Intervention de Aymeri de Montesquiou

Réunion du 23 janvier 2008 à 15h00
Pouvoir d'achat — Discussion générale

Photo de Aymeri de MontesquiouAymeri de Montesquiou :

Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, pendant les « Trente Glorieuses », on pouvait parler d'harmonie française, car les entreprises et le niveau de vie de nos concitoyens progressaient considérablement de façon concomitante.

Bien sûr, il subsistait des injustices criantes. En 1981, l'objectif prioritaire fut de les gommer, ou tout du moins de les réduire. Si, malgré l'incohérence de nationalisations à contre-courant suivies de privatisations à marche forcée, les entreprises les plus importantes ont continué à se développer, pour ce qui est des salariés l'enfer a été pavé de bonnes intentions.

En effet, on peut aujourd'hui parler de paradoxe français, car la progression du pouvoir d'achat des ménages a été très inférieure au développement des entreprises ; bien plus, l'écart des revenus entre les plus pauvres et les plus riches de nos concitoyens s'est élargi au fil des années, devenant inacceptable. Cela nous amène à nous interroger sur la progression et la répartition du revenu des ménages.

Depuis vingt-cinq ans, la France progresse moins vite que ses concurrents. Elle a besoin d'un « électrochoc » puissant pour sortir de sa torpeur et retrouver la confiance en l'avenir. Non seulement nos voisins européens n'attendront pas que nous ayons achevé nos réformes, mais ils se sont placés depuis longtemps dans une dynamique concurrentielle.

L'exemple de l'Espagne est aveuglant : à son entrée dans la CEE en 1986, nous observions avec une certaine condescendance son sous-développement. En 1995, l'économie espagnole atteignait le niveau de 79 points sur les 100 de la moyenne européenne, quand notre pays dépassait les 110. Depuis cette date, sa croissance a toujours été supérieure d'au moins 1, 6 point à la moyenne européenne, dépassant même les 3, 4 % chaque année depuis 2004 quand la France s'enfonçait dans la stagnation, avec à peine 1, 7 % de croissance en moyenne, reculant petit à petit jusqu'au treizième rang européen en termes de PIB par habitant. Aujourd'hui, le pouvoir d'achat d'un Espagnol a dépassé celui d'un Italien.

Dans ce contexte, l'objectif de José Luis Zapatero de dépasser d'ici à cinq ans le PIB par habitant français est parfaitement réaliste. Et pourtant, en regardant la liste des 500 premières entreprises mondiales, on constate qu'y figurent 38 entreprises françaises, contre 37 allemandes, 33 britanniques et 9 espagnoles. Mieux, 9 entreprises françaises sont classées dans les 100 premières, dont Total qui est à la dixième place, quand l'Espagne n'en classe que trois, la première d'entre elles n'arrivant qu'à la soixante-quinzième place. On ne peut donc remettre en cause le fait que nos grandes entreprises soient puissantes, insérées dans la mondialisation, et même parmi les premières dans certains secteurs. Mais souvent elles délocalisent leurs fournisseurs, licencient et payent des revenus à l'extérieur.

Quelque chose ne fonctionne pas chez nous puisque les très bonnes performances de nos entreprises ne se répercutent pas en termes de progression de pouvoir d'achat pour les salariés français. Il n'existe pas non plus en France le même consensus économique qu'en Espagne, où le clivage politique est essentiellement sociétal et non plus idéologique. Je rappelle que le gouvernement de José Luis Zapatero a renoncé à l'impôt de solidarité sur la fortune. Le contraste entre les projets politiques socialistes français et espagnol est saisissant.

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