Ma seconde observation est liée au nombre d’années qui s’écoulent entre deux modifications de la carte électorale : l’ajustement qu’il vous est proposé de valider est le douzième découpage depuis l’instauration du scrutin majoritaire uninominal en 1815 ; vingt-neuf chambres sur quarante et une ont été élues selon ce mode de scrutin auquel les Français sont très attachés.
Pour chacune de ces douze opérations, le débat s’est cristallisé entre les partisans de l’équilibre démographique optimal, quitte à susciter des soupçons, voire des polémiques, sur les choix retenus dans la délimitation des circonscriptions pour y parvenir, et ceux des circonscriptions administratives traditionnelles, le canton ou, pendant très longtemps, l’arrondissement, pour éviter les conflits, mais au risque d’un déséquilibre plus important dans les populations des circonscriptions, comme c’était le cas sous la IIIe République, qui conserva pendant soixante ans 40 % des circonscriptions.
Nous ne pouvons échapper à une réflexion sur la façon de concilier au mieux, à l’avenir, l’équilibre démographique, les entités géographiques, une rigoureuse équité politique et la nécessité d’un ajustement périodique : la méthode du recensement glissant mise en place par la loi de 2002 pourrait, en effet, nous conduire à effectuer des ajustements permanents de notre carte électorale.
Le président de la commission des lois de l’Assemblée nationale s’est récemment préoccupé d’éviter une automaticité de ces modifications, impossible en pratique compte tenu de la difficulté de la tâche et de la nécessaire stabilité minimale des secteurs d’élection.
Il me semble – il vous appartiendra d’en débattre, car cela concerne aussi la répartition de vos sièges entre les départements – que l’on pourrait confier à la commission indépendante de contrôle le soin de faire un rapport, tous les dix ans par exemple, pour signaler les écarts de population les plus importants apparus dans les répartitions existantes. On pourrait d’ailleurs envisager, comme pour les commissions de délimitation en Grande-Bretagne ou la commission des circonscriptions en Allemagne, d’attribuer une compétence plus large à la commission que le Premier ministre a mise en place en avril dernier.