À mon tour, je commencerai par remercier le Président de la République, Nicolas Sarkozy, qui me permet d’être avec vous cet après-midi…
Dans ce haut lieu du bicamérisme, entendre parler de « vote conforme » me surprend toujours. Est-ce à dire que l’une des deux chambres serait inutile, ou que la révision du découpage des circonscriptions législatives d’importance politique majeure pour le pays ne nous intéresserait pas ? Ainsi, tout le monde serait touché, sauf les sénateurs ? Alors même que cette révision aura une influence certaine sur le redécoupage des cantons induit par le projet de réforme des institutions territoriales – les limites des nouvelles circonscriptions devront en effet être respectées –, cela ne nous concernerait pas ? Étrange conception du bicamérisme, curieuse façon de représenter les collectivités locales de la République ! À l’évidence, en matière de charcuterie politique, ce que le Gouvernement veut, la majorité sénatoriale le veut aussi !
Connaissant par avance les réponses, j’abandonnerai ce terrain du politicien pour celui, en principe plus favorable au débat, de la représentation des unités de vie réelle de notre territoire, tout particulièrement de l’intercommunalité à fiscalité propre, dont on s’accorde unanimement à reconnaître l’importance ; il me semble d’ailleurs que vous nous proposerez bientôt d’en renforcer le rôle, monsieur le secrétaire d’État.
Le présent découpage – on nous l’a rappelé – a été soumis à l’avis de la commission « indépendante » prévue à l’article 25 de la Constitution. À l’occasion de son audition par la commission des lois du Sénat, j’ai demandé à son président, Yves Guéna, s’il s’attacherait à tenir compte des réalités politico-administratives qui structurent les territoires, en particulier des bassins de vie et de l’émergence récente des intercommunalités. Il m’a répondu que, « dans la mesure du possible, il ferait en sorte que les circonscriptions soient en lien avec les territoires, notamment pour éviter de disséquer les intercommunalités lorsqu’elles ont une vie réelle et n’ont pas une dimension disproportionnée qui impliquerait de les découper pour respecter l’équilibre démographique, règle première s’imposant à la commission ».
À en juger les résultats, Yves Guéna et la commission qu’il préside sont tellement indépendants qu’ils le sont même à l’égard de ce qu’ils pensent être juste et pertinent !
L’exemple du Var, dont la croissance démographique justifiait la création d’une circonscription supplémentaire, en est l’illustration caricaturale. Sans se fatiguer, on a fabriqué celle-ci avec des bouts du territoire de trois anciennes circonscriptions… Résultat : on obtient une huitième circonscription résiduelle, qui couvre tout le nord du département, des Alpes-Maritimes aux Bouches-du-Rhône, soit environ 40 % de son territoire. Pour la parcourir d’est en ouest, vous avez le choix entre descendre le Verdon en kayak ou faire deux heures à deux heures et demie de route, suivant les chemins que vous emprunterez… Je regrette de ne pas pouvoir vous montrer une carte, mes chers collègues ! C’est un pur chef-d’œuvre de tératologie ou, plus probablement, de « je-m’en-foutisme » administratif, car, en l’espèce, il n’y avait aucun enjeu politicien. En effet, même M. Marleix aurait du mal à fabriquer dans le Var une circonscription naturellement favorable à la gauche !