Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le maire de Strasbourg, mes chers collègues, les orateurs précédents ont excellemment expliqué les raisons institutionnelles fondamentales qui font que Strasbourg est le cœur du Parlement européen ; je n’y reviendrai donc pas.
J’incarne, me semble-t-il, une race en voie d’extinction : celle des Européens convaincus. Aujourd’hui, un Européen convaincu n’ose plus affirmer ses convictions, il rase les murs, il tait son souhait d’une Europe fédérale. C’est sous cet angle que j’aborderai la proposition de résolution qui nous est soumise aujourd’hui, car s’il est un symbole de l’Europe, un symbole, aussi, de l’amitié franco-allemande, c’est bien Strasbourg !
Tout d’abord, la place de Strasbourg au cœur de l’Europe est commandée par la géographie, puisque la ville est adossée au Rhin, fleuve européen qui traverse huit pays et concentre tant d’histoire.
Cette place se justifie aussi par le travail considérable qui est accompli à l’Eurodistrict de Strasbourg-Ortenau, doté de services publics communs, dont l’objet n’est rien de moins que la création d’une métropole de près d’un million d’habitants au cœur de l’Europe. On l’oublie trop souvent, mais c’est important.
Enfin, Strasbourg est bien évidemment un carrefour commercial et économique. La ville, carrefour routier, est aussi située sur la ligne ferroviaire qui dessert à la fois Stuttgart et le Bade-Wurtemberg, Munich et la Bavière, deux Länder qui réalisent respectivement 450 et 800 milliards d’euros de produit intérieur brut : excusez du peu ! Nous jouons incontestablement dans la cour des grands !
J’ajoute, après d’autres intervenants, que cette ville est chargée d’histoire. Elle est un symbole et de la culture française et de la culture allemande. Certes, ce symbole s’est construit dans la douleur, et nous respectons la souffrance des Strasbourgeois, qui ont changé quatre fois d’« occupants », si je puis m’exprimer ainsi, durant les quatre-vingts dernières années. Mais aujourd’hui, avec le recul, nous constatons bien que la richesse de cette ville tient précisément à son histoire. Strasbourg mène de front deux langues et deux cultures qui sont inscrites dans son urbanisme, dans son université, et plus généralement dans la vie quotidienne des Strasbourgeois.
Ville de culture, qui possède une grande université, avec laquelle j’ai un peu collaboré, Strasbourg est aussi un lieu d’accueil des religions persécutées. C’est une de ces grandeurs de la cité.
Rappelons aussi le serment de Koufra dans lequel, après avoir conquis cette oasis, celui qui n’était encore que le colonel Leclerc fait le serment de ne plus déposer les armes avant que le drapeau français ne flotte sur la ville de Strasbourg. Et il a tenu parole.
Pour ces raisons, mon cœur, comme celui de tous les Français sans doute, bat à l’évocation de Strasbourg.
Comme l’a rappelé André Reichardt, l’Europe se veut une structure décentralisée. Mes chers collègues, les tenants d’une concentration des pouvoirs, au lieu de se tourner vers Bruxelles, devraient plutôt regarder vers Bucarest...