J'en viens maintenant aux grandes lignes de ce budget européen pour 2008.
L'avant-projet proposé par la Commission connaît une hausse modérée des crédits d'engagement, mais une hausse importante des crédits de paiement due à la conjonction de la montée en puissance des nouveaux programmes 2007-2013 et de la fin des programmes 2000-2006. En effet, il y a toujours chevauchement entre les programmes des deux périodes : nous retrouvons là un des défauts inhérents au mécanisme des perspectives financières et à un système budgétaire fondé sur des ouvertures de « droits à dépenser », et ce n'est pas très satisfaisant. Visiblement, la LOLF n'est pas mise en oeuvre ici !
En crédits de paiement, les augmentations les plus importantes concernent la recherche, avec une hausse de 54, 5 % pour le programme-cadre de recherche et développement ; les réseaux de transport transeuropéens, en croissance de 88, 8 % ; les crédits des rubriques « Cohésion » et « Actions extérieures », dont l'augmentation est d'environ 7, 5 %.
Ces hausses traduisent les nouvelles priorités politiques : stratégie de Lisbonne, politique extérieure, politique migratoire et de coopération policière et judiciaire.
Le débat entre institutions s'est notamment cristallisé autour du financement de Galileo et de l'Institut européen de technologie. Concernant Galileo, il s'agissait de trouver les ressources nécessaires pour combler le « vide » de 2, 4 milliards d'euros laissé par le désengagement des partenaires privés. Le Conseil européen et le Parlement européen semblent avoir trouvé vendredi dernier un compromis - transitoire au moins - aux termes duquel ce financement serait assuré par un redéploiement des crédits de la programmation 2007-2013, concernant notamment 1, 6 milliard d'euros de crédits PAC non consommés en 2007, compte tenu de la hausse des cours mondiaux des céréales. Il s'agit là aussi de rafistolage, mais il fallait avancer et j'espère que, par la suite, nous trouverons un véritable financement concernant un problème bien réel.
Au-delà des jeux de vases communicants auxquels nous assistons, ces tensions trahissent un problème de définition de ce que doit être la politique européenne de recherche. C'est un point central aujourd'hui dans l'histoire de l'Europe. Il me semble que les actions menées par les États membres et l'Union européenne demeurent peu coordonnées, pour ne pas dire totalement « étanches », et que les échelons national et communautaire constituent, pour les acteurs de la recherche, deux guichets distincts qui se concurrencent. Je me félicite, à cet égard, que l'espace européen de recherche fasse l'objet des priorités définies pour la présidence française pour 2008.
Il faut une véritable politique commune de la recherche, valorisant les synergies et encourageant la division du travail, faute de quoi l'Europe perdra sa place dans le monde.
Je souhaite insister, en dernier lieu, sur le fait que la présidence française doit être l'occasion de progresser sur la question de la réforme du système de financement de l'Union européenne, en application de la clause de révision de l'accord interinstitutionnel de mai 2006. Les questions que nous devons nous poser, à cet égard, monsieur le secrétaire d'État, sont les suivantes.
Un budget sous plafond a-t-il un sens politique ? On est de nouveau loin de la LOLF. Ce sont non pas les politiques publiques qui doivent être calibrées sur les moyens, mais les moyens qui doivent accompagner des politiques préalablement définies et acceptées. N'est-ce pas cela le principe du consentement à l'impôt ? Nous en sommes bien loin ! Un budget dont les recettes et les dépenses sont déterminées par des autorités différentes est-il véritablement démocratique ? À nouveau il n'exprime en rien le principe du consentement à l'impôt. Il cumule les inconvénients d'être incompréhensible pour les citoyens et d'accréditer auprès d'eux l'idée selon laquelle l'Europe bénéficierait d'un « droit de tirage » sur la richesse nationale. Ce n'est pas cette Europe que nous voulons.
Peut-on laisser perdurer le système actuel de ressources propres, dont la dernière réforme a de nouveau suscité l'octroi de « ristournes » à certains États ? Je n'en rappelle pas le détail, vous le connaissez.
Une fiscalité européenne serait une ressource plus incitative pour les agents économiques, plus autonome à l'égard des États membres et plus lisible pour les citoyens.
Il semble que la position adoptée jusqu'à maintenant par la France à l'égard de ce réexamen global montre un certain retrait, monsieur le secrétaire d'État, notamment incarné par la crainte qu'il fasse voler en éclats les perspectives 2007-2013 considérées comme « sanctuarisées ». Par ailleurs, le « flou » volontairement entretenu par la décision des chefs d'État et de gouvernement en 2005, qui mentionne « 2008-2009 » comme horizon temporel pour le début de la réforme, ne doit pas conduire la France à différer ce débat crucial en considérant que ses successeurs à la Présidence le feront mieux qu'elle.
La France doit orienter et non subir ce débat. La présidence française est l'occasion de le faire. Il faudra du courage ! Nous savons, monsieur le secrétaire d'État, que vous n'en manquez pas. C'est pourquoi je vous demande de ne pas éluder cette question, car c'est en grande partie sur celle-ci que se jouera l'avenir de l'Union.