Tant de précautions nous interpellent : quel sort voulez-vous réserver à nos communes, dans un premier temps, à travers la transformation des intercommunalités en quatrième niveau de collectivités, et surtout peut-être, dans un second temps, à travers le dispositif dit des « communes nouvelles » ?
Nous sommes tellement favorables à l’intercommunalité que plusieurs membres du groupe RDSE et moi-même vous proposerons d’en faire les briques de base de la constitution des territoires, qui se substitueraient, selon l’amendement présenté par M. Portelli et adopté par la commission des lois, aux cantons actuels.
Nous vous proposerons, à cet effet, d’avancer au 1er mars 2013 la date d’achèvement de la carte de l’intercommunalité. Évidemment, cela compliquera un peu votre travail de redécoupage, mais ce serait tellement plus clair du point de vue de la représentation effective de nos bassins de vie, et tellement plus conforme à la démocratie !
Mais est-ce vraiment là votre souci ?
Nous sommes très inquiets de ce que vous voulez faire à travers les fameuses « communes nouvelles ».
Nous sommes soucieux de voir que vous avez repris en commission des lois le texte de l’Assemblée nationale, revenant ainsi sur l’approbation de la création de ces communes par référendum, voulue en première lecture par le Sénat. Désormais, aux termes de votre texte, le préfet pourrait proposer la création d’une commune nouvelle en s’assurant de l’approbation des seuls conseils municipaux.
Sur ce point, je ne partage pas l’avis de M. Maurey, qui m’a précédé à cette tribune. Quand on connaît les moyens de pression dont disposent les préfets, mais également certains présidents de conseil général ou d’intercommunalité, on mesure que, si vous le vouliez, vous pourriez réussir là où la loi Marcellin avait échoué : réduire drastiquement le nombre des communes, à l’instar de la Belgique et de l’Allemagne, en le faisant passer, dans l’idéal, de 36 600 à 2 600, ce qui correspond au nombre des EPIC, chacun d’eux ayant théoriquement vocation à se transformer, un jour, en commune nouvelle. Vous n’irez pas jusque-là, bien sûr, mais l’intention est là.
Un tel dessein méconnaîtrait profondément le besoin de proximité de nos concitoyens, l’enracinement multiséculaire de nos communes et le rôle irremplaçable des 500 000 élus locaux, qui sont, pour la plupart, quasiment bénévoles.
Supprimer les communes, qui tiennent encore le pays, à un moment où les services publics se défont et où l’administration est en proie à la RGPP, ce serait défaire le lien social. Vous le savez, monsieur le ministre, c’est le maire que l’on appelle quand la maison brûle ou lorsqu’un désordre apparaît !
Aussi bien la « commune nouvelle » ne répond-elle à aucun besoin profond, l’intercommunalité ayant largement permis de résoudre efficacement le problème posé par l’émiettement communal. Le prétexte des économies budgétaires est risible. Certes, vous en faites sur le dos des collectivités locales, dont vous aviez annoncé, avant même le rendez-vous fiscal prévu en juin par la loi de finances pour 2010, le gel des dotations.
M. Hortefeux, en second lieu, déclarait vouloir installer un couple départements-région, sans doute pour justifier la création du conseiller territorial. Qu’en reste-t-il ?
Là encore, c’est une mauvaise idée : chacun de nos trois échelons territoriaux – commune, département et région – devrait avoir ses propres élus, chacun en vertu d’un mode de scrutin différent.
En fait, M. Balladur semblait avoir vendu la mèche : il s’agissait, selon lui, de faire s’évaporer les départements dans la région. Mais la mèche était mouillée : les métropoles, dans l’esprit du Gouvernement, semblent avoir détrôné les régions. Et on ne sait plus très bien si l’élection des conseillers territoriaux ne va pas entraîner la condensation de la région dans les départements, plutôt que l’évaporation de ces derniers dans celle-ci.