Surtout, des milliards d'euros ont été dépensés au profit du patronat sous forme d'exonérations de cotisations sociales supplémentaires.
Pourtant, un rapport commandé par le Gouvernement et remis à la veille de Noël précise, au sujet des masses financières distribuées : « L'évaluation des exemptions d'assiettes est de l'ordre de 41 milliards d'euros en ce qui concerne les revenus d'activité des salariés du régime général. » Nous en avons discuté la nuit dernière !
Quels ont été les effets de cette dépense en termes d'emploi ? Il n'y en a eu aucun ! Il faudra bien, un jour ou l'autre, que nous revenions sur cette politique qui coûte cher à l'État, aux Françaises et aux Français, et qui nous prive d'une importante capacité d'action.
M. Sarkozy a beau jeu de dire que les caisses sont vides, alors que la majorité contribue - j'allais dire quotidiennement - à assécher plus encore les caisses de l'État ou à les priver de ressources nouvelles, pourtant bien nécessaires, qu'aurait pu apporter par exemple une véritable taxation des stock-options.
Il y a donc réellement une différence entre la loi TEPA et le texte que nous étudions aujourd'hui : pour financer les mesures de la loi TEPA, dont seulement une minorité de nos concitoyens a bénéficié, le Gouvernement a mis la main à la poche ; mais quand il s'agit de prendre, sous la pression de nos compatriotes, des mesures qui auraient pu concerner le plus grand nombre, l'État n'y peut plus rien...
Du coup, vous en appelez au bon vouloir des employeurs, à qui vous demandez d'attribuer à leurs salariés une prime de 1000 euros, ou encore, une fois de plus, d'autoriser le déblocage de l'épargne salariale. En un mot, vous en appelez à la bonne volonté des employeurs, comme un Premier ministre passé, M. de Villepin pour ne pas le citer, en appelait au patriotisme économique.
Au final, le Gouvernement ne fera donc aucun geste réel pour favoriser le pouvoir d'achat. Il prendra même, peut-être, s'il décide de suivre les recommandations du rapport Attali, de nouvelles mesures défavorables à ceux qui survivent difficilement, à l'instar de l'instauration de nouvelles franchises médicales.
Il y a cependant, monsieur le ministre, un sujet épineux que le gouvernement auquel vous appartenez, qui se targue de réclamer la fin de tous les tabous, se refuse encore à aborder mais qui est pourtant au coeur de la crise que nous vivons : celui de la répartition des richesses, qui n'avait jamais été aussi inégalitaire qu'aujourd'hui.
J'ai bien entendu les déclarations du Président de la République sur cette question. J'y ai retrouvé des accents faussement gaulliens, mais elles ne comportent rien de concret. Nous le savons pourtant tous : toute la richesse produite - le PIB - se répartit entre la rémunération du travail et celle du capital. Or, depuis vingt ans, la part dédiée à la rémunération du travail, qu'il soit salarié ou indépendant, a considérablement fondu, passant de 67, 8 % en 1982 à 59, 8 % en 2005. Ce sont donc pas moins de 8 points de PIB qui ont échappé aux salariés ! Et lorsque l'on sait que le PIB s'élève à 1 521 milliards d'euros, on comprend que ces 8 points auraient pesé lourd dans la balance s'ils avaient été affectés à la rémunération du travail, puisque pas moins de 121 milliards d'euros auraient été répartis directement entre les travailleurs. Au lieu de cela, c'est le capital qui a bénéficié de cette somme, et je parle ici, en évoquant le capital, non pas d'amortissements ou d'investissements, mais de la rémunération des actionnaires.
Ces 121 milliards d'euros manquent également à nos systèmes de solidarité, qui sont, précisément, assis sur la masse salariale. Reversée aux salariés, cette somme aurait été mise à contribution pour financer notre protection sociale, qui en a bien besoin, tout comme notre régime de retraite. Au lieu de quoi les actionnaires accumulent des bénéfices qui sont, par la « grâce » des gouvernements successifs soutenus par l'actuelle majorité, de moins en moins taxés. Il est donc possible, pour équilibrer les comptes sociaux, de taxer davantage les entreprises, notamment les plus importantes d'entre elles et celles qui utilisent peu de main-d'oeuvre. Encore faut-il poser la question de la répartition des richesses... Certes, on connaît la règle des trois tiers de M. Dassault !