Intervention de Michel Thiollière

Réunion du 5 décembre 2008 à 22h30
Loi de finances pour 2009 — Compte spécial : avances à l'audiovisuel

Photo de Michel ThiollièreMichel Thiollière, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en dépit des annonces catastrophistes entendues çà et là, je tiens d’entrée de jeu à souligner que les crédits consacrés par l’État aux médias, notamment audiovisuels, seront en 2009 plus élevés que jamais.

Il faut s’en féliciter et constater que l’État est conscient des défis majeurs qui attendent ce secteur dans les prochaines années en raison de la révolution numérique : les chaînes de télévision devront mettre en place un « média global », impératif pour offrir aux programmes diffusés une continuité de la télévision à internet, et investir lourdement afin d’assurer la diffusion des programmes en haute définition et sur tous les supports.

Ces crédits sont, d’une part, inscrits dans la mission « Médias », qui rassemble plus de 1 milliard d’euros de crédits de paiement, dont plus de 732 millions d’euros sont consacrés à l’audiovisuel, et, d’autre part, retracés dans le compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel », au sein duquel est réparti le produit de la redevance.

En 2009, la redevance financera les organismes de l’audiovisuel public pour un montant de quasiment 3 milliards d’euros, soit une hausse de 3, 7 % par rapport à 2008.

Cette augmentation sera rendue possible par l’indexation de la redevance sur l’inflation, que la commission des affaires culturelles réclame depuis quelques années. Je me réjouis que le Gouvernement se soit enfin rallié à cette option.

Un peu d’avance a cependant été prise, puisque cette mesure sera débattue lors de la discussion du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, discussion au cours de laquelle des changements pourraient encore intervenir. M. le président de la commission des finances vient d’indiquer qu’elle aurait lieu au début de l’année 2009.

Qui va profiter de cette hausse des crédits ? France Télévisions, tout d’abord, qui, après avoir bénéficié d’une hausse de ses crédits de 3, 5 % en 2008, verra sa dotation augmenter de 53, 3 millions d’euros en 2009, conformément au contrat d’objectifs et de moyens ambitieux qui avait été signé en 2007.

En outre, le nouveau programme 313 de la mission « Médias », intitulé « Contribution au financement de l’audiovisuel public », prévoit une dotation de 450 millions d’euros correspondant à la compensation des pertes de recettes commerciales occasionnées par la disparition partielle de la publicité sur les chaînes de France Télévisions, dans le cadre de la réforme de la télévision publique.

C’est la commission pour la nouvelle télévision publique qui a évalué la hauteur de cette compensation, tenant compte à la fois de la disparition de la publicité après 20 heures, de son effet sur la décote sur les écrans publicitaires maintenus en journée, de la décrue globale du marché publicitaire et, enfin, des effets des modifications du cadre réglementaire.

Prenant pour base les revenus publicitaires de France Télévisions en 2007, qui s’élevaient à 800 millions d’euros, la commission présidée par M. Copé a fixé la compensation de l’État en déduisant de cette somme, d’une part, les recettes attendues des opérations de parrainage et de la publicité sur les antennes régionales, sur celles d’outre-mer et sur les nouveaux supports, qui devraient s’établir à 150 millions d’euros en 2009, et, d’autre part, 200 millions d’euros, au titre des revenus publicitaires sur la publicité en journée.

J’insiste sur le fait que cette dotation diminue très fortement le risque économique encouru auparavant par France Télévisions, dont le chiffre d’affaires publicitaire pouvait être très fluctuant. Au-delà de la question des taxes, dont on discutera bientôt, le budget de l’État permet donc déjà à France Télévisions de disposer de perspectives financières à la fois solides et sécurisantes, qui lui permettront notamment de contribuer d’une manière suffisante au soutien à la création.

Il sera cependant nécessaire que la loi relative à l’audiovisuel public comporte une clause de revoyure avant la suppression totale de la publicité. Cela permettra aux parlementaires de constater que les crédits sont suffisants pour financer France Télévisions.

Par ailleurs, nous serons tous vigilants, je le crois, lorsqu’il s’agira de contrôler le respect des engagements financiers que l’État a pris dans les contrats d’objectifs et de moyens, les COM, passés avec les organismes de l’audiovisuel public.

Le compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public » prévoit une augmentation de 3, 7 % de la dotation prévue pour Radio France, dont les crédits représentent 559, 7 millions d’euros pour 2009. Cette augmentation correspond, à l’euro près, aux engagements pris par l’État dans le cadre du contrat d’objectifs et de moyens. Cette hausse des crédits doit permettre à Radio France de financer les chantiers du numérique et du multimédia.

Madame la ministre, j’ai, par ailleurs, appris récemment de bonnes nouvelles sur l’évolution des coûts des travaux liés à la réhabilitation de la Maison de la radio. J’espère que vous pourrez nous donner des précisions sur cette question.

Le programme 313 de la mission « Médias » comprend en outre une dotation additionnelle de 23 millions d’euros qui a pour objet de compenser un recentrage de la publicité de Radio France, afin de mettre en conformité la diffusion des messages publicitaires sur ses antennes avec les prescriptions de son cahier des charges.

Arte bénéficie quant à elle d’une hausse de ses crédits de 4 %, conforme au contrat d’objectifs et de moyens, soit une augmentation de 10 millions d’euros. Grâce à sa bonne gestion, la chaîne va pouvoir consacrer ces moyens à la diffusion en haute définition et sur la télévision mobile personnelle, ce que le COM n’avait pas intégré.

L’Institut national de l’audiovisuel bénéficie pour sa part d’une hausse de 3, 4 % de ses crédits, qui s’élèveraient ainsi à 86 millions d’euros en 2009. Cette augmentation est une nouvelle fois conforme au COM de 2005-2009, notamment grâce au dynamisme de la redevance. On peut se satisfaire de cette hausse des crédits, qui financera notamment la numérisation intégrale des fonds menacés de dégradation. Elle récompense également à juste titre la pertinence de la politique menée par l’INA depuis la signature du COM.

Des inquiétudes apparaissent sur la budgétisation des crédits du Fonds de soutien à l’expression radiophonique locale, le FSER, qui subventionne les radios associatives de proximité. Néanmoins, je tiens à le souligner, ces radios bénéficiaient en 2008 d’une taxe sur les recettes publicitaires des radios et télévisions, à hauteur de 25 millions d’euros. Or, celle-ci aurait forcément baissé en 2009. L’État a fait un réel effort budgétaire en dotant le nouveau programme « Soutien à l’expression radiophonique locale » de 26, 5 millions d’euros de crédits de paiement pour 2009, soit une hausse de 6 % par rapport à 2008.

La difficulté majeure, pour ces radios, sera en réalité le passage au numérique, en raison des coûts de la double diffusion. Une réflexion devra donc être menée sur le soutien à leur apporter. La commission des affaires culturelles sera très attentive, lors de l’élaboration des prochaines lois de finances, à la pertinence du niveau des crédits affectés au FSER, dans la mesure où les radios associatives de proximité remplissent un rôle fédérateur très intéressant à l’échelon local.

Madame la ministre, pouvez-vous nous éclairer sur les projets du ministère visant à soutenir le passage au numérique de ces radios locales ?

Évoquons enfin le financement de l’audiovisuel extérieur. La nouvelle holding « Audiovisuel extérieur de la France », dont l’appellation n’est pas définitive, a été créée le 4 avril 2008 afin de mettre en œuvre la réforme de l’audiovisuel extérieur en regroupant Radio France Internationale, France 24 et TV5 Monde.

Les crédits du programme 115 de la mission « Médias », relatif à l’audiovisuel extérieur, s’élèvent à 232 millions d’euros pour 2009, dont 1 million d’euros pour Médi 1, la radio franco-marocaine. Les crédits du programme 844 du compte de concours financiers représentent pour leur part 65, 3 millions d’euros.

Au total, l’audiovisuel extérieur serait ainsi doté de 297 millions d’euros de crédits en 2009, contre 296 millions d’euros en 2008.

Cette hausse très légère est inférieure à la seule augmentation des crédits prévus pour France 24 dans son contrat de subvention avec l’État. La répartition des crédits qui sera opérée par la société de l’audiovisuel extérieur entre les trois chaînes, en accord avec les partenaires de la France pour TV5 Monde, s’annonce donc extrêmement difficile. Les économies de structures réalisées, annoncées par M. Alain de Pouzilhac et Mme Christine Ockrent lors de leur récente audition par la commission des affaires culturelles et la commission des affaires étrangères, permettront peut-être de dégager de nouveaux financements. Des indications plus précises sur ce point seraient tout à fait utiles, madame la ministre.

Enfin, j’ajouterai un dernier commentaire sur la dotation de 15 millions d’euros au profit du groupement d’intérêt public « France Télé numérique ». La commission des affaires culturelles s’est clairement prononcée en défaveur de l’utilisation de la redevance pour financer ce groupement d’intérêt public.

Pour 2010, il faudra profiter de la récente création du compte d’affectation spéciale « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien », qui regroupe les crédits obtenus par la vente des fréquences libérées grâce au numérique, pour abonder les crédits du GIP.

En conclusion, conformément à mes préconisations, la commission des affaires culturelles a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Médias » et du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public ».

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion