Deuxièmement, il faut développer la formation des acteurs de la lutte contre les violences au sein du couple.
Les auditions l'ont confirmé : les médecins ont parfois été réticents à aborder ces problèmes au cours de leur formation. Il semble en outre que la formation médicale continue devrait être privilégiée par rapport à la formation initiale, car le dépistage des violences requiert une grande maturité professionnelle et humaine.
La formation des policiers et des gendarmes a connu de réels progrès, mais il convient de combler d'éventuels écarts entre la théorie de la formation dispensée et la réalité constatée sur le terrain. Je pense, par exemple, au nombre de fonctionnaires ayant effectivement suivi une formation.
Un effort accru devrait également être porté en direction des magistrats, qui seraient davantage sensibilisés à la problématique des violences au sein du couple.
Enfin, contrairement à d'autres pays comme le Canada, il n'existe en France quasiment pas de structures permettant d'accueillir les hommes violents, structures dans lesquelles ceux-ci pourraient engager une réflexion sur leur comportement.
Troisièmement, la question de l'hébergement des victimes est centrale. La loi relative au divorce du 26 mai 2004 a introduit une disposition au troisième alinéa de l'article 220-1 du code civil permettant d'évincer du domicile conjugal l'époux violent, alors que, paradoxalement, la victime devait, dans la très grande majorité des cas, quitter le domicile conjugal pour sa sécurité et celle de ses enfants, se retrouvant ainsi en situation de précarité. Une telle mesure pourrait être étendue aux autres formes de couple, concubinage et PACS.
En outre, les logements sociaux - en tant qu'ancien président de l'office départemental d'HLM de la Charente-Maritime, je parle en connaissance de cause ! - seraient en nombre insuffisant pour répondre aux besoins de relogement des victimes.
Quatrièmement, il faut se pencher sur le sort des enfants. Les violences au sein du couple ont forcément de graves conséquences sur l'éducation des enfants. Ils sont souvent traumatisés et leurs résultats scolaires s'en ressentent. Parfois, ils sont aussi les « victimes collatérales » des agressions visant leurs mères ou sont placés au centre d'une relation de chantage. Dans certains cas, suivant l'« exemple » de leur père, ils peuvent même devenir violents à leur tour et agresser leur mère. J'ai récemment eu le témoignage d'une situation semblable.
D'une manière générale, on ne peut s'étonner de la violence juvénile dans les cités, à l'école ou dans la vie privée quand 10 % des femmes sont victimes de violences conjugales. Une telle situation entraîne bien souvent une reproduction mimétique de la violence.
Cinquièmement enfin, la bataille contre les violences au sein du couple ne pourra être remportée sans un changement des mentalités. Il faudrait déconsidérer les hommes qui frappent leur femme, un peu comme ont été déconsidérés, avec des résultats tangibles, les personnes qui commettaient des excès de vitesse avec de graves conséquences. Une telle stigmatisation a porté ses fruits ! Une grande campagne d'information, conduite avec l'ensemble des partenaires, paraît donc indispensable.
La délégation a adopté dix-huit recommandations, dont certaines visent des modifications législatives, comme le relèvement à dix-huit ans de l'âge du mariage pour les jeunes filles. Nous aborderons cet important problème par voie d'amendements. Ma collègue Joëlle Garriaud-Maylam a d'ailleurs déposé en ce sens une proposition de loi relative à l'harmonisation de l'âge minimal du mariage pour l'homme et pour la femme que j'ai cosignée.
Je ne peux que me réjouir de ce que la délégation et la commission des lois soient tombées d'accord sur les points suivants : sur l'extension au partenaire d'un PACS de la circonstance aggravante en cas de violences commises par le conjoint ou le concubin de la victime ; sur l'aggravation des peines pour les violences commises par les « ex », anciens conjoints, anciens concubins et anciens pacsés ; sur l'introduction dans le code pénal du viol au sein des couples ; sur un dispositif d'éloignement du conjoint violent du domicile du couple.
Je conclurai en insistant sur la nécessité pour le Gouvernement, compte tenu de l'importance de l'enjeu, de réserver au Parlement la primeur de la présentation des résultats de la politique engagée.
Madame la ministre, je veux vous rendre hommage pour le travail que vous accomplissez avec énergie, avec conviction et, souvent, avec des moyens insuffisants.