Intervention de Michelle Demessine

Réunion du 31 janvier 2007 à 10h20
Droit opposable au logement — Article 3

Photo de Michelle DemessineMichelle Demessine :

Comme vient de le dire mon collègue Jack Ralite, la question abordée par cet amendement est loin d'être secondaire. Il s'agit des suites données à l'examen des demandes par les tribunaux administratifs dans les procédures contentieuses engagées par les demandeurs de logement dont la situation aura été reconnue comme prioritaire par les commissions de médiation.

Posons la question soulevée par cet amendement : l'hébergement dans une structure d'accueil, fût-elle adaptée, donnera-t-il les garanties du droit au logement opposable ? C'est justement parce que l'hébergement ne peut être assimilé au droit au logement que nous ne pouvons accepter que les solutions proposées par l'article 3 soient traitées sur un pied d'égalité !

Le droit au logement opposable est un droit de portée et de sens universel, supposant la prise en compte de l'intérêt général, alors que l'hébergement n'est qu'un devoir de la collectivité à l'égard de l'un de ses membres.

L'hébergement, c'est la réponse circonstanciée, individualisée, à une situation d'urgence anormale.

Le droit au logement n'a de sens que s'il est conçu comme un droit collectif, vécu et assumé collectivement, comme l'expression de l'intérêt général trouvant sa déclinaison particulière au profit de chacun des membres de la collectivité.

Les commissions de médiation, comme les tribunaux administratifs qui seraient saisis de l'appréciation de l'opposabilité, ont pour unique vocation d'inscrire le droit au logement dans le parcours résidentiel des intéressés, parce qu'il y va de l'intérêt général. On ne peut se satisfaire d'une solution d'hébergement qui pourrait se retourner, de fait, contre les demandeurs puisqu'il y a fort à parier que la mise en oeuvre de l'hébergement au profit d'un requérant conduirait à l'extinction de la procédure.

Or, cette hypothèse n'est pas recevable au regard de l'objectif que nous cherchons à atteindre, à savoir la sécurisation des parcours résidentiels qui ne peut procéder que du droit au logement opposable.

Le dispositif de l'article 3 présente un autre défaut, sur lequel nous reviendrons plus longuement : celui de solliciter les tribunaux administratifs, c'est-à-dire, concrètement, d'assimiler le non-respect du droit au logement au seul dérèglement de la procédure administrative.

Il souffre également d'une limite : le droit au logement ne peut avoir de sens si toutes les possibilités de logement offertes par la « boîte à outils » de nos dispositions législatives en vigueur ne sont pas mises en oeuvre d'une manière plus significative.

La réquisition simple ou la réquisition avec attributaire, par exemple, telles que définies par les dispositions du titre IV du livre VI du code de la construction et de l'habitation, peuvent constituer l'un des leviers de satisfaction de la demande de logement, urgence et priorité confondues.

De même, la sollicitation d'autres contingents d'attribution de logements sociaux que ceux du seul contingent préfectoral peut faire partie des solutions que nous pouvons attendre des juridictions saisies.

Enfin, la saisine de la juridiction administrative présente le risque de masquer, aux yeux du demandeur, les causes réelles et sérieuses du mal-logement, qui ne relèvent pas uniquement d'un problème de gestion de contingents d'attribution.

Pour toutes ces raisons, nous vous invitons à adopter cet amendement.

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