Intervention de Michèle Alliot-Marie

Réunion du 5 décembre 2007 à 15h30
Loi de finances pour 2008 — Administration générale et territoriale de l'état

Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales :

Monsieur le président, monsieur le rapporteur spécial, monsieur le rapporteur pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, s'agissant de la mission « Administration générale et territoriale de l'État, ce projet de budget soumis à votre approbation répond à deux idées fortes : le respect des objectifs de la mission et la modernisation de l'action de l'État en vue de sa plus grande efficacité.

Je commencerai par le respect des objectifs qui sont fixés dans cette mission.

Ces objectifs découlent naturellement des nouveaux périmètres ministériels tels qu'ils ont été définis au printemps dernier. Je n'y reviendrai que brièvement.

Je rappelle simplement quelques adaptations qui s'imposent à la mission.

La première est la création du ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement. Une partie des attributions, et donc des personnels, du ministère de l'intérieur seront mis à disposition du nouveau ministère. Ce rattachement n'entraîne pas de modification statutaire pour ces agents. Une convention de gestion réglera les relations entre les deux ministères.

La seconde adaptation est le rattachement de l'outre-mer à l'intérieur, qui devient ainsi le responsable gouvernemental unique en charge de tous les territoires français, qu'ils soient métropolitains ou non. Ce rattachement va conduire à une réorganisation des services pour lesquels, avec Christian Estrosi, j'ai demandé à la secrétaire générale de l'administration d'affiner le nouvel organigramme administratif.

En ce qui concerne les actions à mener au sein du périmètre, deux objectifs principaux méritent d'être soulignés : d'une part, la délivrance des titres sécurisés et, d'autre part, certaines modalités d'exercice de la vie démocratique. Vous y avez, les uns et les autres, fait référence. Je reviendrai sur les autres objectifs par la suite.

S'agissant de la délivrance des titres sécurisés, M. Balarello m'a interrogée sur le calendrier. Le 17 décembre, j'installerai le conseil d'administration de l'Agence nationale des titres sécurisés à Charleville-Mézières. L'agence porte une responsabilité majeure, puisqu'il s'agit de délivrer, conformément à nos engagements internationaux, les passeports biométriques d'ici à l'été 2009.

D'autres titres sécurisés s'ajouteront aux passeports. Je pense notamment à la carte d'identité et au nouveau système d'immatriculation à vie des véhicules, dont l'entrée en application est prévue le 1er janvier 2009.

Monsieur Sueur, j'ai bien noté vos remarques et vos suggestions. Je suis prête à prendre un certain nombre d'initiatives en direction des entreprises qui travailleront dans ce domaine. Ce pourrait être une belle illustration de la véritable politique que nous pourrions mener en matière d'intelligence économique afin de défendre des entreprises et des secteurs sensibles. Nous avons là une vraie possibilité de travailler.

Pour le contentieux indemnitaire, que M. le rapporteur spécial a évoqué, je tiens à indiquer à la Haute Assemblée que je suis actuellement en train de rechercher le bon texte et le bon support pour proposer au Parlement un article qui donnera une base légale aux prestations des communes et qui permettra de régler, d'une façon équitable et définitive, la question financière.

Le second objectif majeur de cette mission concerne les modalités d'exercice de la vie démocratique.

Je n'évoquerai pas aujourd'hui le redécoupage des circonscriptions législatives, qui débutera au printemps prochain, après les élections municipales pour ne pas créer de perturbations. Naturellement, le Sénat sera soigneusement associé à ce travail.

Pour l'heure, je soulignerai deux aspects.

Le premier concerne l'évolution des dépenses liées aux élections. Dans le cadre actuel de la réglementation, le problème est d'abord financier. Il faut bien noter que les besoins de financement en 2007, cela a été dit, ont dépassé d'environ 65 millions d'euros l'enveloppe budgétaire. L'augmentation du nombre des votants, du vote par procuration, et le coût de l'acheminement de la propagande peuvent expliquer ce phénomène, mais ce ne sont pas les seules raisons.

En effet, une réalité s'impose : les prestations qui ont été fournies par certains opérateurs obligés dans le processus de distribution des documents coûtent cher, beaucoup plus cher, peut-être beaucoup trop cher. Ce constat m'a d'ailleurs conduit à saisir Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi pour qu'elle interroge le Conseil de la concurrence sur les suites éventuelles qu'il convient d'envisager dans ce domaine.

Le second aspect que je souhaitais évoquer, ce sont les machines à voter. Lors des dernières élections, au printemps, un certain nombre de questions ont été posées. J'en ai d'ailleurs parlé directement avec quelques-uns d'entre vous. Je n'ai pas de réponse immédiate à vous apporter, mais j'ai constitué un groupe de travail afin qu'il examine, point par point, la nature exacte des questions et qu'il imagine, le cas échéant, les solutions, en liaison étroite avec l'Association des maires de France et le Conseil d'État.

Les conclusions doivent m'être rendues le 15 décembre, ce qui nous permettra de mettre en oeuvre les recommandations pour les prochains scrutins du mois de mars.

La deuxième idée forte de ce budget, c'est la modernisation et l'efficacité de l'État dans sa présence territoriale.

Yann Gaillard nous a parlé, dans un très beau développement, de l'évolution de la conception et de l'action de l'État. Face à des collectivités territoriales puissantes et bien ancrées dans les territoires, l'État doit parler d'une voix forte et unique. Nos concitoyens, comme les collectivités, ont besoin de l'autorité de l'État, une autorité légitime, forte et objective.

Cette voix forte doit aussi aider et conseiller les communes les plus faibles. Le préfet a un rôle important, notamment pour les petites communes ou les communes fragiles. Il est donc important qu'il apparaisse, notamment pour les communes souvent confrontées à des positions ou à des réglementations différentes des administrations, comme le patron - sauf exception - des services territoriaux de l'État, un patron qui sait être à l'écoute de ses interlocuteurs.

Monsieur le rapporteur spécial, mon point de vue sur la carte des arrondissements est très clair - je rejoins là une préoccupation de Mme Josiane Mathon-Poinat. Appliquer le seul critère démographique, si l'on veut modifier la situation, c'est ignorer totalement la réalité de terrain. Personnellement, je connais cette réalité. Ce que nos concitoyens attendent de l'État, c'est qu'il apporte une réponse, et une réponse utile, aux besoins. Cette réponse est plus utile dans des vallées de montagne que dans les banlieues des grandes villes, où existent les services nécessaires et où s'exerce toute la force d'une grande préfecture.

Certes, des ajustements sont nécessaires, parce que la situation n'est pas la même qu'il y a un siècle et demi. Mais ils peuvent heurter l'opinion de certains. Selon moi, la présence de l'État est encore plus utile dans les territoires ruraux, peu habités, ou en zone de montagne que dans les secteurs urbains où la population est très dense et où un certain nombre de structures, notamment préfectorales, existent déjà.

Il est évident que cette réponse et cette présence de l'État doivent être adaptées aux attentes et aux méthodes d'aujourd'hui. Sans attendre les décisions que prendra dans quelques semaines le chef de l'État en présidant le Comité de modernisation, le projet de budget que je vous présente s'inscrit dans cette perspective de modernisation et d'efficacité que j'appelle de mes voeux.

Cela se traduit de différentes façons.

D'une part, le regroupement au niveau départemental des crédits de fonctionnement de l'ensemble des services déconcentrés sera expérimenté dans plusieurs départements. J'attends de cette expérience une meilleure mutualisation des moyens et une gestion évitant les doublons.

D'autre part, je généraliserai la régionalisation des budgets opérationnels des préfectures dans toute la métropole, à l'exception de l'Île-de-France. Il s'agit d'une réforme ambitieuse, et lorsqu'on s'y engage, il est important de s'assurer qu'elle soit intégrée par tous, notamment par les personnels concernés, du directeur au collaborateur représentant l'échelon administratif de base.

C'est pourquoi, afin d'établir ce lien, j'ai tout particulièrement tenu à respecter les engagements pris par mes prédécesseurs en matière de situation des personnels : requalification des emplois, fusion des corps techniques, revalorisation du régime indemnitaire. En tant que juriste - j'étais même au départ professeur de droit -, j'estime que celui qui ne possède pas de formation juridique peut parfaitement assimiler ces connaissances, d'autant que dans la qualification juridique requise dans les préfectures et sous-préfectures il y a tous les niveaux. La formation, y compris la formation permanente, est un élément important, je le disais tout à l'heure, de la promotion professionnelle et sociale.

Tout en respectant la règle du non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux, j'ai revendiqué le respect de la règle concernant le taux de retour des économies de masse salariale en mesure indemnitaires et catégorielles.

Monsieur Sueur, je ne peux pas être totalement en désaccord avec vous lorsque vous dites que l'on impose toujours plus de charges à certains tandis que l'on réduit le nombre de personnels, ce qui est exact puisque, je viens de vous le dire, la règle est le non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux. Il y a là un beau sujet pour la révision générale des politiques publiques, la RGPP.

Comme je l'ai constaté sur place dans un certain nombre de préfectures, l'utilisation de technologies nouvelles, notamment la nette dématérialisation de certaines procédures et de certains TIP, est aussi une source d'économie de travaux sans grand intérêt, purement matériels, effectués par des personnels. Là réside une partie de la réponse.

J'ai voulu associer les personnels des préfectures et des sous-préfectures en recueillant, par voie de questionnaires individuels, leurs propres suggestions sur l'amélioration concrète du service au public. En discutant avec eux, un certain nombre de mesures de bon sens extrêmement intéressantes me sont apparues. J'ai souhaité que ce soit aussi leur réforme.

Par ailleurs, s'agissant des cultes et de l'application des recommandations de la commission Machelon, je dirai tout d'abord que je ne souhaite pas rouvrir la discussion sur la loi de 1905.

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