Pour ce qui est de l’internat, les mesures proposées vont aussi dans le bon sens puisqu’elles visent à prendre en compte les besoins des patients et non pas seulement ceux de l’université.
Les dispositions qui ont été les plus médiatisées, notamment celles qui concernent l’alcool, sont, à l’issue du vote de l’Assemblée nationale, parvenues à un point d’équilibre qu’il ne faudrait pas trop modifier.
En dehors de ces éléments qui entraînent mon adhésion au texte, j’ai aussi quelques bémols à formuler.
Comme je l’ai déjà dit, je déplore le caractère quelque peu touffu du texte qui nuit à sa lisibilité globale, même s’il faut reconnaître en toute justice que ce n’est pas de la responsabilité essentielle du Gouvernement si le texte compte plus de cent articles au sortir de l’Assemblée nationale.
Le deuxième bémol a trait aux articles L.6161-4 et L.6161-4-1 du code de la santé publique concernant les contrats des médecins dans le cadre de l’hospitalisation privée.
J’ai l’impression que le passage par la voie conventionnelle était plus approprié qu’un texte législatif. Dans le cadre des établissements gérés par les associations, cela n’entraîne pas d’inconvénient majeur ; il n’en est pas de même pour les établissements à but lucratif. Cela donnait tout pouvoir aux représentants des intérêts financiers et cela entraînait un déséquilibre difficile à justifier. Je ne pense pas que notre politique a pour but de favoriser les entreprises dont les intérêts ne concordent pas toujours avec les objectifs de santé publique.
De plus, les médecins qui s’inquiètent de cela ne sont pas forcément ceux qui ont livré ces établissements aux financiers et les modifications apportées par la commission vont dans le bon sens.
Le troisième bémol concernait l’article 18. Le rapporteur s’en est expliqué et j’adhère totalement à son point de vue. Le texte auquel on est parvenu me semble beaucoup plus raisonnable.
Personnellement, je ne crois pas du tout au testing parce que c’est un risque d’atteinte à la liberté dans la mesure où ceux qui s’y livrent ne sont pas de bonne foi. Par ailleurs, une incitation à commettre un délit ne me paraît pas être une démarche très civique.
À ce propos, je veux attirer l’attention sur le fonctionnement de la CMU.
Certes, je désapprouve totalement les praticiens qui refusent dans leur cabinet les bénéficiaires de la CMU. Toutefois, il faut savoir que certains bénéficiaires ne présentent pas les documents nécessaires, que d’autres, tout en ayant la carte CMU, n’en sont plus bénéficiaires et, dans ce cas, c’est le praticien qui n’est pas payé par la sécurité sociale. Cela peut expliquer un certain nombre de problèmes.
Cela m’amène, de façon annexe, à évoquer certains tarifs. Les dentistes ont souvent, sur ce sujet, été pointés du doigt. Si l’on revoyait le niveau de rémunération de certains actes qui n’ont pas évolué depuis plus de vingt ans, peut-être les dentistes pourraient-ils pratiquer des tarifs un peu différents sur d’autres.
Un autre bémol concerne l’article 22 ter, ajouté par l’Assemblée nationale. Vous connaissez mon opposition à la prise en charge de la pilule abortive. Cela pourrait suffire, mais, dans ce cas, je ne vois pas pourquoi les étudiants se verraient appliquer un traitement différent des autres jeunes majeurs. De plus, la médecine universitaire est loin d’être assez efficace pour que cette disposition soit mise en œuvre.
Pour conclure, je dirai que cette réforme va dans le bon sens mais que ce n’est qu’une étape. En effet, de grands défis nous attendent.
Il n’est pas sûr que les cadres institutionnels des établissements publics et privés puissent être suffisamment performants à l’avenir. Si les CHU peuvent garder un statut public avec une autonomie relative, le rapprochement des autres structures doit conduire à un rapprochement institutionnel avec de nouvelles formes juridiques qui pourraient s’inspirer, par exemple, des fondations hollandaises.
Le second défi, qui apparaîtra bien sûr dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, est celui du financement. Si ce texte peut introduire plus de rationalité et de rigueur, il ne résout pas encore la question des coûts et des ressources. Celles-ci sont d’ailleurs obérées par la crise économique actuelle. Mais quand celle-ci sera passée, plus rien ne sera comme avant. Nous serons confrontés à des choix : soit une diminution des prestations prises en charge par l’assurance obligatoire en privilégiant les soins les plus coûteux, soit une augmentation nette des cotisations payées par l’assuré, ce qui serait fort injuste pour les jeunes générations et les familles nombreuses. En aucun cas, on ne pourra faire croire qu’on rasera gratis et qu’un retour à la croissance résoudra la question.