Celui-ci est particulièrement réussi. Ainsi part-il du principe qu’il est légitime « d’associer » – ce qui signifie « contraindre » – les collectivités locales à l’effort de maîtrise des dépenses publiques. « Cependant, l’objectif de réduction du déficit public que l’État s’est fixé â l’horizon 2012 […] doit être partagé par les collectivités territoriales. » : ce sont les propos tenus par M. Marleix devant le congrès de l’Association nationale des élus de la montagne, l’ANEM.
J’émettrai toutefois quelques réserves.
En premier lieu, la crise aidant, il faudra bien financer par l’endettement les 20 milliards d'euros de la partie française du plan de relance européen, dont le Président de la République a donné hier les détails.
En bruxellois, cela donne : « Le plan de relance tire pleinement parti de la flexibilité offerte par les règles de l’Union européenne en matière de déficits budgétaires nationaux qui permettent aux gouvernements d’emprunter davantage, de façon ponctuelle, en cas de conjoncture difficile. ».
Et en français, cela donne – je cite Nicolas Sarkozy : « Le plan de relance ne pèsera pas au-delà de 2009, car il est conçu pour être temporaire. » Plus fort encore : « De ce fait, le déficit public en 2011 et 2012 sera légèrement amélioré. » Si ce n’est pas nous prendre pour des demeurés, qu’est-ce que c’est ?
Les collectivités locales réalisant les trois quarts des investissements publics, le Gouvernement serait mieux inspiré de les mobiliser pour la relance économique, plutôt que de procéder à un versement anticipé du FCTVA, versement qui ne changera rien à leurs difficultés structurelles, ou de poursuivre un objectif 2012 d’équilibre financier parfaitement illusoire.
Réseaux d’eau, de voirie, de transport, équipements publics, etc., ce ne sont pas les investissements utiles, mais d’effets limités sur le déficit de notre balance commerciale, qui manquent ! Quant au logement social, les mesures annoncées, qui n’apportent aucune réponse au problème essentiel du bouclage des plans de financement des projets, n’auront que des effets homéopathiques.
Cette discussion budgétaire, complètement décalée par rapport aux réalités financières et aux exigences de l’heure, en totale apesanteur, a quelque chose de surréaliste : navigation dans le brouillard avec deux boussoles, l’une dont le nord indique la relance économique et l’autre est pointée sur l’entretien de la déflation.
Déjà irréels, comme l’a souligné le rapporteur général, Philippe Marini, les objectifs fixés aux collectivités locales par la loi de programmation des finances publiques 2009-2012 deviennent, avec le plan de relance, hautement fantaisistes. Parier sur une chute du taux de progression moyen des dépenses annuelles, hors décentralisation, de 3, 25 % à 1, 25 % est évidemment illusoire.
Et le rapporteur général conclut : « Surtout, les finances locales devront assumer une bonne part des conséquences de la crise. […] Il ne faut donc pas être grand clerc pour prédire, sur la période 2009-2010, un rythme soutenu de la dépense locale en même temps qu’une hausse des impositions locales. La rigueur affichée par l’État dans le calcul des dotations comporte, de ce point de vue, une grande part d’hypocrisie. » On ne saurait être plus clair !
En deuxième lieu, les collectivités locales ne sont pas responsables des dérives des finances publiques.
Si la dette française est préoccupante, c’est non par son niveau, mais par sa nature : elle sert surtout à financer le fonctionnement de l’État quand elle devrait, comme pour les collectivités locales, privilégier l’investissement. La dette des collectivités représente quelque 11 % de la dette publique, contre 80 % pour l’État.
Philippe Séguin en a conclu devant la commission des finances de l’Assemblée nationale qu’il était difficile d’attribuer aux collectivités territoriales une responsabilité directe dans l’évolution de la situation de nos comptes. Il a été plus direct encore devant la commission des finances du Sénat en convenant qu’il était injuste de faire des collectivités locales un bouc émissaire.