Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il n'y a pas si longtemps, nous examinions ensemble le projet de loi portant transposition en droit interne de dispositions sur les sociétés coopératives européennes.
Nous avons eu, à cette occasion, un échange d'une grande richesse sur le mouvement coopératif dans son ensemble. Pour ma part, j'ai tenté d'apporter un éclairage particulier sur ce qui constitue la particularité de notre pays, à savoir l'existence, le maintien et le développement des sociétés coopératives ouvrières de production, les SCOP. Leur spécificité est connue et reconnue : elle permet aux salariés d'être tous des décideurs, d'être, en quelque sorte, les copropriétaires de leur société. Salariés et détenteurs de parts sociales, ils participent à la prise de décision, à la gestion et à l'organisation de leur outil de production.
Cette conception autogestionnaire de l'entreprise est, vous en conviendrez, bien éloignée du modèle libéral dominant qui, en lieu et place de la participation des salariés, préfère l'investissement financier ou boursier. C'est bien toute une économie qui se développe à côté de l'économie libérale. Dans la région Rhône-Alpes, c'est une expérience très vivante et riche.
C'est une conception à la fois très ancienne mais aussi très moderne de la gestion d'entreprise qu'il nous faut pleinement prendre en compte. Lors de la discussion sur ce texte, tous les intervenants ont mis en évidence cette particularité de gestion qui fait que les bénéfices sont répartis en deux grandes catégories, d'une part, la rémunération des salariés et leur intéressement, d'autre part, leur fonds d'investissement, qui vise à rendre plus prospère la société, à la développer et à assurer leur formation.
L'article 2 du projet de loi prévoit une disposition de déblocage de la participation salariale dans la limite de 10 000 euros. Cette disposition globale serait préjudiciable pour les entreprises, notamment les PMI et les PME dont les salariés réinvestissent leur participation dans leur propre entreprise, en particulier sous la forme d'actions ou de parts sociales.
En effet, cette mesure compromettrait gravement l'équilibre des fonds propres de ces PMI et de ces PME et, donc, leurs emplois. En outre, elle porterait atteinte à la stabilité bien nécessaire de leur actionnariat salarié et, partant, de leur ancrage territorial.
C'est tout particulièrement le cas pour les 1 700 coopératives de salariés employant 37 000 salariés associés qui, pour 98 % d'entre elles, mettent en oeuvre un accord dérogatoire de participation les conduisant, en moyenne, à répartir en participation salariale 40 % de leur bénéfice annuel - alors même que la moyenne d'effectifs de nos SCOP s'établit à 22 salariés. Pour mémoire, cet accord dérogatoire de participation est régi par l'article R. 442-28 du code du travail.
Il est nécessaire, de ce fait, d'écarter les sociétés coopératives de production du champ d'application de cette mesure de déblocage de la participation. Tel est l'objet de notre amendement.