Je soutiens ces amendements, animé par l'état d'esprit qui était déjà le mien lorsque j'ai critiqué cette organisation particulière de nos universités qui voit les établissements entrer en concurrence les uns avec les autres pour constituer un « marché du savoir ».
Le mode d'élection que vous préconisez, madame la ministre, je le comprends : il est en parfaite cohérence avec l'ensemble de la construction de votre projet de loi.
Ainsi, avec le dispositif que vous mettez en place, ce n'est pas un président qui sera élu, c'est un manager ! Sur ce point, nos visions s'opposent clairement.
Mes chers collègues, dans ce haut lieu de l'esprit qu'est l'université, le président doit rester président, et rien ne justifie de modifier cet état de fait. Nous sommes tous ici des républicains, qui croient à l'engagement du citoyen éclairé et à la loi de la raison comme moteur de la volonté générale. Admettez-le, s'il y a un seul endroit où tout cela doit être possible, c'est tout de même à l'université, laquelle concentre l'élite intellectuelle du pays !
Les différents acteurs de l'université ont les moyens de s'accorder, pour peu que le système de vote permette d'éviter les débordements. Et encore, comme l'a dit M. Renar, ces débordements ne sont le résultat que de circonstances bien particulières.
Ne laissons donc pas dire n'importe quoi sur les universitaires ! L'ensemble des parties prenantes de la vie de l'université - je n'emploie pas à dessein le terme de « communauté », car, dans ce genre de contexte, il me fait horreur ! - ne sont pas à ce point irresponsables : ils n'ont aucunement le goût des « chicayas » éternelles, qui les conduiraient à rendre l'élection d'un président encore plus compliquée que celle d'un pape, pour laquelle il a un jour été décidé d'enfermer les cardinaux entre les quatre murs du conclave !
De tels débordements sont ainsi tout à fait exceptionnels. En général, quand ils se produisent, c'est que l'affaire est déjà bien mal engagée et que les parties prenantes doivent rechercher une solution.
Par conséquent, ne nous y trompons pas : ces quelques cas de crise ne doivent pas être vus comme des stigmates qui nous pousseraient aujourd'hui à modifier les relations entre ces mêmes parties prenantes.
Je le répète, je ne suis pas favorable à l'élection d'un manager, car l'université est non pas une entreprise, mais un haut lieu de l'esprit. Le dirigeant de l'université doit d'abord être l'homme ou la femme de la synthèse et du rassemblement, avec toute la difficulté que cela représente. En effet, trop souvent, seules des solutions blessantes permettent de mettre à l'écart telle ou telle personne de telle ou telle discipline dont le comportement est jugé insupportable.
Voilà ce qu'est l'université : un lieu où il faut être capable de promouvoir la synthèse et le rassemblement. Je le reconnais, c'est un art particulier qui n'est pas à la portée de tout le monde. Il importe d'abord d'y préparer le président de l'université, qui doit être l'une de ses figures emblématiques.
C'est la raison pour laquelle, madame la ministre, je soutiens cet amendement. Je désapprouve votre vision de l'université : non seulement vous souhaitez la faire devenir partie prenante d'un marché concurrentiel, mais vous entendez aussi, au travers du mode d'élection que vous mettez en place, placer à sa tête un type de personnalité bien particulier pour en être l'incarnation.