Ce titre IV, pilier majeur de la réorganisation de notre système sanitaire et médico-social, engage, avec l’article 28, une réforme profonde de la création et du financement des établissements médico-sociaux.
La réforme qui vous est soumise est véritablement fondamentale pour l’ensemble des établissements et services accueillant des personnes âgées et handicapées.
Dans les prochaines années, notre pays devra faire face aux enjeux du vieillissement de sa population. Si, comme nous nous en réjouissons, l’espérance de vie en bonne santé ne cesse d’augmenter, l’accroissement du nombre de patients atteints de la maladie d’Alzheimer ou d’une maladie apparentée va constituer un défi majeur pour notre société.
À cela viennent s’ajouter les attentes de plus en plus grandes des personnes concernées et de leurs familles pour une amélioration de la prise en charge non seulement de la dépendance, mais aussi du handicap. Je citerai notamment le souhait d’une nouvelle approche concernant la prise en charge de l’autisme. Nous devons aux Français concernés de nous battre pour leur apporter des solutions de qualité, respectueuses de leur dignité et de leur volonté d’autonomie.
Pour cela, il faut bien opérer des décloisonnements entre le secteur sanitaire et le secteur médico-social. Cette évolution ne pourra pas s’accomplir sans une adaptation de ce dernier à ces nouvelles attentes et à ces besoins accrus. Disposer d’outils plus performants pour répondre à cette demande pressante est impératif.
Voilà pourquoi ce projet de loi est tout aussi fondateur pour le monde médico-social que pour le monde hospitalier. Il faut d’ailleurs cesser de penser que ce secteur, parce qu’il est éclaté en de multiples structures, serait un « poids léger » de la réforme.
En effet, le secteur médico-social représente une dépense de 18 milliards d’euros par an. Il concerne 30 000 établissements répartis sur tout le territoire, qui représentent un million de places, et emploie plus de 700 000 personnes, 410 000 dans le champ de la dépendance et 310 000 dans celui du handicap.
Mesdames, messieurs les sénateurs, ce secteur représente aussi, vous le savez, un gisement d’emplois pérennes et non délocalisables. En ce début d’année 2009, c’est même le seul à avoir embauché plus que l’an dernier à la même époque. Notre défi est de rendre ses métiers attractifs et de les ouvrir pour assurer à tous ses salariés des perspectives de formation et de carrière intéressantes.
Avant d’aborder le dispositif tel qu’il ressort du texte de la commission, je voudrais remercier M. le rapporteur de l’attention qu’il a portée dans ses travaux préparatoires au secteur médico-social et pour le soin qu’il a pris à conforter les avancées obtenues lors du débat à l’Assemblée nationale.
Je ne peux que me réjouir de la volonté exprimée de concert par M. le rapporteur et par M. le président de la commission des affaires sociales de donner à la discussion du titre IV tout le temps et toute l’attention nécessaires, car, les débats en commission l’ont montré, il constitue à l’évidence un temps fort du projet de loi.
Avec Brice Hortefeux, je voudrais d’ailleurs aller tout à fait dans le sens des propos tenus par Roselyne Bachelot-Narquin et vous confirmer que cette réforme se fera, en ce qui concerne le secteur médico-social, en retenant les trois lignes forces suivantes.
Il s’agit, d’abord, de la pleine prise en compte des enjeux médico-sociaux dans les politiques conduites par l’agence, puisqu’ils figureront au même rang que les enjeux sanitaires.
Il s’agit, ensuite, de la pleine association des intervenants de ce secteur – associations et collectivité locales – à la définition des priorités de la politique régionale de santé et à ses conditions de mise en œuvre.
Il s’agit, enfin, de la garantie des moyens financiers adéquats par la mise en œuvre effective de ce qu’on appelle la fongibilité asymétrique.
Vous l’avez compris, le projet de création des ARS, loin de ne constituer qu’une simple réforme administrative, est bien une révolution culturelle, si vous me permettez l’expression. Il faut passer d’une administration centrée sur la santé, entendue comme la prise en charge des soins aigus et de la maladie, à un service public qui impulse une conception globale de la santé, envisagée, selon la définition de l’OMS, l’Organisation mondiale de la santé, comme un état de complet bien-être physique et mental. À ce titre, l’accompagnement des personnes en situation de perte d’autonomie sera bien, tout comme la prévention, au cœur du projet des ARS.
Comme j’ai eu l’occasion de le dire devant les représentants des différents acteurs de ces secteurs, les ARS sont une chance pour le médico-social. Cela suppose, bien sûr, de préserver les acquis de ce secteur, notamment la prise en charge globale et personnalisée et la place privilégiée des usagers et associations.
Telle est justement l’intention du Gouvernement, dont je veux vous faire partager la conviction. L’ARS, c’est non pas la domination d’un secteur sur un autre, mais justement l’addition de toutes les forces pour assurer la cohérence des actions en matière de santé, qu’il s’agisse de prévention, de soins aigus ou d’accompagnement au long cours des personnes en perte d’autonomie.
La création des ARS constitue un cadre nouveau pour le secteur médico-social et un changement culturel important. C’est notamment le cas avec la mise en place d’une procédure d’appel à projets. C’est le cas également, pour ce qui a trait à la définition collective et transversale des besoins, avec le projet régional de santé et le schéma régional d’organisation médico-sociale. Ce que nous avons voulu, c’est un système de soins décloisonné, mais où la spécificité du médico-social reste garantie.
La discussion du projet de loi à l’Assemblée nationale a permis de faire considérablement progresser le texte. Je rappellerai simplement ici les quatre points les plus fondamentaux.
En premier lieu, après la lecture à l’Assemblée nationale, la place de l’usager est désormais garantie dans toutes les instances de gouvernance de l’agence régionale de santé : le conseil de surveillance, la conférence régionale de la santé et de l’autonomie, les commissions spécialisées et les commissions d’appel à projets. C’était essentiel pour ce secteur, car, en particulier dans le monde du handicap, les usagers, les associations et les familles ne peuvent pas être dans la même relation à l’institution que le patient face au médecin ou à l’hôpital. Nous avons été très vigilants sur ce point.
En deuxième lieu, le projet de loi a été complété pour garantir au secteur médico-social un financement pérenne et croissant afin de répondre à l’importance des besoins à venir grâce au mécanisme de la fongibilité asymétrique.
Par ce dispositif, complété à l’Assemblée nationale, le Gouvernement a voulu non seulement garantir que les moyens de l’ONDAM médico-social resteront dédiés exclusivement aux établissements et services médico-sociaux, mais aussi s’assurer que, lorsque des restructurations hospitalières se traduiront par un développement de l’offre médico-sociale, les crédits nécessaires à cette nouvelle offre seront bien transférés. Ce dispositif, vous l’aurez compris, est crucial pour nous permettre de faire face à la montée des besoins.
En troisième lieu, toujours pour faire face aux besoins nouveaux, il nous faut ouvrir plus rapidement et efficacement de nouvelles structures. C’est l’objectif de la réforme des CROSMS, les comités régionaux de l’organisation sociale et médico-sociale.
La nouvelle procédure d’appel à projets sera plus simple. Elle accordera d’emblée autorisation et financement. Ainsi, le décalage important que l’on peut constater aujourd'hui entre l’autorisation technique et le financement « sonnant et trébuchant », et donc le démarrage des travaux, n’existera plus. Cela mettra fin aux listes d’attente actuelles qui font qu’un promoteur peut rester des années sans savoir si son projet répond aux besoins prioritaires et s’il sera réellement financé.
Cette procédure nouvelle fera une place particulière aux projets innovants et permettra donc de maintenir la capacité des acteurs de terrain à faire remonter les initiatives les plus intéressantes.
Enfin, en quatrième lieu, la prise en charge du handicap et de la dépendance implique en général très fortement l’entourage de la personne âgée ou de la personne handicapée. Cela doit nous conduire à nous préoccuper du soutien aux aidants familiaux. Le projet de loi prévoit désormais le financement de la formation des aidants et des accueillants familiaux. Cette mesure nécessitait en effet une intervention législative.
Quand la maladie d’Alzheimer survient, les familles sont trop souvent démunies.