Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, lors du débat sur les recettes des collectivités territoriales, le 27 novembre dernier, j'ai eu l'occasion d'aborder l'évolution des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales, la compensation financière des transferts de compétences et la question de la maîtrise des finances locales.
J'évoquerai donc aujourd'hui trois points : la place des concours financiers aux collectivités dans l'architecture budgétaire globale, les conséquences des normes communautaires et les aides économiques des collectivités aux entreprises.
Sur le premier point, on observera que les relations financières entre l'État et les collectivités territoriales, qui excèdent le champ d'une seule mission, n'ont pas encore trouvé de place vraiment adéquate au sein de l'architecture budgétaire définie en application de la LOLF : près des trois quarts des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales prennent la forme de prélèvements sur recettes et figurent dans la première partie du projet de loi de finances, tandis que la mission dont nous examinons ce soir les crédits ne retrace que les dotations inscrites au budget du ministère de l'intérieur, dont le montant atteint 2, 2 milliards d'euros, contre 3 milliards d'euros en 2007.
Je vous rassure tout de suite, mes chers collègues : cette baisse résulte avant tout d'une modification du périmètre de la mission. En effet, la dotation départementale d'équipement des collèges, ou DDEC, et la dotation régionale d'équipement scolaire, ou DRES, qui figuraient en 2007 au sein de cette mission, deviennent des prélèvements sur recettes. En outre, les crédits de rémunération de la direction générale des collectivités territoriales sont transférés à compter de 2008 vers la mission « Administration générale et territoriale de l'État ». Finalement, les crédits de la mission ne représentent plus que 3 % des dotations de l'État.
Aussi notre collègue Michel Mercier, rapporteur spécial de la commission des finances, en propose-t-il la suppression. De fait, l'État n'a aucun pouvoir de décision pour 75 % des crédits de la mission, qui sont constitués de dotations dont l'évolution et la répartition au sein de chaque catégorie de collectivités territoriales sont définies par la loi. Les modifications réduisant le périmètre de la mission devraient donc logiquement, à terme, aboutir à sa suppression.
Sur le deuxième point, on soulignera à quel point les conséquences des normes communautaires sur le fonctionnement des collectivités territoriales montrent, à l'approche de la présidence française de l'Union européenne, la nécessité d'associer les collectivités à l'élaboration de ces mêmes normes.
Ainsi, première illustration, les relations entre les collectivités territoriales et leurs sociétés d'économie mixte, les SEM, ont été affectées par des évolutions de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes relative au droit de la concurrence. Certes, la loi du 20 juillet 2005 relative aux concessions d'aménagement a modifié notre droit interne pour l'adapter au droit européen. Toutefois, la Cour de justice de Luxembourg a remis en cause une nouvelle fois la compatibilité du droit français avec le droit communautaire par un arrêt du 18 janvier 2007 dans lequel elle estimait qu'une convention d'aménagement était un marché de travaux.
La seconde illustration est offerte par la mutualisation des moyens des établissements publics de coopération intercommunale, les EPCI, et des communes qui en sont membres. La Commission européenne a adressé à la France, le 27 juin 2007, un avis motivé considérant que les conventions de mise à disposition de services entre communes et EPCI doivent respecter des procédures de marchés publics conformes aux directives du 31 mars 2004. Répondant à la Commission, la France a réaffirmé que les mises à disposition de services des communes membres vers les EPCI ne méconnaissaient pas les directives relatives aux procédures de passation des marchés publics.
Ces deux exemples montrent que, à l'évidence, les conséquences de la législation européenne sur les collectivités territoriales ne sont pas encore suffisamment prises en compte dans le processus de préparation des normes européennes.
Qu'envisagez-vous de faire, madame la ministre, pour parvenir à une meilleure prise en considération des intérêts et des positions des collectivités territoriales dans les négociations européennes ?
Je souligne que le Sénat, représentant des collectivités territoriales de la République, est appelé à jouer un rôle dans la prise en compte des intérêts des collectivités dans l'élaboration des textes communautaires. C'est l'un des aspects de la montée en puissance du suivi des affaires européennes que met en oeuvre la commission des lois, suivant les recommandations formulées par nos collègues Patrice Gélard et Jean-Claude Peyronnet à l'issue de leur mission d'information dans les Parlements européens, à laquelle, avec plusieurs autres sénateurs, j'ai également participé.
Enfin, madame la ministre, je souhaite vous interroger sur le troisième point : les interventions économiques des collectivités territoriales, qui se développent fortement depuis 2004.
Dans un récent rapport thématique, la Cour des comptes évoque les difficultés liées à l'éclatement et au manque de coordination des dispositifs d'intervention, et nous en sommes tous conscients : l'évaluation et le suivi des aides accordées par les collectivités aux entreprises paraissent donc indispensables pour assurer leur efficacité. La Cour souligne en outre le rôle spécifique des communes et des régions dans la création d'un environnement propice à l'accueil des entreprises.
Envisagez-vous, madame la ministre, de revoir les dispositifs d'intervention économique des collectivités pour en renforcer la cohérence ?
Je vous remercie par avance, madame la ministre, des réponses que vous voudrez bien apporter.