Intervention de René Beaumont

Réunion du 5 mai 2011 à 9h00
Politique énergétique de la france — Rejet d'une proposition de résolution

Photo de René BeaumontRené Beaumont :

Toutefois, ce risque sismique a été étudié dès le départ, en prenant en compte les spécificités de chaque site. Une marge de sécurité appropriée a été ajoutée au risque maximal historiquement vraisemblable.

Notons qu’il n’existe pas, à ce jour, de zone à force sismicité en France. Certes, des tremblements de terre se produisent sur notre territoire, mais ils sont peu nombreux et de très faible magnitude. Par ailleurs, le risque d’un tsunami pouvant menacer nos centrales nucléaires est quasi nul.

Cependant, il ne faut rien négliger, et surtout pas les risques que peuvent engendrer les tempêtes, notamment sur le littoral. Souvenons-nous de celle de décembre 1999 en Gironde. La conjonction de la fameuse tempête du siècle avec une très grande marée a provoqué, à la centrale du Blayais, des inondations qui ont été aggravées par la non-réalisation par EDF des travaux de rehausse de la digue et de remise en état demandés par l’Autorité de sûreté nucléaire, laquelle, je tiens à le rappeler, est une autorité administrative indépendante chargée depuis 2006 de contrôler les activités nucléaires civiles en France.

Le vieillissement des centrales est une autre question. Les réacteurs français les plus anciens, comme ceux des centrales de Fessenheim, de Golfech et du Triscastin, ont plus de trente ans. Tous les dix ans, l’Autorité de sûreté nucléaire impose une visite extrêmement fouillée ; c’est l’occasion d’une remise à niveau de la sûreté.

Vieillissement ou non, la plupart du temps, l’accident survient là où on ne l’attend pas : il y a des possibilités de défaillance matérielle et, malheureusement, d’erreur humaine. Souvenons-nous de Tchernobyl !

Par conséquent, monsieur le ministre, je vous serais reconnaissant de bien vouloir nous donner des précisions sur l’audit, actuellement en cours, des centrales nucléaires françaises existantes, notamment des plus anciennes, comme celle de Fessenheim. Peut-on considérer cette dernière comme dangereuse ? Quelles décisions comptez-vous prendre quant à son avenir ?

Par ailleurs, l’Autorité de sûreté nucléaire pourrait, dit-on, envisager de suspendre la construction du réacteur EPR de Flamanville 3, qui est fourni par AREVA et qui doit être exploité par EDF, en réaction à la crise nucléaire japonaise. Qu’en est-il ? Et quid du futur EPR de Penly, en Seine-Maritime ? Ce site n’a pas encore été mis en chantier. Toutefois, l’entrée en service du réacteur de Penly, qui doit également être exploité par EDF, est attendue pour 2017. L’hypothèse d’un éventuel moratoire est-elle concevable pour ces futurs projets ?

Quoi qu'il en soit, cela ne doit pas engendrer de retards sur les projets en cours, car l’arrêt des chantiers serait fort dommageable, non seulement pour les territoires concernés, mais également pour le pays tout entier. L’émotion suscitée par le drame du Japon ne doit pas nous faire prendre des décisions qui ne sont pas forcément appropriées, surtout si elles devaient laisser penser que l’ensemble de nos centrales ne sont pas suffisamment contrôlées ni sécurisées, ce qui n’est absolument pas le cas.

Enfin, qu’en est-il du projet de construction du réacteur EPR sur le site du Tricastin, dans la Drôme ? Observons que ce site abrite déjà une centrale comportant quatre réacteurs et l’usine d’enrichissement d’uranium Eurodif. Est-il possible d’y ajouter un EPR sous la responsabilité d’un autre opérateur électricien français ? Les ressources en eau, plus particulièrement l’été, seront-elles suffisantes ? Faut-il limiter la taille des centrales ? En tout cas, il faudra raison garder sur cette question que, pour être élu local de cette région, vous connaissez mieux que personne, monsieur le ministre et maire de Donzère.

Chaque Français doit savoir que, grâce à l’énergie nucléaire, il paie l’électricité 40 % moins cher que partout dans le monde. Sans le nucléaire, il faudrait utiliser le charbon, le gaz ou le pétrole, tous grands émetteurs de CO2 dans l’atmosphère, avec une facture énergétique qui serait de plus de 200 milliards d’euros par an.

Les énergies renouvelables ont toute leur place, mais elles ne pourront offrir que des solutions partielles. Dans vingt ans, elles ne représenteront au mieux 15 % à 20 % des dépenses d’énergie actuelles. C’est la raison pour laquelle l’avenir du nucléaire ne peut être remis en cause.

Toutefois, tirant les leçons de Fukushima, nous devons être toujours plus rigoureux sur le choix des sites, des matériels et aussi des hommes, et pousser la sûreté des centrales toujours plus loin.

En tant qu’élu de la Bourgogne, permettez-moi de vous interroger également sur le pôle nucléaire bourguignon et, à l’intérieur de celui-ci, sur une disposition qui est à mes yeux essentielle pour l’avenir : la création d’une formation très pointue sur le démantèlement des centrales dans le monde entier. Elle est d’autant plus nécessaire que nombre de centrales sont déjà arrivées en fin de vie ou sont sur le point d’y arriver. Or, à ce jour, nous n’avons aucune technique assurée ni aucune démarche arrêtée pour démanteler des centrales.

Enfin, la filière nucléaire française, reconnue comme l’une des plus sûres du monde, doit, dans sa structure, demeurer composite et très complémentaire, en particulier en conservant le couple AREVA-EDF tel qu’il est actuellement constitué, et dont j’ai pu récemment constater la parfaite efficacité sur le chantier du premier EPR chinois à Taishan.

Il convient de ne pas céder aux prétentions monopolistiques de certains au détriment des intérêts de toute l’ingénierie française, laquelle doit pouvoir concourir et s’investir dans tous les projets du monde, quel que soit le distributeur électrique concerné. Monsieur le ministre, je vous remercie par avance de toutes les précisions que vous ne manquerez pas de nous apporter aussi sur ce sujet.

Vous l’avez compris, mes chers collègues, le groupe UMP votera contre la proposition de résolution qui est présentée par le groupe CRC-SPG et qui va à l’encontre de la politique énergétique de la France mise en œuvre par le gouvernement que nous soutenons.

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