Intervention de Catherine Morin-Desailly

Réunion du 5 décembre 2008 à 22h30
Loi de finances pour 2009 — Compte spécial : avances à l'audiovisuel

Photo de Catherine Morin-DesaillyCatherine Morin-Desailly :

Pour en revenir à la redevance, il convient, dans le contexte de la réforme de l’audiovisuel, d’en faire une ressource dynamique et pérenne. Son indexation, prévue dans le projet de loi relatif à l’audiovisuel pour compenser le manque à gagner en ressources propres de France Télévisions, rapportera ainsi 50 millions d’euros supplémentaires.

L’année dernière, j’ai rappelé que la redevance s’élèverait cette année à environ 128 euros si elle avait suivi l’indice des prix depuis 2002, alors qu’elle est fixée à 116 euros.

Elle se justifie d’autant plus que son niveau, comparé à celui qui est constaté dans d’autres pays européens, est faible. Faute d’augmentation, même légère, de la redevance, il faut, outre l’indexation, mettre fin au plafonnement des remboursements des dégrèvements de redevance, qui revient à faire financer les exonérations pour motifs sociaux par le budget de l’audiovisuel public. Ce plafonnement est contraire au principe de remboursement intégral des exonérations inscrit, par la loi du 1er août 2000, à l’article 53 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication. Le Gouvernement doit respecter cet engagement.

En outre, comme je l’ai soutenu à plusieurs reprises devant vous, notamment l’année dernière, il conviendrait d’élargir l’assiette de la redevance en taxant les nouveaux supports permettant la réception des programmes télévisés. C’est d’ailleurs ce qui se fait en Allemagne. Aujourd’hui, une instruction fiscale exonère les ordinateurs équipés en ce sens, alors qu’ils constituent un « dispositif assimilé permettant la réception de la télévision pour l’usage privatif », pour reprendre les termes de l’article 1605 du code général des impôts.

Un tel élargissement, conforme au principe de neutralité technologique, a été proposé voilà quelques jours à l’Assemblée nationale par notre collègue député Jean Dionis du Séjour. Bien encadré, ne visant, par exemple, que les abonnés à des offres « triple play » ayant déclaré ne pas payer la redevance audiovisuelle, il serait fiscalement juste et équitable.

Enfin, et nous avons déjà eu l’occasion d’évoquer ce point au début de la discussion budgétaire, il nous semble anormal de faire financer l’extinction de la diffusion analogique par la redevance, comme le prévoit l’article 23 du projet de loi de finances pour 2009. Ces mesures d’accompagnement du passage au numérique supervisé par le groupement d’intérêt public « France Télé numérique » doivent être financées sur le budget de l’État. Aux yeux de la commission des affaires culturelles, qui s’est exprimée plusieurs fois sur ce sujet, ce n’est pas acceptable au moment où l’on cherche à clarifier les modalités du financement de l’audiovisuel public et à pérenniser ses ressources.

Au-delà de ces remarques, il faudra, me semble-t-il, réfléchir à une démarche pédagogique concernant la redevance. Si celle-ci n’a pas été augmentée depuis des années, c’est bien parce que sa mise en œuvre souffre d’un déficit d’explication, à la fois chez nos concitoyens et chez les parlementaires.

Il faut donc entreprendre une grande campagne de présentation de cette contribution, pour la faire accepter par nos concitoyens. Combien de Français aujourd’hui savent à quoi sert la redevance et ce qu’elle finance ? Combien d’entre eux peuvent dire combien ils payent à ce titre ? Cet effort pédagogique me semble absolument indispensable, et il sera encore plus efficace si nos concitoyens voient sur leurs écrans la différence entre le service public et les chaînes privées.

Nous aurons bien entendu l’occasion d’évoquer de nouveau et de façon beaucoup plus approfondie toutes ces questions lors de l’examen du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision.

Madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais terminer mon propos en attirant votre attention sur un aspect souvent méconnu du secteur audiovisuel.

C’est une industrie considérable de création, qui est source de nombreuses richesses et de nombreux emplois, en faisant travailler en partenariat des producteurs, des auteurs, des créateurs, des techniciens, ainsi que des intermittents, autant de métiers artistiques qui la font vivre et qui en vivent. Notre pays peut s’enorgueillir de cette industrie culturelle. Ainsi, la moitié des films nommés aux César 2008 étaient coproduits par France 2 Cinéma et France 3 Cinéma. Il me semble important d’avoir cela à l’esprit, à la veille de l’examen d’une réforme profonde du paysage audiovisuel français.

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