, en particulier pour l'accueil en dehors du temps scolaire. Une telle modification paraît aussi appeler une redéfinition des missions des enseignants et de leurs services, avec les éventuelles conséquences sur les affectations et sur les rémunérations.
La réforme de la carte scolaire sera-t-elle poussée plus loin ? À mon sens, il le faudrait.
De même, il est nécessaire de revoir le saupoudrage des moyens dans les zones d'éducation prioritaires. En effet, les zones définies sont devenues permanentes : on entre dans le dispositif, et l'on n'en sort plus. Il est probable que la définition actuelle est trop large, ce qui conduit à attribuer des moyens trop limités qui ne permettent pas de corriger les faiblesses les plus criantes constatées chez les élèves.
Le dernier point que je souhaite soulever concerne la situation de l'enseignement privé. Le maintien d'un parallélisme inadapté entre public et privé pénalise fortement ce dernier : pourquoi supprimer des postes dans l'enseignement privé alors que ses effectifs sont en augmentation ? Ne pourrait-on pas adopter d'autres règles ? Qu'est-ce, en effet, qu'une liberté dont les moyens ne sont pas assurés ? C'est d'ailleurs l'intérêt des jeunes et de leurs familles qui serait ainsi préservé, puisque les évaluations que j'ai évoquées au début de mon propos montrent que les résultats du privé sont supérieurs, alors que ses moyens sont inférieurs.