Nous sommes parvenus à des situations ubuesques où le poids du vote d’un électeur, pour ne parler que de la métropole, n’a pas la même valeur selon son lieu d’habitation.
En prenant les deux extrêmes, le vote d’un électeur de la 2e circonscription de la Lozère, qui compte 35 000 habitants, pèse six fois plus que celui d’un électeur de la 1re circonscription du Val-d’Oise, qui totalise 188 000 habitants. Lorsqu’on sait que des élections se jouent parfois à quelques voix, et qu’une majorité parlementaire peut être ténue, on comprend aisément où se situe le problème.
Un nouveau redécoupage des circonscriptions était donc devenu indispensable, d’autant plus que deux recensements généraux sont intervenus depuis lors, en 1990 et en 1999.
Le Conseil constitutionnel, par ailleurs, juge de l’élection des députés, n’avait pas manqué d’attirer solennellement l’attention du Gouvernement sur ce point, d’abord en 2005, puis, de nouveau, en 2007, lors de l’examen du projet de loi organique visant à créer les collectivités de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin.
Sans nécessairement remonter aux rotten boroughs britanniques ou faire référence au gerrymandering qui se pratique encore parfois aux États-Unis, force est de constater qu’il est difficile de procéder à une nouvelle délimitation de façon absolument neutre et objective.
À cet égard, la méthodologie choisie revêt toute son importance.
On peut ainsi s’interroger, monsieur le secrétaire d'État, sur le choix de la méthode par tranches, dite méthode Adams, qui n’est utilisée qu’en France, ou encore sur le choix d’une tranche de 125 000 habitants, alors que, en divisant le total de la population française par le nombre de circonscriptions, la tranche type est plus proche de 113 000 habitants.
J’ai toutefois conscience que les déséquilibres démographiques en métropole et la nécessité d’assurer une représentation correcte de l’Outre-mer ne permettent pas de garantir une tranche optimale. Mais la différence reste tout de même de 11 % !
En outre, pourquoi avoir choisi un écart de 20 % entre circonscriptions d’un même département, alors que le Conseil de l’Europe recommande, dans son Code de bonne conduite en matière électorale, un écart de 10 % ?
Pourquoi ne pas avoir saisi l’occasion de cette ordonnance pour réduire l’écart et renforcer les conditions d’une réelle égalité des suffrages ?
Certes, le Conseil constitutionnel a validé cet écart de 20 %, mais en rappelant qu’il ne devait être qu’un ultime recours fondé sur des raisons d’intérêt général particulièrement circonstanciées.
En tout état de cause, la difficulté de procéder à la révision des circonscriptions résulte aussi de la révision constitutionnelle de 2008 et de la disposition qui a fixé à 577 le nombre maximal de députés.