Si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai en même temps l’amendement n° II-26 et l’amendement n° II-13, ces deux amendements ayant une cohérence technique.
L’amendement n° II-13 vise à supprimer l’article 58, qui prévoit la création d’une dotation d’un montant total de 6, 34 millions d’euros destinée à compenser les charges pesant sur les deux mille communes qui se verront équiper en 2009 de stations d’enregistrement permettant de délivrer des titres sécurisés.
Par titres sécurisés, on entend les futurs passeports et cartes d’identité biométriques. Ces titres comprendront, outre une photo prise selon dix-sept critères spécifiques – la commission tient un document à la disposition de ceux que cela intéresse –, les empreintes des deux index.
Ces données seront stockées sur une puce incorporée au document.
S’agissant des passeports, la France se conformera ainsi au règlement européen du 13 décembre 2004, qui impose un passage aux documents sécurisés d’ici au 28 juin 2009.
Le montant de la dotation proposée par le Gouvernement aux communes est fondé, notamment, sur une estimation réalisée par le ministère de l’intérieur de l’ordre de dix minutes pour délivrer un titre, c’est-à-dire faire remplir un formulaire CERFA, prendre une photo et les empreintes digitales.
Or, comme vient de le signaler M. Adrien Gouteyron, les communes estiment ce temps à environ trente minutes.
Ce matin, je me suis rendue à la mairie de Chantilly afin de tester les conditions de délivrance d’un passeport biométrique : j’ai ainsi pu me forger une opinion sur le temps nécessaire pour accomplir ces démarches.
Elles se décomposent en trois séquences : tout d’abord, l’accueil et le renseignement du formulaire CERFA, ensuite, la prise de photos et d’empreintes, enfin, le retrait du passeport par l’usager quelques jours plus tard en mairie, après vérification.
Il est donc apparu à la commission des finances que le montant de la dotation était notoirement insuffisant : il ne permet pas de couvrir les charges de personnels induites par cette nouvelle tâche.
En outre, certaines charges de sécurisation des locaux accueillant en mairie les stations d’enregistrement ne paraissent pas avoir été prises en compte dans l’évaluation du ministère.
Il est donc proposé au Sénat d’adopter deux amendements, qui correspondent à un dispositif à double détente permettant d’aboutir à un quasi-doublement de cette dotation, qui passerait ainsi de 6, 34 millions d’euros à 12 millions d’euros.
L’amendement n° II-13 vise à supprimer l’article 58, rattaché à la mission « Administration générale et territoriale de l’État ».
L’amendement n° II-26 tend à créer un nouveau programme au sein de la mission, intitulé : « Titres sécurisés : concours aux communes ». Il est doté de 12 millions d’euros, ces crédits provenant de l’action 2 « Garantie de l’identité et de la nationalité, délivrance de titres » du programme « Administration territoriale ».
Il faut rappeler que cette action couvre les domaines des passeports, des cartes nationales d’identité, des cartes grises, des permis de conduire et du droit des étrangers. Elle comprend 676, 8 millions d’euros. La suppression des crédits correspond donc à 1, 8 % des crédits.
La solution proposée au travers de ces deux amendements s’appuie sur de nombreux échanges conduits au cours des dernières semaines avec l’Association des maires de France, dont les positions ont également été utilement relayées par M. Pierre Jarlier et les membres de votre cabinet, madame la ministre, avec lesquels nous avons échangé nos points de vue longuement et à plusieurs reprises.
Le dispositif proposé par la commission des finances ne permet certes pas de régler tous les problèmes posés par l’arrivée des stations d’enregistrement dans les deux mille mairies. Je songe, en particulier, à l’activité des photographes professionnels, qui aura à souffrir de la prise gratuite en mairie des photos nécessaires à l’établissement des titres.
Il a néanmoins le mérite d’apporter un début de réponse aux inquiétudes des maires quant à la non-compensation d’un transfert de charges dû à ce nouveau système de délivrance des titres d’identité.
Je prends note, madame la ministre, de votre suggestion du dépôt d’un projet de loi – indispensable – afin de répondre à cette question mais aussi à d’autres problématiques.
On peut d’ailleurs s’interroger – permettez-moi de le faire sans impertinence – sur la pertinence du dispositif imaginé par vos services, madame la ministre. N’aurait-il pas été plus pratique de laisser aux préfectures et aux sous-préfectures, quels que soient leurs dirigeants, avec ou sans casquette pour déposer les gerbes, la charge de la délivrance des titres ?
À l’évidence, l’entrée en application des titres sécurisés soulève encore beaucoup d’interrogations.
C’est la raison pour laquelle je mènerai, dès le début de l’année 2009, une mission de contrôle au nom de la commission des finances, en étroite collaboration avec notre collègue, comme celle-ci s’y était engagée, afin d’accompagner cette profonde évolution et d’aider l’administration dans sa mission.
S’agissant de l’amendement n° II-240 rectifié, qui peut le plus peut le moins, si notre assemblée, dans sa sagesse, l’adoptait, la commission ne pourrait que s’en féliciter car la proposition qu’elle a présentée est plus modeste.