Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en préambule, je souhaite tout d'abord souligner que la mission « Sécurité » constitue, depuis la mise en oeuvre de la LOLF, l'un des exemples les plus aboutis de travail interministériel.
La création des groupes d'intervention régionaux, les GIR, composés à parité de policiers et de gendarmes, constitue probablement l'une des réussites les plus probantes sur le terrain.
Du point de vue logistique, la mise en commun de moyens se concrétise, elle aussi, de plus en plus fréquemment, par des soutiens croisés entre la police et la gendarmerie, ainsi que par la passation de marchés publics communs pour la réalisation de divers équipements.
Les progrès sur la voie de l'interministériel sont réalisés non pas au détriment des identités respectives des deux forces, mais dans le respect de leurs spécificités.
La mission « Sécurité » est dotée de 15, 9 milliards d'euros de crédits de paiement, soit une augmentation de 1, 8 % par rapport à l'exercice précédent. Les dépenses en personnel en constituent l'essentiel, avec 13, 4 milliards d'euros, soit 84, 6 % de l'ensemble des crédits de paiement.
Je tiens cependant à rappeler que les moyens supplémentaires ne constituent pas une fin en soi. Ils ne se conçoivent que dans un souci de performance et d'efficacité.
La baisse de la délinquance, sous toutes ses formes, constitue certainement le premier objectif de la mission. De ce point de vue, on observe, en 2007, un recul de la délinquance, compris entre 1 % et 2 %, en zone police comme en zone gendarmerie. Au total, le nombre de crimes et délits constatés est passé de 3 775 838 en 2005 à 3 725 588 en 2006, soit une baisse de 50 250 faits constatés.
Parallèlement, le taux d'élucidation global a enregistré une progression sensible en 2006, pour atteindre 31, 6 % en zone police et 41, 4 % en zone gendarmerie.
Les tout récents épisodes de violences urbaines, à Villiers-le-Bel, viennent toutefois rappeler l'importance d'une réflexion pragmatique sur la police de proximité.
Longtemps moins efficace, car s'en tenant à une vision trop dogmatique, la police a dû s'adapter et répondre au plus près aux attentes des populations et des élus, au premier rang desquels les maires.
Appuyons-nous sur les faits pour évaluer la police de proximité. L'expérience a démontré que la police ne peut ni se confondre avec l'animation sociale ni se réduire à un îlotage statique trop passif, comme ce fut le cas jusqu'en 2002.
Je souligne, cette année encore, le coût en personnel des escortes et des gardes de détenus par la police et la gendarmerie : ces opérations doivent être soit assurées par l'administration pénitentiaire, soit facturées à cette dernière.
Je veux insister sur la dimension internationale - par le biais du service de coopération technique internationale de police, le SCTIP -, car elle est essentielle à cette mission.
Le savoir-faire, l'expérience et la maîtrise technologique des forces de sécurité françaises constituent un atout à valoriser dans le contexte international. En effet, la coopération en matière de sécurité permet souvent de traiter certains problèmes en amont et elle constitue un moyen d'inciter des pays dont les méthodes de maintien de l'ordre sont d'une autre époque à traiter ces problèmes de façon adaptée et à mettre ainsi en place des pratiques mises en oeuvre par les démocraties. De surcroît, cette coopération, lancée par le SCTIP, améliore l'image de ces pays et leurs relations internationales.
Le programme « Police nationale » comporte 8, 4 milliards d'euros en crédits de paiement, soit une hausse de 2, 3 %.
La création du ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement s'est accompagnée du transfert des crédits relatifs à l'éloignement des étrangers en situation irrégulière et à la rétention administrative - fonctionnement des centres et locaux de rétention administrative, fonctionnement des zones d'attente, dépenses de laissez-passer consulaires, frais d'interprétariat, ou autres - vers le programme « Immigration et asile » de la mission « Immigration, asile et intégration » nouvellement créée. Le montant de ces crédits s'élève à 65, 4 millions d'euros.
Le plafond d'emplois de ce programme est fixé à 148 565 emplois équivalents temps plein travaillé en 2008, soit une réduction de 1 253 ETPT par rapport à 2007.
Au regard des effectifs, le taux de réalisation de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, la LOPSI, est satisfaisant. Il atteint 95, 4 % avec 6 200 emplois créés, dont 4 200 emplois de fonctionnaires actifs.
Globalement, on constate une sur-réalisation de la LOPSI au regard des crédits de fonctionnement et d'équipement, avec un taux de réalisation de 163 %, et une sous-réalisation de la LOPSI au regard des dépenses d'investissement, avec un taux de réalisation est de 80 %.
Une enveloppe de 18, 8 millions d'euros vise à couvrir les aspects indemnitaires de la réforme des corps et des carrières de la police nationale, notamment à accompagner le passage des officiers de police à un régime de cadre.
L'apurement du stock des heures supplémentaires, évalué à 5, 2 millions d'heures, s'intègre dans la politique qui vient d'être définie par le Président de la République. Pour parvenir à cet objectif, le choix a été laissé aux officiers entre un paiement de ces heures, dans une limite de cent heures en 2007 et 2008, ou une récupération du temps de travail : 47 %, ont opté pour le paiement des heures.
En outre, l'année 2008 sera marquée par la fusion de la direction de la surveillance du territoire, la DST, et de la direction centrale des renseignements généraux, la DCRG, dans une direction centrale du renseignement intérieur, la DCRI. Cette rationalisation est souhaitée depuis longtemps.
Alors que le ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales envisage de recourir de manière accrue à la vidéosurveillance, on ne peut qu'approuver le développement de cette technologie, dès lors que son déploiement est respectueux des droits et des libertés individuelles. Mais il faut insister sur le rôle majeur qu'elle a joué, par exemple, dans l'élucidation des attentats commis à Londres en 2005 et dans la réactivité des forces de police anglaises face aux tentatives d'attentats.
Le programme « Gendarmerie nationale » comporte 7, 4 milliards d'euros de crédits de paiement, soit un léger recul, de 0, 58 %.
Le plafond d'emplois s'élève, quant à lui, à 101 136 ETPT, en diminution de 965 ETPT par rapport à 2007.
Le présent projet de loi de finances est donc placé, pour la gendarmerie, sous le signe du maintien de l'effort budgétaire et il s'inscrit dans la politique générale de maîtrise des dépenses de l'État.
Si certaines interrogations ont récemment pu se faire jour au sujet du maintien du statut militaire de la gendarmerie, ce dernier n'est cependant pas remis en cause et semble préserver son attractivité. Un équilibre relativement satisfaisant a été atteint entre le statut de la police et celui de la gendarmerie, comme semble en témoigner le retour dans la gendarmerie de six gendarmes sur les sept qui étaient partis l'année dernière dans la police nationale.
Pour autant, il conviendra de se montrer vigilant dans les mois à venir sur la situation morale des gendarmes. Une dégradation sensible de leur moral est perceptible, en dépit des efforts budgétaires réalisés au cours des dernières années ; elle a certainement pour origine la disponibilité permanente des gendarmes. La qualité des logements mis à leur disposition, en compensation notamment de cette disponibilité, constitue un moyen pour atténuer, voire gommer les tensions observées.
L'exécution de la LOPSI a, par ailleurs, permis une remise à niveau de la gendarmerie nationale et son taux de réalisation finale en matière d'emploi s'élève à 86, 4 %.
Au cours de l'exécution de la LOPSI, le fonctionnement courant, tel que les dépenses d'informatique, les uniformes, les armes, en bref tout ce qui était indispensable, a été privilégié au détriment de l'investissement.
Un tel arbitrage préjudiciable peut aussi s'expliquer par la nécessité d'apurer, sur la période de programmation, un stock de dettes relatives au paiement des loyers pour les casernes, le poids de ce poste de dépense s'étant par ailleurs trouvé mécaniquement alourdi par la tendance à la hausse des prix de l'immobilier au cours des dernières années.
Un aspect important de ce programme doit, en outre, être souligné : plus de 70 % du parc domanial de la gendarmerie a dépassé les vingt-cinq années d'existence. Ce parc souffre aujourd'hui d'un niveau de vétusté en décalage avec le parc des collectivités locales ou le parc locatif hors casernes et nécessite une remise à niveau.
À cet égard, le financement du développement et de la modernisation du parc immobilier de la gendarmerie s'appuie de manière croissante sur les partenariats public-privé, via le recours à des opérations sur bail emphytéotique administratif. S'il présente de nombreux avantages, ce mode de financement induit néanmoins un surcoût lié à la prime de l'opérateur privé, d'autant plus élevée que la concurrence est réduite dans ce secteur.
Enfin, l'exercice des missions militaires hors du territoire continental de la métropole pèse significativement sur la disponibilité de la gendarmerie mobile. Au 1er juillet 2007, la gendarmerie nationale déployait ainsi 502 militaires en opérations extérieures, les OPEX, dont un escadron de gendarmerie mobile au Kosovo, pour un coût total en 2007 de 7, 8 millions d'euros, et deux escadrons en République de Côte d'Ivoire, pour un coût de 6, 6 millions d'euros.
Considérant ce bilan comme plutôt satisfaisant, la commission des finances propose au Sénat l'adoption des crédits de la mission « Sécurité » et de chacun de ses programmes.