Intervention de Jean Louis Masson

Réunion du 14 décembre 2009 à 14h30
Délimitation des circonscriptions pour l'élection des députés — Demande de renvoi à la commission

Photo de Jean Louis MassonJean Louis Masson, auteur de la motion :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, avant d’en venir au fond, je voudrais tout d’abord faire une remarque.

Voilà un mois, j’ai été surpris de lire dans la presse que, selon un membre du Gouvernement, il n’y aurait pas de débat sur le fond au Sénat au sujet du découpage électoral. Le prétexte en serait que, par tradition, une assemblée parlementaire ne s’occupe pas du mode de scrutin applicable à l’autre.

Ces propos sont inexacts, puisqu’à de nombreuses reprises l’Assemblée nationale a délibéré sur le mode de scrutin du Sénat ; ce fut notamment le cas sous le gouvernement dirigé par Lionel Jospin, à propos de la loi du 6 juin 2000 tendant à favoriser l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives ou de la loi du 10 juillet 2000 relative à l’élection des sénateurs.

En tout état de cause, ce constat a un mérite, celui de confirmer la gêne du Gouvernement, car il n’a pas intérêt à ce que certaines turpitudes du charcutage effectué dans quelques départements soient mises sur la place publique.

C’est d’ailleurs bien pour cette raison que divers artifices de procédure avaient déjà été utilisés à l’Assemblée nationale pour empêcher un véritable débat. En effet, monsieur le secrétaire d’État, fallait-il vraiment que vous ayez peur de la vérité pour que, au lieu de laisser se dérouler normalement les débats, vous ayez empêché les députés de voter sur les amendements. Non content d’utiliser la procédure prévue par l’article 44 de la Constitution pour imposer un vote bloqué, vous avez également reporté le vote à la semaine suivante, ce qui vidait le débat de tout son sens.

À juste titre, les députés de l’opposition ont quitté la séance en guise de protestation. Je peux également vous dire que certains députés de la majorité présents en séance ont regretté, eux aussi, votre manière d’agir. Ils n’étaient d’ailleurs pas les seuls puisque le président UMP de l’Assemblée nationale, M. Bernard Accoyer, a « déploré » – c’est le terme qu’il a employé – le lendemain le fait que le Gouvernement utilise abusivement la procédure du vote bloqué. Il l’a dit sur BFM TV, et cela a été repris dans Le Figaro du 20 octobre.

D’ailleurs, et je sais ce que je dis, des pressions regrettables ont été exercées sur de nombreux députés de la majorité pour qu’ils votent ce texte. Quoi qu’il en soit, et malgré ces pressions, huit députés UMP ont eu le courage de voter contre. De surcroît, de nombreux autres ont voté avec leurs pieds, puisque vingt-cinq députés UMP ont refusé de prendre part au vote et trois se sont abstenus.

Après que le déroulement normal des débats à l’Assemblée nationale a ainsi été escamoté, certains membres du Gouvernement voudraient donc maintenant que les sénateurs se laissent faire à leur tour. Ils voudraient qu’il n’y ait pas de débat et que nous fassions semblant d’ignorer le caractère partisan du charcutage des circonscriptions législatives auquel vous avez procédé dans certains secteurs.

En tout état de cause, que l’on ne compte pas sur moi pour cela. Ce débat doit avoir lieu. Même si vous spéculez, monsieur le secrétaire d’État, sur votre majorité dans cette enceinte, j’espère que le processus se poursuivra ensuite de manière réellement démocratique, c’est-à-dire que le Conseil constitutionnel jouera pleinement son rôle en acceptant au moins d’examiner les cas les plus flagrants, à savoir la vingtaine de départements pour lesquels la Commission de contrôle du redécoupage électoral et le Conseil d’État ont désavoué vos choix.

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